Gérald Papy

Deutschland über alles : en foot comme en économie ?

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

La finale 100 % germanique de la Ligue des champions est-elle une métaphore de la domination économique allemande ? Un peu facile, quoique…

A priori, il pourrait sembler trop facile de voir dans la qualification du Bayern de Munich et du Borussia Dortmund pour la finale de la Ligue des champions – une première pour deux clubs d’un même pays – la métaphore de la domination de l’Allemagne sur l’Europe économique et politique. Après tout, le football de haut niveau, malgré son extrême professionnalisation, reste un exercice aléatoire où la chance ou les aléas du moment peuvent encore orienter le résultat d’une confrontation (même si en empilant 7 buts en deux rencontres à l’ex-meilleure équipe du monde Barcelone, les Munichois ont fortement réduit la part de l’aléatoire…). Et puis l’internationalisation du football est devenue telle qu’un club s’identifie de moins en moins, sur le terrain, à son creuset d’origine. Pour preuve, lors de ces demi-finales de Champions’ League, deux joueurs allemands (Özil et Khedira) figuraient dans les rangs du Real de Madrid alors qu’un Espagnol (Martinez) défendait les couleurs du champion d’Allemagne Munich. Même si, en l’occurrence, Barcelone, Munich et Dortmund conservent, contrairement à d’autres clubs-vedettes du continent, une forte ossature de joueurs nationaux.

Incongrue donc la comparaison entre le sportif et l’économico-politique autour de ce grand rendez-vous médiatique qu’est la finale de la Ligue des champions ? Pas totalement non plus. Parce qu’au-delà de l’aspect strictement sportif, l’avènement des deux clubs allemands consacre aussi un succès en termes de gestion. Plus solide, plus prudente, celle des clubs allemands laisse augurer un avenir plus serein que celle des formations espagnoles. Si Real et Barça peuvent se prévaloir d’un chiffre d’affaires plus impressionnant (512 et 483 millions d’euros pour l’exercice 2011-2012 contre 368 et 188 millions d’euros pour Munich et Dortmund, voir Le Monde du 27/04), c’est sans compter sur une dette inquiétante (450 et 350 millions d’euros pour Real et Barça) à laquelle les deux champions allemands échappent (40 millions d’euros de dette pour Dortmund, 129 millions d’euros de boni pour Munich). Sachant en outre que l’affluence dans les stades de Bundesliga ne désemplit pas (45 000 spectateurs en moyenne) au contraire de la Liga (28 000 spectateurs), tout indique que l’ère de la domination espagnole sur le football européen est révolue. Reste à savoir si la suprématie durable que beaucoup d’observateurs pronostiquent pour le Bayern de Munich s’accommodera toujours d’une gestion rigoureuse alors qu’est attendue en Bavière l’arrivée de l’ancien coach de… Barcelone, Pep Guardiola, avec un salaire à la hauteur de sa réputation (entre 8 et 12 millions d’euros annuel).

Sans doute, peut-on compter sur la vigilance d’Angela Merkel pour éviter au football allemand les dérives que connaît le sport en Espagne. En attendant, il lui faudra faire preuve de beaucoup d’habileté pour éviter le soupçon d’arrogance qui lui est déjà souvent reproché ces temps-ci lors de la finale la Champion’s League, lorsqu’elle se retrouvera seul dirigeant européen concerné dans la tribune de Wembley le 25 mai.

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