SCIENCES

Encore peu répandues dans nos universités, des  » méthodes alternatives  » à l’utilisation d’animaux vivants existent pour l’enseignement des sciences de la vie. Une solution idéale?

Préférer la souris de son ordinateur au rat de laboratoire, déposer son scalpel pour s’installer devant l’écran et y découper, d’un simple « clic », l’animal virtuel. Pour l’étudiant des sciences de la vie, le multimédia n’est qu’un moyen parmi d’autres dans la panoplie des alternatives à la vivisection. En Belgique et dans une trentaine de pays, la promotion de ces méthodes est aujourd’hui le credo de l’organisation InterNICHE ( » Réseau international de personnes et de campagnes pour un enseignement dispensé avec humanité « ).

« Outre le multimédia, il y a bien sûr les vidéos, explique Bruno Lecomte, représentant d’InterNICHE en Belgique. Mais on peut aussi travailler sur des animaux en plastique ou des cultures de tissus ou de cellules. » Cette grande variété de procédés prometteurs n’a pourtant pas encore conquis nos universités. En effet, si les alternatives y occupent une place grandissante, les exercices animaliers sont encore légion. Ils portent principalement sur des rats, truites et grenouilles, disséqués en nombre lors des exercices pratiques des cours d’anatomie et de biologie générale, passages obligés lors des premières années en études scientifiques (médecines vétérinaire et humaine, biologie, agronomie, etc.). A ces occasions, on « puise » parmi les animaux de laboratoire, élevés pour l’expérimentation et dont environ 1 % (en 1999, 7 124 animaux) est consacré à l’enseignement et à la formation. Les futurs vétérinaires, eux, ne s’arrêteront pas en si bon chemin : entre les petites escapades en salle d’autopsie et les manipulations d’animaux récupérés chez des particuliers ou des vétérinaires, le travail avec l’animal se prolongera tout au long de leur formation.

Difficile, donc, d’évaluer l’ampleur du recours à l’animal dans notre enseignement, mais on est loin du massacre généralisé. Les expérimentations sur animaux vivants sont désormais officiellement cantonnées à la recherche scientifique (à l’exception de certaines formations très avancées ou postuniversitaires) et des comités d’éthique garantissent une utilisation humaine des animaux.

Pourtant, dans certains cas, les choses sont moins claires. « En deuxième candi, on a endormi des rats avec de l’éther, puis on les a ouverts, notamment pour travailler sur leur estomac, raconte un étudiant en médecine de l’ULg. A mon avis, l’animal se réveillait le ventre ouvert… On a dû aussi « spinaliser » une grenouille vivante. » Il s’agit de détruire la moelle épinière de l’animale pour étudier les nerfs périphériques. Une forme de vivisection que l’on croyait révolue de longue date, jusque dans le chef des autorités académiques. Sans doute les méthodes d’enseignement sont-elles variables d’un établissement et d’un professeur à l’autre. Mais le spectre de la vivisection semble, aujourd’hui encore, hanter certaines de nos facultés. Pour éviter ce genre de méthodes, « InterNICHE offre un système de prêt d’alternatives, un service-conseil, des séances d’information et un colloque annuel », explique Bruno Lecomte. Bruxelles accueillait d’ailleurs la première édition d’un colloque en février dernier.

Reste la question essentielle : peut-on remplacer totalement l’animal ? Selon le Dr Hassan Jijakli, assistant à l’ULB, « les alternatives permettent de revoir la matière ou de la préparer, mais la manipulation réelle ne sera jamais remplacée ». Les professeurs semblent en être convaincus : une prise de conscience du phénomène vivant est indispensable. Mais de futurs médecins ou biologistes ont-ils besoin de ce genre d’exercice animalier ? Une alternative ne suffirait-elle pas ? Vaste débat auquel InterNICHE tient à ajouter le principe de l' »objection de conscience », qui devrait permettre à l’étudiant de refuser un exercice sur animal contraire à son éthique. Déjà mis en place dans certains pays précurseurs (l’Italie, les Pays-Bas, les Etats-Unis notamment), le principe n’a pas d’assise légale chez nous. Pourtant, aucun étudiant belge ne s’est plaint auprès d’InterNICHE. Un signe de satisfaction générale ou d’indifférence?

InterNICHE-Belgique SEA. Tél.: 081-26 26 90

François Dumont

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