Nicolas De Decker

« Bart De Wever n’est pas réserviste par hasard, lui. Il est spectateur par choix »

Nicolas De Decker Journaliste au Vif

Il est descendu sur les studios du plus haut de son impériale splendeur, s’est défait de son casque de bronze à aigrette, s’est glissé dans un training Umbro et du bas où il pensait qu’il se trouvait désormais, il s’est mis à parler comme il croit que le peuple parle, c’est-à-dire comme sur le bord d’un terrain de foot le dimanche. « C’est un gouvernement de réservistes », il a cinglé, Bart De Wever, en direct dimanche 22 mars à la télévision flamande, parce qu’il n’avait toujours pas avalé ce gouvernement Wilmès, dont son parti était le seul, avec les communistes du PTB et l’extrême droite du VB, à n’avoir pas voté la confiance. Il s’est moqué de ses ministres, à Sophie Wilmès, ces amateurs beaucoup moins brillants que ses équipiers à lui.

Il a dit que c’était une guerre que la Belgique menait contre le coronavirus, qu’on n’allait pas à la guerre avec des réservistes, et que c’était une honte que son équipe de titulaires ait été laissée dans la tribune, avec leurs beaux maillots jaune et noir avec un petit lion sur le coeur et plein de sponsors dessus, leurs crampons très pointus en aluminium très pur et avec de petits éperons d’or à l’arrière, pas très pratiques pour les talonnades mais vraiment très jolis.

Il a crié que ce n’était pas juste de laisser de côté un effectif pareil, que c’était comme si on avait arrêté l’Union à son 59e match, comme si on avait laissé le Standard s’acheter Waterschei. Comme si Joseph Barbéran était revenu empêcher Anderlecht de démolir le Real de Madrid. Ce qu’on lui faisait, à l’entraîneur anversois des galactiques flamands, c’était pire que ce qu’avait fait David Platt à Guy Thijs avec sa sale reprise de la putain de cent-vingtième minute.

Mais ce disant, chouinant, geignant et grondant, il avait oublié, ce dimanche où il parlait comme il croit que le peuple parle, Bart De Wever, qu’ils n’étaient pas réservistes par hasard, ses camarades et lui.

Il avait oublié de dire que c’était déjà lui qui avait choisi de rester sur le banc en 2014 parce qu’il ne voulait pas se salir, et qu’il avait fait monter ses vedettes pour jouer avec un grand capitaine chauve à lunettes, habillé en bleu et avec des lacets un peu défaits.

Et il avait bien veillé à ne pas rappeler que c’était lui qui avait fait sortir ses vedettes du terrain fin 2018, laissant le capitaine chauve défait comme ses lacets.

Il n’a pas dit non plus qu’il n’avait finalement pas voulu mettre ce maillot de ministre-président flamand qu’il avait pourtant promis qu’il mettrait, alors que c’était pour ça que ses supporters avaient voté pour lui.

Et il n’a pas expliqué surtout que c’était lui qui avait exclu, seul parmi dix présidents de partis, d’encourager Sophie Wilmès et son équipe de réservistes, titulaires par hasard.

Pourquoi ? Parce qu’il n’est pas réserviste par hasard, lui. Il est spectateur par choix. Parce que quand il est à un match et qu’il regarde la Belgique jouer, il traite l’arbitre de baudet, il crache sur le gardien adverse, il lance des bananes au centre-avant d’en face, il tend son doigt aux supporters de l’autre équipe. Il est spectateur par choix et hooligan par goût le dimanche. Et le lundi soir il remet son petit gilet et sa fine cravate jaune, il s’invite chez Benjamin Deceuninck à La Tribune, et il pleurniche parce que personne n’a voulu jouer avec lui.

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