Une fraude " peu banale ". © PHOTONEWS

Détournement à la faculté de gestion Solvay, une « fraude peu banale »

Mélanie Geelkens
Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

L’ancien comptable d’une association liée à Solvay, la faculté d’économie et de gestion de l’ULB, est soupçonné d’avoir détourné des fonds pendant une dizaine d’années. Le montant se situerait entre 700 000 et un million d’euros.

 » Ayant quitté la société votre message ne sera pas traité. Merci de bien vouloir le renvoyer à l’adresse…  » La réponse automatique laisse penser à un nouveau job. Un départ à la pension, peut-être. Moins un départ dans le soupçon. Car L. L. a démissionné avant d’être remercié, au bout de plus de dix années de services. Peut-être bons (en tout cas ingénieux), mais pas forcément loyaux : ce comptable est soupçonné d’avoir détourné plusieurs centaines de milliers d’euros au sein de l’asbl qui l’employait, dont le conseil d’administration est composé de professionnels… des chiffres et de la gestion.

Executive Education – c’est son nom – est une association autonome mais néanmoins soeur de la Solvay Brussels School Economic & Management, la faculté d’économie et de gestion de l’ULB. Cette structure, qui n’est pas subventionnée par des fonds publics, tire ses revenus d’activités externes (MBA, séminaires, formations sur mesure pour les entreprises…). En 2019, elle a réalisé un chiffre d’affaires de 6,5 millions d’euros.

L. L. y officiait de longue date comme comptable indépendant, mais travaillant quasi exclusivement pour l’asbl. Une asbl qui, en 2018, à la suite de l’arrivée du nouveau doyen Philip Vergauwen, avait entamé un processus de modernisation, notamment en remettant à plat les différentes rémunérations. Au même moment, conformément à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi, les comptes avaient été soumis à un auditeur externe.  » Il nous a posé des questions au sujet de la comptabilité, questions que nous n’aurions pas dû nous poser et auxquelles nous ne pouvions pas répondre « , relate Philip Vergauwen, également président du conseil d’administration.

 » Une fraude peu banale  »

Les comptes furent donc soumis à un juricomptable ( forensic accountant), auditeur spécialisé en recherche de fraudes. Qui a trouvé ce qu’il cherchait : depuis une dizaine d’années environ, des montants ont été détournés des fonds propres de l’association. De  » petites  » sommes qui, au fil du temps, sont devenues un montant substantiel. Certains évoquent un million d’euros, d’autres 700 000… Le doyen ne cite aucun chiffre mais confirme l’importance de cette  » fraude peu banale « , dont la détection a nécessité une analyse pointue, et qui se serait traduite par des réductions de valeur éparses.  » Cela n’a rien à voir avec une mauvaise gestion, précise Philip Vergauwen. Ce n’était pas quelque chose de flagrant. Nous ne sommes quand même pas des idiots ! Nous attendons désormais de la justice, qui possède davantage d’outils que nous, qu’elle puisse établir le montant exact du préjudice supposé.  »

Une plainte a été déposée contre X en février dernier. Des auditions ont été réalisées et le dossier confié à la juge d’instruction Ludivine Kerzmann. Ni elle, ni le parquet de Bruxelles n’ont souhaité faire de commentaires. Les comptes 2019 de l’association, qui jusqu’alors avaient toujours été positifs, affichent désormais une perte de 839 766 euros. Les activités de l’asbl ne sont pas compromises. Du moins pas par la fraude.  » L’impact du Covid sur notre offre, conclut un administrateur, est plus préoccupant que ce détournement ! « 

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