Nicolas De Decker

Didier Reynders, une certaine idée de la modestie

Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Et c’est ainsi que de toute la hauteur de son altitude, qui était fort élevée, Didier Reynders condescendit à baisser le regard vers la grande masse de l’en- dessous, et qu’il ouvrit la bouche pour daigner l’informer.

Pontife souverain fulminant sa bulle,  » même pape je peux le faire, je suis baptisé « , expliqua-t-il d’ailleurs, il adressa à la ville et au monde le message que l’une et l’autre, geignant d’une brûlante impatience, attendaient. Au Soir, le jeudi 21 février, Didier Reynders répéta qu’il était le meilleur et qu’il ferait ce qu’il voudrait. Il y a quelques semaines encore, le plus charismatique dirigeant mondial, c’est-à-dire lui-même, avait expliqué que les autres dirigeants européens, beaucoup moins charismatiques, l’avaient supplié, en larmes bien sûr, presque s’autoflagellant, d’accepter d’être le prochain secrétaire général du Conseil de l’Europe. C’était normal et il avait accepté parce qu’il était le meilleur. Au Soir désormais, il expliquait que les autres dirigeants de son parti, beaucoup moins charismatiques, l’avaient adjuré, la morve incantatoire aux lèvres, presque rampant, d’accepter de se présenter sur la liste législative à Bruxelles. C’était normal et il avait accepté parce qu’il était le meilleur.

Humblement, parce que c’est à ça qu’on reconnaît les vrais meilleurs, il tint néanmoins à préciser quelque chose.  » Après les élections, on verra bien qui fait quoi « , dit-il au Soir.

Parce qu’il est le meilleur, en effet, Didier Reynders se rappelait, car on reconnaît les meilleurs à leur bonne mémoire, qu’on allait bien voir qui ferait quoi après les élections communales de 2006 : il voulut être bourgmestre de Liège, et cela ne se passa pas comme il l’avait espéré.

Cela ne se passait pas toujours comme le meilleur l’avait décidé pour Didier Reynders.

Parce qu’il est le meilleur, il se rappelait qu’on allait bien voir qui ferait quoi après les élections législatives de 2007 : il voulut être Premier ministre, et cela ne se passa pas comme il l’avait espéré.

Parce qu’il est le meilleur, il se rappelait qu’on allait bien voir qui ferait quoi après les élections législatives de 2010 : il voulut rester président du Mouvement réformateur, et cela ne se passa pas comme il l’avait espéré.

Parce qu’il est le meilleur, il se rappelait qu’on allait bien voir qui ferait quoi après les élections régionales, européennes et législatives de 2014. Il voulut être ministre-président bruxellois, commissaire européen et même Premier ministre, et cela ne se passa pas comme il l’avait espéré.

Parce qu’il est le meilleur enfin, il se rappelait qu’on allait bien voir qui ferait quoi après les élections communales de 2018 : il voulut même être bourgmestre d’Uccle, et cela ne se passa pas comme il l’avait espéré.

Car, en effet, cela ne se passait pas toujours comme le meilleur l’avait espéré pour Didier Reynders.

Alors, du très haut de sa céleste assurance, il ajouta une précision à sa déclaration :  » Si cela ne se passe pas comme je l’espère, je souhaite rester dans le parcours politique belge « , dit-il au Soir.

Didier Reynders voulut être Jean Gol, et cela ne se passa pas comme il l’avait espéré.

Il ne le voulut jamais, mais il ne serait même pas Charles Michel.

Il serait Didier Reynders.

Toujours le meilleur.

Le plus malin.

Le plus drôle et le plus habile.

Jusqu’au moment où on voit bien qui fait quoi après les élections.

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