Dirk De Wachter © De Singel (Mind The Book 2013)

« Il ne faut pas uniquement partager les choses positives avec les jeunes »

Le Vif

Le psychiatre Dirk De Wachter estime que les problèmes auxquels sont confrontés les jeunes aujourd’hui sont causés par la pression de la société. Aussi De Wachter plaide-t-il pour plus d’ouverture et de dialogue. « Il faut se parler davantage : ça soulage. »

Les chiffres de la Fondation Roi Baudouin à propos de la santé mentale des jeunes Belges sont alarmants : un jeune sur cinq souffre de problèmes psychiques. Le psychiatre Dirk De Wachter souhaite attirer l’attention sur ce problème tout en le nuançant.

De Wachter est d’avis que la pression de la société sur les jeunes est extrêmement élevée. « Les attentes créées par la société de consommation sont énormes et irréalistes. Les jeunes semblent plus libres que dans le passé, mais cette liberté leur pose problème. La recherche de l’identité tout en essayant de satisfaire les attentes très élevées, stresse beaucoup de jeunes ».

Pourtant, De Wachter se montre critique à l’égard des chiffres. « Les chiffres servent à tirer la sonnette d’alarme à temps, mais il faut toujours les nuancer. Si les taux de suicide sont élevés, cela ne signifie pas que dans le passé il y en avait beaucoup moins. Le suicide était tabou, et l’Église le considérait comme un péché. Pour cette raison moins de personnes passaient à l’acte, mais cela ne signifie pas qu’il y avait moins de personnes malheureuses ».

Pour De Wachter, il existe un second problème. « Quand aujourd’hui, on se rend chez un psychiatre ou un psychologue, on pose un diagnostic tout de suite. Ce n’est pas la bonne méthode : il faudrait d’abord accompagner les gens sans leur coller immédiatement une étiquette ».

« C’est une bonne chose qu’on aille plus facilement chez un psychologue, mais on devrait également pouvoir s’adresser à notre entourage » explique De Wachter. Selon lui, il faut pouvoir parler de vulnérabilité et de difficultés avec ses amis et les membres de la famille. « Quand on peut s’adresser à des connaissances, il ne sera peut-être plus nécessaire de chercher de l’aide professionnelle » déclare le psychiatre de la KuLeuven.

Manque d’ouverture

De Wachter dénonce également le manque d’ouverture. « Beaucoup de gens partagent tous les moments heureux de leur vie sur les réseaux sociaux, mais n’osent rien dire de leurs problèmes. Nous évoluons vers une culture de likes. Tout semble toujours amusant, alors que ce n’est pas le cas. Il ne faut pas uniquement partager les choses positives. « 

De Wachter trouve qu’il faut aussi aborder les côtés moins positifs de la vie. « Nous devons parler davantage : cela soulage et en outre, cela renforce les liens d’amitié entre les gens ».

Prendre ses responsabilités

Beaucoup de thérapeutes et de psychiatres trouvent que l’état doit contribuer davantage à la santé mentale de la population. De Wachter ne partage pas cet avis. « Je ne trouve pas que c’est au gouvernement à résoudre tous les problèmes. C’est très facile de mettre les problèmes sur le dos de l’état, mais ce n’est pas ainsi que les choses fonctionnent. L’origine du problème se trouve dans la société. Chacun fait partie de cette société et joue donc un rôle dans cette situation ».

« Nous devons prendre nos responsabilités même si évidemment l’état doit créer un contexte favorable » déclare De Wachter.

L’évolution positive

Au demeurant, De Wachter se montre optimiste à propos de l’avenir. Il voit une évolution positive : « Beaucoup de gens s’occupent de la problématique et certaines jeunes me donnent des signaux positifs. Lorsque j’ai publié mon livre intitulé Borderline Times, je ne pensais pas atteindre les jeunes, mais ils constituent une grande partie des lecteurs et je trouve que cela donne de l’espoir ».

C.H.I.P.S. StampMedia/Mandy De Clercq

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