Pierre Havaux

Et la Flandre dans tout ça? Mettre de la distance à l’école (chronique)

Pierre Havaux Journaliste au Vif

Retour intégral en classe cinq jours sur cinq, l’école numérique patientera. A l’ère du Covid-19, l’enseignement flamand évitera finalement la parenthèse initialement programmée le mercredi pour l’apprentissage à distance. Partie remise.

Responsable de la scolarité en Flandre, Ben Weyts (N-VA) tient à sa réputation d’homme impatient d’aller de l’avant : autant chercher à faire du maudit virus un allié dans la course au progrès, en user comme d’un marchepied vers l’enseignement de demain. Pour sûr, selon Ben Weyts, l’avenir appartiendra aussi à l’école numérique. Il faudrait être sot pour ne pas positiver dans l’adversité, ne pas tirer profit d’une bonne crise pour faire basculer la Flandre dans l’enseignement 2.0.

Pour preuve que cette volonté de montée en puissance ne repose pas sur du vent, 35 millions d’euros ont été libérés début juillet par le gouvernement flamand (N-VA – CD&V – Open VLD) à l’intention du primaire (neuf millions) et du secondaire (vingt-six millions) afin de pourvoir l’école flamande en (premiers) moyens technologiques. Un budget carrément doublé.

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Pas si vite, s’inquiète-t-on ici et là. A la veille de fermer ses portes pour cause de vacances, le parlement flamand s’était ému de ces mâles résolutions et les appels à la prudence se sont alors fait entendre jusque sur les bancs de la majorité gouvernementale. Des pensées et des paroles se sont envolées vers les plus vulnérables de la société, celles et ceux qui risquent de rester à quai, parce que mal outillés ou évoluant dans un milieu familial mal adapté et qui, si on n’y prête garde, pourraient verser dans le fossé numérique toujours bien réel.

Attention à ne pas engendrer une machine à exclure. A ne pas accroître la charge de travail des professeurs appelés à se démultiplier entre cours en classe et leçons en ligne. A ne pas se détourner de la bonne vieille école où les enfants apprennent à s’apprivoiser, à s’apprécier, à se chamailler. Tout cela au nom d’une soif de modernité mal placée.

L’enseignement digital est à consommer avec modération. « Ne versons pas dans l’excès de confiance, n’imaginons pas qu’en quelques mois de temps nous pourrons faire un saut de 2020 à 2030 », a fait observer le député Jean-Jacques De Gucht (Open VLD). Le banc syndical se cabre lui aussi, là où l’enseignement catholique pousse plutôt à franchir le pas.

Trêve de frilosité, rien qui puisse doucher l’enthousiasme de Ben Weyts, encore moins ébranler son intime conviction. Une bonne pincée d’enseignement en ligne ne pourra jamais faire de tort à n’importe quelle scolarité, celle du mieux doué comme celle de l’élève davantage à la peine. L’un comme l’autre y gagneront en responsabilisation, en capacité à se prendre en main.

Il suffit d’ailleurs d’être à l’écoute de ce que les écoliers sondés sur leur apprentissage en milieu confiné ont fait remonter : ils se disent majoritairement conquis par la formule, emballés à l’idée de poursuivre dans la voie de la modernité.

Mais Ben Weyts réfute les intentions que certains lui prêtent un peu vite : les cours en ligne ne seront jamais que le complément au meilleur enseignement qui soit, « celui qui sera toujours donné par le professeur en classe ». Non, il ne sera pas le ministre qui troquera la craie et le tableau noir pour la souris et le laptop mais celui qui en prônera la cohabitation.

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