Elke Van den Brandt © DR

Elke Van den Brandt : »On va donner un espace légitime à tous les modes de déplacement »

Caroline Dunski Journaliste

Devenue ministre en juillet dernier, la Ganshorenoise Elke Van den Brandt (Groen) a choisi d’assumer des compétences qu’elle juge complémentaires : la mobilité, les travaux publics et la sécurité routière.

Quels sont les objectifs du gouvernement bruxellois en matière de réduction de l’emprise automobile sur l’espace public ?

Si on parvient à convaincre 20 % des automobilistes de venir à Bruxelles autrement, en offrant des alternatives fiables et confortables à la voiture individuelle, on annule les embouteillages. Ceux qui n’ont pas d’alternative y gagneront un trafic plus fluide. Si tout le monde a une place légitime dans le trafic, tout le monde est gagnant. Ma priorité est que nous puissions bouger librement et en toute sécurité.

Comment faire ?

Mes prédécesseurs ont investi massivement dans le transport public et on va continuer à le faire. La Stib est déjà performante. Le vélo a également le vent en poupe. Surtout quand on constate que deux tiers des déplacements intrabruxellois concernent une distance de moins de 5 km : une distance idéale pour le vélo. Or, en comparaison de villes similaires en taille, le vélo est beaucoup moins utilisé à Bruxelles. On va donc investir dans des infrastructures sécurisées pour les cyclistes. Veiller à ce qu’ils aient une place dans l’espace public favorisera le shift modal. Actuellement, 70 % de l’espace public est construit pour la voiture individuelle, alors que pour le vélo, c’est 2 %. On va faire en sorte qu’il y ait un espace légitime pour tous les modes de déplacement.

Quelle place occupe dans votre politique le Plan régional de mobilité Good Move qui a précédé votre prise de fonction ministérielle ?

Ce n’est pas mon plan ou celui de mon prédécesseur, c’est celui des Bruxellois. C’est un processus de coconstruction sous la forme d’une enquête publique à laquelle plus de 8 000 personnes ont réagi. Après l’analyse de ces réactions, nous rédigeons une deuxième version du plan qui sera approuvée par le gouvernement dans les semaines à venir. Good Move constitue la colonne vertébrale de notre action. Tout ce qui est décidé et élaboré l’est dans l’esprit du Plan régional de mobilité.

Good Move entend rationaliser le trafic de transit et créer des mailles de circulation apaisée. De quoi s’agit-il ?

De zones d’un diamètre de 1 à 2,5 km autour d’un quartier, où on privilégie la marche et le vélo pour les trajets locaux et les transports publics pour les connexions entre les quartiers et avec le reste de la Région. Le trafic de transit y est par contre fortement découragé. Je viens de lancer un appel aux communes pour en créer cinq par an pendant dix ans, la durée prévue de Good Move. On a déjà refait un quartier dans cet esprit, à la place Fernand Cocq, à Ixelles, en aménageant une zone 30 et un espace verdurisé. Gand, qui a réduit la pollution de l’air de 18 % et le trafic de transit de 30 %, sert d’exemple. Même les petits commerçants, qui avaient des craintes lors du lancement du plan gantois de circulation, ont pu voir l’impact positif sur leur activité. Les piétons et les cyclistes sont généralement de meilleurs clients pour le commerce local. Ils s’arrêtent plus facilement.

Accord sur les villes modèles, pas sur la fiscalité

S’ils ne partagent pas leurs analyses et priorités, Elke Van den Brandt et Vincent De Wolf citent les mêmes villes en exemple. Pour la ministre Groen de la Mobilité,  » Copenhague est une ville formidable où 50 % des déplacements se font à vélo. Dès qu’on crée des espaces agréables pour les cyclistes, ils les utilisent. Les cyclistes, c’est comme l’eau, si on crée de la place, ils la prennent.  » Le bourgmestre MR d’Etterbeek souligne également le grand usage du vélo dans la capitale danoise, comparable à Bruxelles et ajoute :  » Il y a le métro partout et on continue à inaugurer de nouvelles lignes. On voudrait faire comme à Copenhague : le métro partout où on peut et partout ailleurs privilégier le vélo.  » Tous deux citent aussi Bordeaux avec, dixit De Wolf,  » un réseau de transports en commun efficace et bien construit « .

En revanche, si les deux opposants bruxellois souhaitent la suppression des taxes de mise en circulation et de circulation, ils ne partagent pas la vision d’une taxation alternative pour les remplacer. En août 2016, les députés libéraux du parlement bruxellois proposaient un plan de mobilité dans lequel le volet fiscal s’appuie sur la définition d’un écoscore moyen du parc automobile bruxellois en matière d’émissions de gaz à effet de serre (50 %), de pollution de l’air (40 %) et de pollution sonore (10 %). Tout propriétaire d’un véhicule affichant un meilleur score que la moyenne bruxelloise payerait moins de taxes. Elke Van den Brandt plaide pour l’instauration d’une taxe kilométrique, liée à l’usage du véhicule sur le territoire de la Région et dépendant du type de véhicule et du moment de son utilisation, pendant ou hors des heures de pointe.

Vincent De Wolf: « Réduire le nombre de déplacements est liberticide »

Vincent De Wolf.
Vincent De Wolf.© HATIM KAGHAT

Vincent De Wolf, bourgmestre d’Etterbeek et chef de file des élus MR au parlement bruxellois, s’inquiète du caractère  » liberticide  » du plan Good Move.

Quelle analyse faites-vous des politiques de mobilité successives ?

De 2009 à 2014, le gouvernement Picqué-Vervoort I considérait le projet de métro nord comme  » prioritaire « . Sous Vervoort II, de 2014 à 2019, c’était même une  » priorité absolue « . Or, le projet sera finalisé pour le tronçon Albert-Nord en 2025 et pour le tronçon Nord-Bordet en 2030, soit vingt-et-un ans après, pour seulement 10 km de ligne. Durant le même laps de temps, Madrid a inauguré 47 km de nouvelles lignes de métro, soit plus que l’ensemble de notre réseau existant, qui fait 40 km, et Copenhague a inauguré quatre nouvelles lignes qui font la même taille que notre réseau actuel. Entre 2003 à 2014, les écologistes ont fait ralentir le projet de métro.

Que pensez-vous du plan Good Move ?

Le plus inquiétant dans ce plan, c’est de vouloir réduire globalement le nombre de déplacements. Pour nous, c’est totalement liberticide et c’est bien sur l’offre et les alternatives proposées qu’il faut miser avant de décréter des mesures. Sans budget, sans subsides et sans travaux, c’est de l’incantation. Concernant la Zone 30 généralisée, nous rejoignons les constats en matière de sécurité routière et de qualité de l’air, mais telle qu’elle est présentée, elle ne nous paraît ni réaliste ni souhaitable, car elle généralise une règle sans prendre en compte les réalités et spécificités de chaque voirie. Nous plaidons pour des zones 30 intelligentes et, pour

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