Carte blanche

« Bruxelles a besoin du métro. Et vite ! »

Si l’on évacue l’idéologie pure, il n’y a aucune raison de ne pas soutenir le métro bruxellois.

On a beaucoup parlé récemment des atermoiements autour du projet de métro nord. Le parti Ecolo, fraichement arrivé dans le conseil communal de Bruxelles-Ville, freine des quatre fers les travaux de la nouvelle station Constitution (Toots Thielemans), qui doit voir le jour sous l’avenue Stalingrad. En outre, à Schaerbeek, le métro 3 est retardé par des élus locaux pour des inquiétudes autour de l’urbanisme des projets de stations – certes compréhensibles – mais largement exagérées.

Avec une inauguration initialement prévue en 2022, on parle désormais de 2030 pour voir rouler les premiers trains ! Pourtant, si l’on évacue l’idéologie pure, il n’y a aucune raison de ne pas soutenir le métro bruxellois.

1.Pour des raisons écologiques évidentes et imparables.

Le métro, c’est la garantie la plus certaine de la réduction de la pression automobile dans Bruxelles. Une rame de métro transporte 750 personnes. Avec une rame toutes les 2,5 minutes en heure de pointe, comme actuellement sur les lignes 1,2, 5 et 6, cela fait une capacité de environ 18.000 passagers par heure et par sens de circulation. Un autobus – fût-il électrique – qui passe toutes les 15 minutes en pointe et transporte 150 personnes, ne transporte que 600 personnes par heure et par sens. Il y a donc environ 12.000 voitures par heure dans une rame de métro, contre 600 dans un bus.

Les opposants au métro arguent que la mise en souterrain du trafic encouragera en retour le trafic de surface. Cela ne tient pas la route : rien ne suppose en effet que la mise en souterrain s’accompagne de la réouverture générale des voiries aux automobiles. Si un tram se trouvait en surface, l’espace qui y était consacré doit être transformé en pistes cyclables et en espaces verts (parterres centraux).

2. Pour des raisons économiques.

L’abandon de la voiture suppose une alternative efficace et rapide, qui aille partout, de ville à ville, et non pas « en radiale » comme aujourd’hui. Autrement, la voiture reste nécessaire car plus rapide – donc plus efficace dans le rapport temps/coûts pour les déplacements intra-muros. Prenons un exemple qu’un des auteurs de ces lignes connaît bien : pour aller de son domicile, situé dans la première couronne de Bruxelles, à son cabinet d’avocats, situé avenue Louise, il met 35 minutes en métro, 35 minutes en bus, 35 minutes en train+tram, 7 minutes en scooter, 15 minutes en voiture.

Cette partie de l’argument économique a aussi un volet d’ordre davantage psychologique, qui ne doit pas être négligé : l’utilisation de la voiture aux heures de pointe à Bruxelles est principalement le fait de ceux qui bénéficient de « hauts revenus ». Un cadre d’une entreprise, un banquier, un avocat, un fonctionnaire européen – qui a fait le choix de vivre à Bruxelles – ne peut abandonner sa voiture que s’il retrouve un degré d’efficacité et de confort similaire dans le moyen de transport qu’on lui propose. Un bus – malgré tous les dispositifs de circulation qui peuvent être mis en place – est bloqué dans le trafic et ne présente donc pas cet attrait. De surcroit, à l’instar du tram, l’attente dans le froid à l’extérieur décourage les hauts-revenus. Ceci étant dit en tout pragmatisme et sans idéologie aucune ; pour parler schématiquement, un chef d’entreprise peut, comme à Londres ou à Paris, envisager de prendre le métro, mais il ne prendra pas le tram ou le bus. C’est ainsi. A moins que ceux qui s’opposent au métro envisagent de chasser tous les hauts revenus de Bruxelles, laissant ainsi ouverte la question du financement de leurs politiques sociales.

3. Pour des raisons sociales.

Parce que le premier devoir des responsables politiques doit être d’améliorer les conditions de vie de la population – au premier rang de laquelle les moins privilégiés. Celles et ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter une voiture ont le droit de pouvoir se déplacer rapidement d’un endroit à l’autre de la ville. La mobilité est le premier pas d’un reclassement social et d’un désenclavement des quartiers. Pourquoi, dans l’analyse de ceux qui s’opposent au métro, ceux qui ont moins les moyens devraient continuer à prendre des lignes de bus à faible niveau de service ? Il est paradoxal de constater que ceux qui s’opposent au métro sont pourtant ceux qui se « revendiquent » d’un engagement social fort.

Pour les raisons évoquées ci-dessus, le métro bruxellois doit être développé rapidement et efficacement, pour le bien de la ville et de ceux qui y vivent et y travaillent. Cela ne doit bien entendu pas se faire au détriment de l’urbanisme et du patrimoine, mais, contrairement à ce qui est parfois indiqué, ces considérations sont facilement prises en considération dans des projets modernes de construction d’un métro, qui ne requièrent plus d’ouverture de voirie et respectent – fort heureusement – le bâti existant.

Au-delà de cette prise de position de Jump! For Brussels, puisse cet argumentaire modestement servir à ceux qui défendent le développement du métro à Bruxelles.

Par Nicolas Vanderstappen et Quentin Van den Eynde (co-fondateurs) et Harold Habousha (coordinateur mobilité) de Jump! For Brussels

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