Aristocratie britannique

Dans la hiérarchie des marques anglaises de prestige, Rolls-Royce occupe le premier rang, suivie à courte distance par Bentley. De 1931 à 1998, les deux marques faisaient cause commune et, même si elles s’adressaient à un public différent, leurs modèles affichaient de grandes similitudes. Depuis qu’elles sont respectivement devenues propriété de BMW et du groupe Volkswagen, elles se distinguent bien davantage sur le plan technologique et stylistique. Mais elles ont conservé, par contre, leur prix exorbitant.

La Première Guerre mondiale touchait à son terme lorsque les frères Bentley décidèrent d’arrêter la commercialisation des voitures de la marque française Doriot, Flandrin & Parant, leurs qualités ne répondant pas aux exigences élevées de leurs clients fortunés. Walter Owen Bentley songea dès lors à créer sa propre marque automobile. Ce qui fut fait le 18 janvier 1919. Neuf mois plus tard seulement, il présenta un premier projet mais il fallut attendre septembre 1921 pour que la première Bentley sorte de chaîne. Un modèle qui se distinguait par son moteur à essence doté de quatre soupapes par cylindre. Cette technologie lui ouvrit les portes de la compétition, Bentley remportant à quatre reprises consécutivement, de 1927 à 1931, les 24 Heures du Mans.

Rouler en Bentley est avant tout une question de u0022 way of life u0022. Une Bentley doit briller avant tout par son luxe et son prestige.

La victoire au Mans de 1931 fut le dernier grand fait d’arme de Bentley sous le règne de son fondateur. Suite au krach boursier de 1929 aux États-Unis, la marque britannique se retrouva en difficulté. Et en 1931, W.O. Bentley revendit son entreprise pour 125.000 livres au British Central Equitable Trust. Par la suite, il apparut que ce trust était simplement un  » homme de paille  » agissant pour le compte de Rolls-Royce Limited qui produisait des avions et des voitures. Le nouveau propriétaire donna pour instruction de faire de Bentley le pendant sportif de Rolls-Royce. Jusqu’en 2004, les modèles de Rolls-Royce et de Bentley se distinguèrent à peine, alors qu’ils ne s’adressaient pas aux mêmes publics. Seuls les moteurs étaient différents.

L’homme du compromis

En 1973, Rolls-Royce Limited créa une société distincte pour abriter sa division automobile, mais elle resta propriétaire du sigle et du nom. En 1998, lors de la vente de Rolls-Royce Motors, ceux-ci furent à l’origine d’un conflit ouvert entre BMW et Volkswagen. Le Comte Paul Buysse, ancien CEO du géant industriel Vickers, lourdement déficitaire, se rappelle parfaitement ce différend.  » J’avais été appelé pour mettre de l’ordre dans toute cette histoire. Lorsque j’ai eu sous les yeux les chiffres dramatiques des bilans, je ne voyais d’autre solution que la vente de plusieurs filiales, dont Rolls-Royce Motors. Cette entreprise était depuis 1980 la propriété de Vickers mais elle n’avait, à l’exception d’une montagne de dettes, plus grand-chose à offrir que son nom, et Bentley, tout aussi mourante.  »

 » J’ai été informé que des discussions étaient en cours avec BMW, qui avait racheté Rover cinq ans auparavant. Les négociations n’avançaient pas et j’ai donc mis la pression, ce qui a eu pour résultat une offre de 340 millions de livres. Quasiment simultanément, j’ai reçu un appel du patron de Volkswagen, Ferdinand Piëch, qui désirait me rencontrer. Cette discussion entre quatre yeux s’est déroulée un dimanche soir au Savoy, à Londres. Je m’attendais à des négociations très dures mais ce fut tout le contraire: Piëch mit assez rapidement sur la table une proposition de reprise de 430 millions de livres. Je ne sais toujours pas ce qui lui est passé par la tête. Le lendemain, il comprenait que Volkswagen avait simplement repris les dettes de Rolls-Royce Motors. Le sigle et le nom de la marque appartenaient à Rolls-Royce Limited mais avaient déjà été revendus à BMW. Cela a dû être l’un des jours les plus noirs de la carrière de Piëch.  »

S’en suivit une bataille juridique entre BMW et Volkswagen qui se conclut sur un compromis: BMW devenait propriétaire de Rolls-Royce et Volkswagen devait se contenter de Bentley.

LE SUMMUM DE L’ARTISANAT ANGLAIS

C’est tout à l’honneur de Ferdinand Piëch: il allait ensuite mettre les moyens pour sortir Bentley de l’ombre de Rolls-Royce, construisant notamment une toute nouvelle usine à Crewe. Aujourd’hui, celle-ci assure la production de la troisième génération de la Flying Spur First Edition, une beauté aristocratique de 5,3 mètres de long, destinée à faire oublier la disparition de la Mulsanne dans la gamme.

La Bentley Flying Spur repose sur le châssis de la Porsche Panamera, utilisant également des composants et technologies de la marque de voitures de sport qui appartient également au groupe allemand Volkswagen. Le nouveau porte-drapeau de Bentley est propulsé par un W12 de 6 litres gavé par deux turbos (635 ch et 900 Nm) qui donnent des ailes à cette grande limousine de quasiment 2,5 tonnes, capable de passer de 0 à 100 km/h en seulement 3,8 secondes et d’atteindre en pointe la vitesse de 333 km/h. Des performances extraordinaires, voire même effrayantes, qui ne cadrent pas avec la perception que l’on a aujourd’hui d’une Bentley. Celle-ci doit briller avant tout par son luxe et son prestige. Une voiture aristocratique mais moins polarisante qu’une Rolls-Royce. Et qui coûte aussi 100.000 euros de moins.

Mais cela n’empêche pas de dormir ceux qui peuvent s’offrir une Bentley Flying Spur First Edition. Rouler en Bentley est avant tout une question de  » way of life « . Un jour, vous êtes au volant. Le lendemain, vous vous faites conduire par votre chauffeur. Le siège arrière droit est la place de prédilection des célébrités, dignitaires ou millionnaires. Dans la Flying Spur, ils peuvent profiter d’un intérieur particulièrement luxueux, entourés de matériaux d’une qualité sublime et d’une finition parfaite. Le summum de l’artisanat anglais.

PRIX DE DÉPART: 180.400 EUROS

Conduire soi-même une Bentley Flying Spur n’a rien d’une punition. La puissance est généreuse, la transmission et la direction intégrales sont associées aux dispositifs d’assistance les plus modernes, la motricité se révèle parfaite, le comportement particulièrement sûr et, étonnamment, l’agilité omniprésente avec un diamètre de braquage de seulement 11,05 mètres. De haute technologie, la suspension pneumatique à trois chambres garantit un confort supérieur mais pas sur nos mauvaises routes belges. Là, une Rolls-Royce fait mieux. Deuxième bémol: les épais montants A créent un important angle mort, ce qui empêche parfois de voir les autres usagers de la route. Par contre, le tableau de bord entièrement configurable est un régal, notamment grâce au Rotating Display qui tourne horizontalement autour de son axe et permet de contrôler toutes les fonctions du véhicule ainsi que le système de navigation et l’infodivertissement. Intégrant différentes fonctions de massage, les sièges sont également irrésistibles. Ils peuvent l’être sur une voiture dont le prix démarre à 180.400 euros. Pour la First Edition, comptez 50.000 euros supplémentaires.

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