Luc Van Der Kelen

Di Rupo conquiert la Flandre

Luc Van Der Kelen Conseiller politique pour BPlus

Elio, Elio. Une photo, SVP. Où que le Premier ministre se rende en Flandre, ses collaborateurs n’en croient pas leurs yeux. Pendant la Ronde des Flandres, quelque 400 fois, le chef du gouvernement a dû prendre la pose avec de simples gens issus du peuple, souvent électeurs de la N-VA. Il en fut de même lors du Championnat du monde de cyclo-cross, où, pour la première fois, Di Rupo a tâté la Flandre profonde, celle des hommes façonnés par la glaise du terroir. Le spectacle a impressionné Kris Peeters, devenu la personnalité la plus populaire au Nord. Même tableau à Gand. Comme si Di Rupo était Leonardo DiCaprio.

Bref, le « papillon » « voulant piéger » la Flandre – lire : qui tramerait son asphyxie – va à la conquête de la Flandre. Son charme fait merveille. Une combinaison unique d’un air de jeunesse dandy, d’un sourire de gamin, sur fond de ce n£ud papillon qui ne passe jamais inaperçu. Les Flamands sont séduits.

La digne présence de Di Rupo à Louvain, à Lommel et à l’aéroport de Melsbroeck a frappé tant ses amis que ses adversaires en Flandre. Montrant quelques signes d’hésitation au démarrage, le Premier ministre a fini par exprimer son sentiment de profonde et sereine compassion.

Quand Di Rupo s’est installé au 16, rue de la Loi, tout le monde en Flandre croyait qu’il personnifiait le maillon faible du gouvernement, pas tant sur le plan du contenu, mais sur celui de la forme et de la perception. Un exécutif dominé par le PS, piloté par le PS, minoritaire en Flandre, avec un Premier ministre ne sachant pas s’exprimer couramment dans la langue de la majorité de la population. Il ne faut pas être grand clerc pour deviner que des partis flamands tels le CD&V et l’Open VLD l’attendaient au tournant. Et à la N-VA beaucoup se sont sûrement estimés heureux avec ce cadeau du ciel, dans la perspective de la mère de toutes les élections, en 2014.

Or il y a du changement dans l’air. Di Rupo ne s’en sort pas trop mal, sauf, peut-être, à la Chambre dominée par la N-VA qui n’est pas économe de ses critiques acerbes. Les sondages sont raisonnablement bons. Une majorité pourrait même se rassembler autour de son nom. Pour l’instant, son score est directement proportionnel à celui de sa connaissance du néerlandais : 5 sur 10. Si, dans un an, il obtenait un 7 ou un 8, ce qui est faisable pourvu qu’il s’exerce chaque semaine, et s’il était capable de croiser l’épée avec Bart De Wever lors d’un débat télévisé en direct, son handicap pourrait se convertir en atout au Nord.

L’action future du gouvernement sera déterminante. Or son palmarès devient petit à petit impressionnant. Le budget, suivi d’un contrôle budgétaire, sans que la population en souffre trop. 13 milliards d’économies, avec un Premier ministre PS ! Les réformes économiques et sociales. La nouvelle politique de la mobilité. Le vent nouveau soufflant sur la politique de l’asile et de la migration. La réforme de l’Etat : 200 pages de textes légaux. La réforme de la justice qui s’annonce, la politique de la relance qui s’échafaude. Cela fait beaucoup.

Dans les rangs de la majorité, des plaintes sourdes se laissent parfois entendre. Mais, au gouvernement, et au kern, l’ambiance reste bonne. La confiance est intacte. Les incidents ne pèsent pas sur le cours des événements. Certes, le succès dans les isoloirs n’est pas garanti pour autant. Mais à la N-VA l’insouciance n’est sans doute plus ce qu’elle était.

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