Carte blanche

A propos de l’état de santé mentale des étudiants en Bachelor médecine

Nous avons lu avec un certain étonnement la carte blanche de M. Bronselaer concernant l’état de santé mentale des étudiants en Bachelor médecine.

Réponse à la carte blanche de M. Bronselaer

Loin de nous l’idée de nier une réalité de terrain. Nous sommes, bien entendu, conscients que les étudiants en médecine et en particulier ceux du Bloc 1 sont soumis à un stress psychologique important. Celui-ci a de nombreuses origines dont, en particulier, le passage d’un système secondaire à un système universitaire, demandant davantage d’autonomie et de rigueur. Ceci n’est d’ailleurs pas spécifique aux études de médecine et mérite l’attention de tous les responsables académiques.

Pour y pallier, les facultés de médecine ont mis en place de nombreuses séances de guidance, des séminaires de remédiation et des formations pédagogiques spécifiques pour les enseignants. De plus, plusieurs facultés ont engagé un coach pédagogique, aidant les étudiants tout au long de l’année dans divers axes, méthodologique, scientifique, psychologique et administratif. Certes, ces mesures sont insuffisantes et les doyens se doivent de travailler sur des éléments structurels en conscientisant tous les acteurs pédagogiques des facultés de médecine.

Les facultés organisent également depuis de nombreuses années des cours préparatoires tout au long de la rhétorique et pendant les vacances scolaires pour aider les élèves à se préparer au mieux aux études universitaires. Les élèves peuvent ainsi mieux appréhender le test d’orientation organisé à l’entrée des études universitaires, dont le seul but est de permettre au futur étudiant de mieux cerner ses éventuelles lacunes.

Le stress supplémentaire engendré par l’organisation du concours est une réalité. Les doyens en sont bien conscients et ne le minimisent aucunement. Il faut rappeler tout d’abord que ce concours a été imposé par la Communauté Wallonie Bruxelles pour répondre à une exigence de la ministre de la Santé dans le cadre de la politique de planification. Rappelons, par ailleurs, que la sélection relativement sévère en 1ere année de médecine n’est pas nouvelle et que de tout temps la réussite s’est située aux alentours de 25à 30 %.

Les doyens ont insisté pour que ce concours porte sur les matières du 2e quadrimestre, comprenant des branches médicales de base et des cours de sciences humaines, et qu’il privilégie les questions de réflexion et de transversalité, compétences importantes pour la suite du cursus. Il faut rappeler par ailleurs que quelle que soit la difficulté de cette épreuve, le nombre d’étudiants recevant une attestation sera toujours le même. Plusieurs mesures d’accompagnement sont prévues allant du coach méthodologique, au parrainage de chaque étudiant en passant par une aide psychologique par les services compétents des universités, quand celle-ci est jugée nécessaire par l’étudiant.

Le concours portera sur les mêmes matières étudiées quelques jours auparavant pour les examens. Les doyens ont décidé qu’il se fera sur maximum 3 périodes de 2 heures espacées par des pauses suffisantes et que, pour laisser un temps de révision suffisant, le concours de sélection sera organisé une semaine minimum après la date du dernier examen de la session de juin.

Précisons que toutes les aides proposées par les facultés sont bien entendu gratuites, à l’inverse des consultations privées prônées par M. Bronselaer dans sa carte blanche. Et c’est bien là que se situe le problème essentiel de cette carte blanche qui tente de faire croire que quelques séances de guidances privées, réservées par ailleurs aux familles les plus aisées, vont résoudre, en un coup de baguette magique, les problèmes des étudiants du 1er bloc. On nous présente ainsi la prétendue « seule » solution « politique » à cette problématique réelle : Payer pour que nos enfants soient heureux ! C’est un discours mercantile sur la relation d’apprentissage qui nous parait particulièrement dangereux.

Certes, les facultés ont encore du pain sur la planche pour humaniser davantage les études de médecine et diminuer le stress psychologique des étudiants, dans un contexte de sélection qui leur est imposé, mais les « solutions miracles », présentées comme « le moins mauvais investissement », sont pour le moins douteuses.

Les 5 Doyens des facultés francophones de médecine

Réponse à l’article des cinq doyens des facultés de médecine

Messieurs les Doyens des facultés de médecine francophones,

Ce qui a motivé cette opinion est une réaction de coeur qui fait suite aux consultations de plus en plus nombreuses de jeunes gens de 18, 19, 20 ans victimes de surmenage grave, que l’on peut associer au burnout (surmenage grave professionnel). Nulle part dans cet article je ne parle de baguette magique, ou de solution miracle, au contraire, et encore moins de guidance privée !

J’essaie, ainsi que de nombreux confrères et consoeurs, de valoriser la prévention par une orientation scolaire rigoureuse qui passe par l’examen psychologique du développement cognitif, instrumental notamment. Il s’agit ici de psychologues, de psychopédagogues universitaires, de logopèdes, tous professionnels.

Notre pratique de thérapeute montre que la majorité des étudiants en échec à l’université n’avaient pas les ressources cognitives, ou instrumentales ou pédagogiques pour commencer une 1ère bach. médecine, ou autre, à ce moment-là de leur vie. Ils ne le savaient pas, ils n’avaient pas de plan B. Il importe en conséquence d’en informer les familles et leurs enfants, la prévention fait partie de notre travail également.

Une année ratée entraîne des milliers d’euros de perte pour ces familles, malheureusement pour les plus pauvres aussi, pour les deniers publics et surtout pour l’étudiant qui « rate » et ils sont des milliers notamment en bach. médecine, chaque année. Et vous écrivez « Payer pour que nos enfants soient heureux ! C’est un discours mercantile ». Vous projetez là une réflexion personnelle qui n’a rien à voir avec ce que j’ai écrit et encore moins avec la réalité. Ces étudiants en détresse deviennent des patients qui arrivent de plus en plus nombreux à la consultation des psychologues, psychopédagogues et psychiatres.

Soyez convaincus de mon profond respect pour votre personne et votre fonction. Dans mon métier, je pense surtout à répondre à cette question « Qu’est-ce qui est le mieux pour l’étudiant qui nous consulte et sa famille, et pour l’étudiant en général? » Je suis désolé que vous vous soyez sentis choqués, mais soyez certains que le choc émotionnel que j’éprouve, que nous éprouvons à l’écoute de chacun de ces jeunes n’a rien à voir avec l’argent, mais bien avec le désarroi qu’ils ressentent.

Travaillons ensemble pour développer une orientation scolaire plus efficace avant qu’ils n’arrivent sur les bancs de l’enseignement supérieur. D’une pierre deux coups, moins de mauvais choix, plus d’étudiants heureux.

Recevez ici l’opinion d’un psychothérapeute qui travaille depuis 40 ans pour les élèves, leur famille, pour l’amélioration de leur bonheur notamment d’apprendre, de se sentir compris et respectés !

Didier Bronselaer

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