« Avec notre inflation nettement plus élevée que le reste de l’Europe, nos efforts risquent d’avoir été inutiles »

Le coût de la vie en Belgique augmente plus rapidement que dans le reste de l’Europe. Si on ne résout pas ce problème, il risque de miner notre compétitivité à peine retrouvée et d’entraver la création d’emplois, craint notre confrère de Knack, Ewald Pironet.

L’inflation dans notre pays avoisine les 2%, ce qui signifie qu’en un an de temps le coût de la vie a augmenté de 2%. L’inflation moyenne en Europe est de 0,4%. Personne n’en parle, mais cette différence énorme constitue bel et bien un problème pour l’avenir de notre économie. En outre, l’écart d’inflation augmente sans discontinuer depuis 2014.

Il est étonnant que l’inflation dans notre pays augmente plus vite qu’en Europe dans tous les domaines. Le pétrole, le gaz, le charbon et l’électricité ont augmenté de 0,4% par rapport à il y a un an, alors qu’ils ont baissé de 3% dans le reste de l’Europe. En Belgique, le prix des légumes, des fruits, de la viande et du poisson a grimpé de 2%, alors qu’en Europe la moyenne est de seulement d’1%. Les aliments transformés tels que le pain, le beurre, le chocolat, etc. ont enregistré une hausse d’3,2%, mais d’à peine 0,3% dans les autres pays européens. Et les services coûtent 2,3% de plus, ailleurs en Europe seulement 1,2%. Pour le dire avec les mots de Shakespeare : « There is something rotten in the state of Belgium. »

Comment se fait-il que chez nous le coût de la vie augmente si rapidement comparé au reste de l’Europe ?

Comment se fait-il que chez nous le coût de la vie augmente si rapidement comparé au reste de l’Europe ? La Banque Nationale et l’Observatoire des prix, qui suit scrupuleusement tous les prix dans notre pays, avancent une explication. Le prix de l’électricité par exemple a fait un bond après la majoration de la TVA de 6 à 21% et les tarifs de distribution ont également augmenté. La hausse du prix de l’électricité se ressent dans le prix de tous les produits, car tout le monde consomme de l’électricité. D’autres produits, tels que l’alcool et le tabac, sont devenus plus chers suite à une hausse des accises et de la TVA, mais selon l’Observatoire des prix, les accises et la TVA plus élevées n’expliquent que la moitié de la hausse de l’inflation.

Il doit y avoir autre chose. Il est étonnant que les prix de nos services augmentent aussi rapidement : 2,3% en Belgique contre seulement 1,2% en moyenne en Europe. Les prix des loisirs, de la culture, du téléphone, etc. ont beaucoup plus flambé qu’ailleurs. Les raisons exactes méritent plus une étude plus approfondie.

De toute manière, l’inflation galopante nous place devant un changement important: les coûts salariaux globaux pour les entreprises ont baissé pour la période 2014-2016, mais à partir de l’année prochaine, ils augmenteront encore. D’après le Bureau du Plan, l’indice pivot sera dépassé en décembre 2017, et c’est plus tôt que ce qu’on pensait encore il y a quelque temps. Du coup, les indemnités sociales augmenteront de 2% en janvier 2018, tout comme les salaires du personnel de l’état en février 2018. Cela signifie que l’état devra dépenser plus.

L’année prochaine, le secteur privé renégociera les augmentations de salaire. La Banque Nationale estime que les coûts salariaux unitaires augmenteront de 1,4% l’année prochaine ; en 2018, cette hausse sera de 1,9%. Les coûts salariaux pour les entreprises augmenteront donc, alors que ce sera beaucoup moins le cas dans le reste de l’Europe. Non seulement les salaires n’y sont pas associés à l’index, mais l’inflation y est beaucoup plus faible.

Ces dernières années, d’importants efforts ont été fournis pour améliorer la compétitivité de l’économie belge. On a mené une politique de modération salariale, on a baissé les coûts salariaux grâce au tax shift, et nous avons encaissé un saut d’index unique. Si l’écart d’inflation entre la Belgique et le reste de l’Europe ne se réduit pas, notre compétitivité sera durement touchée et la création d’emplois sera freinée.

Le gouvernement Michel doit relever le défi important d’atténuer les conséquences de notre inflation élevée, et si c’est possible, de mieux maîtriser l’inflation. C’est impossible sans collaboration des partenaires sociaux. Les mois prochains, les représentants d’employeurs et d’employés porteront une lourde responsabilité, mais ces derniers temps ils n’ont pas prêté beaucoup attention à l’intérêt général. Ils ne pensent qu’à leurs électeurs, ce qui n’est pas très porteur d’espoir.

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