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Décès de Michel Daerden: « La deuxième mort de Papa »

Le décès de Michel Daerden fait la une de toute la presse ce lundi matin. Loué en tant qu’intellectuel et magicien des chiffres, de nombreux éditorialistes reviennent aussi sur son penchant pour la dive bouteille. Michel Daerden l’homme aux deux visages.

Le décès de Michel Daerden fait la une des quotidiens francophones. Les journaux évoquent la personnalité hors norme de celui qui fut ministre pendant dix-sept ans et l’une des figures emblématiques du PS Liégeois. Un constat revient au fil des éditoriaux: l’homme politique s’est perdu dans un jeu médiatique dangereux qui en a fait une bête de scène.

Le Soir

« Victime de l’image qu’il a lui-même créée », résume Le Soir qui insiste sur l’ambivalence du personnage: un homme intelligent maîtrisant les chiffres comme peu de ses semblables, un homme populaire et jovial ne se souciant guère de soigner sa relation difficile avec l’alcool. « Force est de reconnaître que, ces derniers temps, ce n’est pas son action politique qui le plaçait bien en vue dans les médias », souligne le quotidien. Le journal rappelle la disgrâce politique de Michel Daerden au cours des deux dernières années.

L’Avenir

« Populaire et doué, il avait tout pour être l’homme fort du PS Liégeois dans les gouvernements. Ses frasques et ses relations chaotiques avec les autres clans de sa fédération en ont décidé autrement. Exclu d’un gouvernement Di Rupo trop soucieux de son image en Flandre, mis à la porte de sa commune par son protégé, Michel Daerden se battait toujours. Pour lui, pour son parti. Il méritait une meilleure sortie ». « Il était son pire ennemi », lance L’Avenir qui voit dans le défunt un « homme d’excès divers et paradoxaux ». Le quotidien se montre lui aussi sévère sur la dérive médiatique dans laquelle Michel Daerden s’est laissé entraîner. « Incapable de résister aux sollicitations des médias et des plateaux de télé, l’homme politique fera du Michel Daerden à la Gainsbourg et jouera à la ‘papa’. Son plus mauvais répertoire, en somme, qui estompera l’image de l’homme de coeur, le vrai socialiste issu du monde du travail et dont il comprenait si bien les difficultés, les aspirations et les joies ».

La Libre

La Libre préfère chercher l’homme qui se cachait derrière le politicien et le chéri du grand public. « L’animal politique qu’il fut dut composer avec la bête de scène qu’il devint. Et, dimanche soir (…), il fut malaisé, à l’heure d’un premier bilan, de prétendre lequel de ces êtres, responsable ou bouffon, l’emporta sur l’autre ». Là encore, c’est le double visage du Liégeois qui revient. « Simplement un homme », souligne le quotidien qui consacre à Michel Daerden un long portrait intitulé… « l’ivresse du pouvoir ».

La Dernière heure

La Dernière heure n’élude quant à elle pas la responsabilité des médias eux-mêmes quand a commencé la « Daerdenmania ». « Nous, la presse dans sa quasi-totalité, en avons pleinement abusé. Il était le bon client, celui qui garantissait le succès d’un article ou d’une interview (…). Nous avons sans doute failli à notre tâche de critiques et d’observateurs avisés de la politique pour ne montrer finalement que ce qui nous faisait rire ».

SudPresse

« La deuxième mort de Papa », estiment les journaux du groupe SudPresse aux yeux desquels Michel Daerden n’avait pas dit son dernier mot en politique. « Il voulait sa deuxième chance. Il voulait triompher aux élections communes pour donner une leçon à tous ceux qui l’avaient enterré politiquement un peu trop vite ».

« Het Laatste Nieuws »

« Het Laatste Nieuws » se montre extrêmement sévère, n’hésitant pas à comparer Michel Daerden à un croisement entre Serge Gainsbourg et Silvio Berlusconi. « Charmeur avec un parfum, celui de l’alcool. Le socialisme n’a jamais rimé avec misérabilisme pour Michel Daerden. Si d’autres s’en trouvent mieux, pourquoi ne pourrait pas lui aussi s’en trouver mieux? Et il roula donc au volant d’une Porsche cabriolet. A l’essence, Sancerre et Pomerol. Papa est mort. La Wallonie est sonnée ».

« De Morgen »

Peu d’hommes politiques ont été aussi diabolisés en Flandre que Michel Daerden constate « De Morgen ». « Mais quand même, Daerden n’était pas ce dadais classé qu’avait créé sa réputation, surtout flamande. Je le dis sans crainte: Michel était un intellectuel. Même un fétichiste des chiffres ». Son seul problème était, selon l’éditorialiste, son besoin d’être aimé, pour lequel il était prêt à tout. « Populiste avant la lettre mais avec un coeur rouge. Tatoué de la Charte de Quaregnon. Bien que roulant en Porsche, l’ouvriérisme historique comme souffle de l’âme. Daerden avait un problème d’élocution. Et donc tout le monde pensait qu’il était toujours ivre. C’était aussi un timide existentiel: sans un petit verre, il ne se montrait pas (…). Il manquera dans notre démocratie gris souris. Et pas seulement le clown ».

« Gazet van Antwerpen »

« Gazet van Antwerpen » voit dans Michel Daerden l’homme qui voulait être chanteur. Les socialistes wallons perdent un faiseur de voix mais aussi un enfant terrible, relève le quotidien. Selon lui, cet homme intelligent serait resté dans le cercle restreint d’Elio Di Rupo s’il ne s’était perdu dans les frasques et avait résisté à son amour de la bouteille.

Avec Belga

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