L'ambassadeur belge Jean van den Bosch présente ses lettres de créance au président congolais Joseph Kasa-Vubu. © BELGAIMAGE

2 juillet 1960: Le cauchemar du premier ambassadeur belge au Congo

« Je suis heureux et fier d’être le premier représentant de la Belgique auprès de la République du Congo. » Scruté par toute la presse de son pays, le diplomate affiche confiance et détermination. Dans le Congo fraîchement indépendant, c’est lui qui s’apprête à représenter l’ancienne puissance coloniale. Le poste lui fait honneur. En apparence, Jean van den Bosch a tout pour être heureux. Mais dans la coulisse, c’est un tout autre feuilleton qui vient de se jouer. Car si le poste est prestigieux, il est surtout périlleux. Van den Bosch le sait, lui qui a tout fait… pour ne pas l’obtenir.

 » Il est intelligent, dynamique et efficace « . Le 8 juin, le ministre des Affaires étrangères Pierre Wigny se décide enfin. A trois semaines de l’indépendance du Congo, il n’a toujours pas désigné le diplomate qui y représentera la Belgique. Mais il n’hésite plus. Convaincu par les nombreuses qualités du secrétaire général du ministère, c’est sur van den Bosch que Wigny jette son dévolu.

Problème : lorsque le ministre lui annonce son intention, le diplomate hésite. Conscient de la précipitation dans laquelle l’indépendance a été accordée, van den Bosch redoute la délicatesse de la tâche. Wigny insiste :  » Ce n’est pas un risque professionnel mais une chance professionnelle.  » Le diplomate ne décline pas formellement. Mais il demande un délai de réflexion.

De retour chez lui, le haut fonctionnaire ressasse le problème dans tous les sens. Il en parle avec sa femme, en discute avec Paul-Henri Spaak, son ancien ministre. Rien n’y fait : van den Bosch ne le  » sent  » pas. Il craint que le nouvel Etat implose ; il redoute que les forces militaires belges soient chassées ; il s’inquiète des divisions qui pourraient naître au sein du gouvernement belge. Des éléments plus personnels entrent aussi en considération. Depuis de précédents séjours en Orient, son épouse et lui-même souffrent de troubles intestinaux. Filer sous les tropiques ne les tente pas du tout…

Durant plusieurs jours, les échanges sont tendus entre le ministre et le diplomate. Qui multiplie les exigences : il ne partira que s’il peut choisir huit collaborateurs, reçoit une lettre d’instructions très claires et bénéficie d’une situation matérielle à la hauteur.  » Qu’il est difficile de convaincre les hommes « , peste Wigny. Jamais, pourtant, le ministre ne remet son choix en question. Le 17 juin, enfin, les deux hommes s’accordent. Et le 2 juillet, van den Bosch atterrit à Léopoldville.

Le cauchemar commence trois jours plus tard. Sans crier gare, les militaires congolais se révoltent et pourchassent les Européens. Malgré que leur Etat soit indépendant, ils demeurent sous commandement blanc. Inacceptable ! A Bruxelles, le gouvernement décide d’envoyer des militaires belges. A New York, l’ONU condamne l’ingérence de l’ancienne puissance coloniale. A Léopoldville, van den Bosch est honni des autorités locales. Le 9 août, il est déclaré persona non grata, et chassé de la capitale. Après trente-six jours, sa mission s’achève. Son cauchemar aussi.

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