André Renard, père de MPW, le Mouvement populaire wallon. © belgaimage

13 décembre 1964 : socialiste ou fédéraliste ? Il faut choisir !

Du suspense ? Il n’y en a pas vraiment. La tension, en revanche, est palpable en ce Palais des congrès de Bruxelles, où René Thône, président de séance, peine à maintenir le calme.

Tous les militants le savent : la décision qu’ils s’apprêtent à prendre va laisser des traces. Mais ils la croient nécessaire. Pour permettre au parti d’encore fonctionner. D’encore exister. C’est l’heure du vote : 417 pour ; 143 contre ; et 436 abstentions, dont la totalité des Flamands. C’est officiel, dorénavant, on ne pourra plus être membre du Parti socialiste belge (PSB) et figurer parmi les dirigeants du Mouvement populaire wallon (MPW). Un tournant.

Le MPW, c’est le bébé du syndicaliste liégeois André Renard. Né au printemps 1961, sur les cendres de la  » grande grève « , il porte deux revendications : le fédéralisme et des réformes de structure. Les socialistes – et non des moindres – sont nombreux à suivre le mouvement. C’est le cas des Dehousse, Harmegnies et autres Terwagne. En même temps, au sommet du parti, c’est plutôt la méfiance qui règne.  » Cela ne fait que commencer avec Renard « , lâche Antoon Spinoy en bureau, le 20 mars 1961.  » Il est insidieux. Il faut, avec lui, que l’on sache bien ce que l’on veut « , abonde le président Léo Collard.

Objectivement, militants du MPW et leaders du PSB sont des alliés. Les premiers ont besoin des seconds pour réaliser leurs réformes ; les seconds ont besoin des premiers pour renforcer leur électorat. En même temps, l’idéologie des fédéralistes cadre mal avec le pragmatisme des socialistes. Et leur caractère wallingant peine à trouver place dans la ligne d’un parti encore national. En mars 1963, lors d’un vote à la Chambre, douze députés socialistes s’éloignent des directives du parti, avec la bénédiction du MPW. La sanction ne tarde pas : Glinne, Hurez et Terwagne sont exclus du groupe parlementaire pour deux mois. Le vent tourne…

Début 1964, dans la perspective des proches élections communales, le MPW propose aux candidats  » une formule d’engagement envers ses principaux objectifs « . Pas du goût du PSB, dont le bureau rappelle  » à tous ceux qui seront candidats sur les listes socialistes qu’ils ne peuvent prendre d’engagements envers des organismes extérieurs au Parti « . Les résultats du scrutin ne sont pas excellents. Au PSB, l’orage gronde. La propagande est lancée.  » Tout le monde sait qu’après les dégâts causés manifestement au Parti dans plusieurs régions du pays par les semeurs de querelles et de discorde, la patience est à bout « , publie le leader flamand Jos Van Eynde dans un journal socialiste. Pendant ce temps, la fédération de Liège regrette que  » la tendance de gauche ne (puisse) s’exprimer dans la presse officielle du Parti « . Les 13 et 14 décembre 1964, en congrès, l’incompatibilité est votée. Victoire pour le PSB ? Sans doute celui-ci maintint-il ainsi son unité. Mais aux législatives de 1965, il réalisa son plus mauvais score en Wallonie depuis 1919. Et sur le long terme, il se priva aussi d’une nécessaire réflexion sur l’avenir du pays.

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