Charles Michel © Dino

Déficit budgétaire de 8,2 milliards d’euros en 2019? « Nous vivons simplement au-dessus de nos moyens »

Kamiel Vermeylen Journaliste Knack.be

En 2019, le déficit budgétaire s’élèvera-t-il à cinq milliards d’euros de plus qu’indiqué par le gouvernement? D’après les derniers chiffres du Bureau fédéral du Plan, ce sera bel et bien le cas. « Je suis désillusionné et déçu », admet le professeur en droit fiscal, Michel Maus.

La probabilité est réelle que le déficit budgétaire s’élèvera à cinq milliards de plus en 2019 que prévu par le gouvernement Michel. C’est ce que montrent les chiffres du Bureau fédéral du Plan. Les responsables politiques visaient un déficit budgétaire de 0,7%, mais cela représentera vraisemblablement 1,8% du produit intérieur brut. Cela signifie un trou d’au moins 8,2 milliards en 2019. Knack a demandé à Michel Maus, professeur de droit fiscal à la Vrije Universiteit Brussel, où le bât blesse. « Je ne suis pas seulement déçu, je suis particulièrement inquiet pour l’avenir », dit Maus.

La préparation du budget est une estimation difficile, mais un déficit de 8,2 milliards n’est pas rien. Comment une telle chose peut-elle arriver?

Michel Maus : Ce gouvernement espère trop les effets d’amortissement des mesures prises. En outre, les économies nécessaires pour financer le transfert d’impôts n’ont pas encore été réalisées. On ne fait pas un budget avec de l’espoir.

Vous parlez notamment de l’accord sur l’emploi, dont le gouvernement s’attend à ce qu’il rapporte 500 millions.

En effet. Il est évidemment vrai que la hausse de l’emploi entraîne une diminution des allocations et une augmentation des recettes fiscales. Mais le gouvernement attend l’impossible et ses estimations sont irréalistes.

Un budget équilibré était pourtant le cheval de bataille de ce gouvernement.

C’est pourquoi je suis désillusionné et déçu.

Les effets de récupération ne suffiront pas à combler le total de 8,2 milliards?

C’est vrai. Cependant, le gouvernement bénéficie de conditions fantastiques: taux d’intérêt historiquement bas, taux de chômage historiquement bas et croissance économique mondiale. Si cela ne fonctionne pas maintenant, quand trouverons-nous un équilibre budgétaire? Malheureusement, je ne peux que conclure que nous vivons au-dessus de nos moyens. Nous devrons simplement économiser sur l’État providence. Mais même pour un gouvernement de centre droit, il est extrêmement difficile de mettre en oeuvre des mesures structurelles. Même si le modèle de concertation belge ne facilite pas les choses.

La réduction de l’impôt sur les sociétés devrait accroître les investissements et l’emploi.

Avec la réforme de l’impôt sur les sociétés, le gouvernement s’est voulu rassurant. Cependant, ce dossier n’est pas du tout une réussite. Au niveau international, tout le monde fait de même. Notre taux de 25% nous place toujours au troisième rang mondial. Tôt ou tard, nous allons devoir l’abaisser.

Cela ne signifie-t-il pas un nivellement par le bas ?

Nous sommes donc confrontés à un choix difficile. Soit nous attirons de moins en moins d’investissements étrangers, ce qui signifie que nous perdons des emplois et des revenus. Soit nous réduisons davantage les impôts, de sorte que nous perdons aussi des revenus. Dans ce dernier cas, on suppose que les entreprises utiliseront leurs bénéfices pour investir, ce qui devrait se traduire par davantage d’emplois. Ce dernier élément est bien évidemment spéculatif. Le problème c’est que nous ne pouvons pas faire autrement. La seule option, c’est donc d’économiser.

Le déficit budgétaire est probablement transféré à la prochaine législature. Vous attendez-vous à une amélioration après les élections de 2019?

Il y aura sans doute encore un certain nombre de cadavres qui tomberont du placard. Cela concerne les mesures temporaires ou les mesures qui ont un effet temporaire. Le gouvernement a relevé la déduction l’investissement pour les entreprises en 2018 et 2019. Bien entendu, le but est que les entreprises investissent davantage à cette période et relancent l’économie. Mais que se passera-t-il après? Le prochain gouvernement y sera confronté quoiqu’il arrive.

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