Un virus qui peut, d’une façon ou d’une autre, voler des gènes d’animaux intrigue les scientifiques. Par quel miracle ce virus est par exemple capable de mordre comme une veuve noire ?
Un couple de chercheurs américains, Seth et Sarah Bordenstein, de l’université Vanderbilt, a fait une surprenante découverte lors de ses recherches sur le virus WO qui infecte une bactérie, la Wolbachia.
Cette dernière est présente dans près de la moitié des insectes et araignées. Elle a un comportement des plus mystérieux parce que parfois elle tue son hôte, lui fait changer de sexe ou au contraire lui est bénéfique. C’est un peu à la carte et sans réelle logique. Mais le virus bactériophage WO est encore plus intriguant puisque ce dernier s’attaque non seulement à la Wolbachia, jusqu’à parfois ne faire qu’un avec cette dernière, mais aussi aux cellules qui l’entourent, soit les cellules de l’insecte ou de l’araignée.
Pour découvrir comme ce virus s’y prend, le couple a déconstruit le génome du virus. A leur surprise, ils ont trouvé à côté des gènes classiques tout un amas de gènes qui montrent des similitudes avec les gènes d’araignées ou d’insectes comme ils le stipulent dans le magazine Nature Communications.
Par exemple, ils ont retrouvé une partie du gène pour l’alfa-latrotoxine, la substance chimique du poison de la veuve noire. Les chercheurs pensent que le virus a tout simplement volé ce gène lorsqu’il était dans une veuve noire ou via la Wolbachia. La latrotoxine est utile car elle permet la perforation des membranes des cellules de la proie, explique Sciences et Avenir. Cette substance permettrait donc aussi de se frayer un chemin à travers les cellules.
La découverte est surtout spectaculaire parce qu’elle montre que, contrairement à ce qu’on pensait, le virus bactériophage peut avoir de l’ADN d’animaux. Pire encore, que ce virus est capable de récolter diverses parties d’ADN différents et de les fusionner en un supergène. Un supergène qui lui permettrait de s’adapter et de survivre dans le corps de l’insecte. « C’est le premier virus connu qui soit en mesure d’infiltrer plusieurs types d’organismes vivants », a confié Elizabeth McGraw, chercheuse à l’Université de Monash, Australie, à The Atlantic.
Tout aussi surprenant est le fait qu’on ne sait pas vraiment qui manipule qui. La Wolbachia arrive à facilement manipuler la vie sexuelle de ses hôtes. Les scientifiques ont identifié plusieurs gènes potentiels qui seraient susceptibles de l’aider à cela. Les Bordenstein ont constaté que certains de ces gènes ne font pas partie du génome du Wolbachia, ceux-ci appartiennent au virus WO. Du coup il n’est pas impossible que la Wolbachia soit en réalité une bactérie qui manipule les animaux qu’elle occupe en utilisant des gènes d’animaux qu’elle a trouvés dans un virus dit De Morgen.