La spiruline : une algue surdouée. © SDP

La spiruline, l’algue-robot qui nage dans votre corps

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

De la spiruline, un aimant, le travail de chercheurs de l’université de Hong Kong, et voilà un micro-biorobot capable de « nager » dans le corps d’un être vivant, pour y distribuer, très localement, des médicaments anticancéreux. Et ce, sans carburant ou batterie, mais grâce au seul champ magnétique d’un aimant.

Pour un peu, on se croirait dans le remake du Voyage fantastique, ce fameux film de science-fiction sorti en 1966 : en pleine guerre froide, des scientifiques américains miniaturisent un sous-marin qu’ils envoient dans le corps d’un agent secret américain, pour le soigner de l’intérieur.

De fait, on n’est pas si loin de la fiction. L’ingénieure chinoise So Li Zhang, de l’université de Hong Kong à Sha Tin, a mis au point ce qu’elle appelle un  » biohybride  » : un microrobot constitué des cellules vivantes d’une algue (la spiruline) et doté de particules magnétiques qui permettent de diriger l’engin dans un corps, grâce à un simple aimant. Une technique qui s’inscrit résolument dans le courant du  » biomimétisme  » ou  » bioinspiration « , un mouvement qui, en ingénierie, s’inspire des techniques de la nature. L’idée ? Résoudre un problème humain grâce à des modèles biologiques traduits en concepts techniques.

Pour l’heure, les tests n’ont été réalisés qu’en laboratoire, sur des rats. Mais ils ont d’ores et déjà permis de télépiloter avec succès le  » biohybride  » jusque dans l’estomac des cobayes. Et… surprise ! Après exposition de 48 h à la spiruline, 90 % des cellules cancéreuses avaient été détruites. A terme, l’idée est bien sûr de rendre cette technique praticable sur des humains, afin de ne plus avoir recours à des méthodes invasives pour atteindre des tumeurs situées dans des zones difficiles d’accès. En ciblant mieux, on pourrait aussi épargner les régions voisines saines.

La spiruline, une microalgue bleue pluricellulaire (qui colore l’eau dans laquelle elle vit en vert) est apparue sur Terre il y a quelque 3,5 milliards d’années. Une vieille branche, donc, dans la famille du vivant. Question capacité de survie, elle a beaucoup à nous apprendre. A peine visible à l’oeil nu, elle ne mesure pas plus de 0,2 à 0,3 mm de long et est surtout connue pour ses propriétés nutritionnelles inouïes : elle est composée d’environ 60 % de protéines, soit trois fois plus que la viande.

Mais aujourd’hui, c’est sa morphologie qui intéresse spécialement les ingénieurs en robotique : la spiruline (nom scientifique : Arthrospira Platensis) ressemble en effet à un tortillon, une spirale qui se déplace selon un mouvement hélicoïdal d’avant en arrière, comme une vis. Idéal pour ce que les scientifiques attendent d’elle. Aujourd’hui, une demi-douzaine d’équipes dans le monde planchent sur cette technologie. On estime qu’il faudra encore une dizaine d’années avant que ce robot-algue puisse nager dans le corps humain et y jouer les médecins.

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