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Il faut se méfier des ronflements

Le Vif

Les personnes qui associent ronflements sonores et somnolence diurne pourraient souffrir d’apnées obstructives du sommeil. Un problème aux conséquences bien réelles pour la santé mais qui peut heureusement se soigner.

Si environ 35 % des adultes belges ronflent, ce phénomène ne trahit heureusement pas toujours, loin s’en faut, l’existence d’un problème médical. Ce ronflement résulte tout simplement du relâchement des muscles du pharynx au cours du sommeil ; le diamètre de la gorge est alors réduit, de telle sorte que l’air inspiré peut faire vibrer des structures mobiles telles que la luette ou le voile du palais, provoquant les bruits bien connus.

« Il arrive toutefois que le diamètre de la gorge soit déjà réduit en état de veille, par exemple en présence d’une quantité excessive de tissu adipeux, d’un décalage excessif du maxillaire vers l’arrière, d’un problème de contrôle ou autre dysfonctionnement des muscles de la gorge… », explique le Pr Bertien Buyse, du centre universitaire des troubles du sommeil et de l’éveil de Louvain (LUCS). « Le passage de l’air est alors tellement réduit la nuit que la personne aura du mal à respirer. Les ronflements extrêmement bruyants peuvent ainsi s’accompagner d’arrêts de la respiration qui peuvent durer plus d’une dizaine de secondes. Ces pauses sont le signe que l’orifice s’est partiellement ou complètement fermé ; durant ces phases, le niveau d’oxygène chute de façon spectaculaire et l’acide carbonique s’accumule, jusqu’au moment où le cerveau ordonne un bref réveil qui permettra de contracter les muscles de la gorge et de rouvrir la gorge. » On parle d’apnées obstructives du sommeil en présence de plus de 5 de ces apnées ou hypopnées par heure ; lorsqu’il s’en produit plus de 15 par heure, un traitement s’impose. On estime que cette situation concerne environ 5 % des adultes belges (dont environ deux fois plus d’hommes que de femmes).

Maladies cardiovasculaires

Les personnes qui souffrent d’apnées du sommeil n’ont souvent pas conscience de ces fréquents réveils nocturnes, quoiqu’elles remarquent généralement qu’elles ont davantage besoin d’uriner. « La lutte pour parvenir à respirer a également un impact sur le coeur, ce qui se traduit par la libération d’une substance naturellement diurétique. C’est ce qui explique la production accrue d’urine », clarifie le Pr Buyse. Ces patients se plaignent aussi souvent de céphalées matinales (« dues à l’accumulation d’acide carbonique pendant la nuit », précise la spécialiste) et ont continuellement tendance à somnoler pendant la journée. « Ce qui les expose davantage au risque d’accidents et les rend souvent aussi plus irritables. »

Les apnées du sommeil ont également des effets néfastes sur la santé à plus long terme. L’état de détresse respiratoire lors des micro-réveils réguliers pendant la nuit stimule la production d’hormones du stress, sans compter que les déficits répétés en oxygène laissent davantage le champ libre à certaines substances nocives présentes dans le sang. « En jargon médical, on parle de stress oxydatif, un phénomène qui accroît le risque de maladies cardiovasculaires potentiellement graves », explique le Pr Buyse. Lorsqu’il suspecte un problème d’apnées, le généraliste référera son patient à un centre spécialisé dans les troubles du sommeil. « Si un premier interrogatoire confirme cette suspicion, nous réaliserons une polysomnographie. Le patient devra alors passer une nuit au laboratoire afin de nous permettre d’enregistrer une série de paramètres au cours du sommeil. »

Embout buccal

Après un diagnostic d’apnées du sommeil, quelle qu’en soit la gravité, il sera toujours intéressant de suivre un certain nombre de conseils. « Perdre les kilos excédentaires suffit parfois déjà à limiter voire à faire disparaître complètement les apnées. Nous déconseillons également les somnifères et les boissons alcoolisées pendant la soirée, car ces substances favorisent la relaxation des muscles du pharynx. »

En présence d’apnées légères à modérées provoquées par la position du maxillaire inférieur, le port d’un embout buccal pendant la nuit peut être une solution efficace. « À condition d’avoir les dents saines, souligne le Pr Buyse. Le dispositif doit être fabriqué sur mesure par un dentiste spécialisé, en collaboration avec la clinique du sommeil. Le patient devra également faire l’objet d’un suivi, car le port de l’embout peut modifier la position de sa mâchoire au fil du temps. Par ailleurs, au réveil, la traction exercée sur les dents pendant la nuit peut donner l’impression que celles-ci sont en train de se détacher. Et le port de l’appareil provoque parfois aussi une salivation surabondante. »

Masque nasal

Le traitement par excellence des apnées du sommeil sévères réside toutefois dans le port, la nuit, d’un masque de pression positive continue (PPC). Il couvre le nez et la bouche et est relié par un fin tuyau à un appareil électrique quasi silencieux placé sur la table de chevet. « Cet appareil accroît légèrement la pression de l’air inspiré, ce qui empêche la gorge de se bloquer. »

Dans quelques cas rares, il existe encore d’autres options thérapeutiques. « Certains patients pourront par exemple retirer un bénéfice d’un petit appareil provoquant des vibrations pour les inciter à dormir sur le côté plutôt que sur le dos, d’autres d’une opération de la gorge ou du maxillaire inférieur. Enfin, des chercheurs développent actuellement une sorte de ‘pacemaker’ à implanter sur la langue pour en stimuler le nerf et maintenir ainsi l’ouverture de la gorge. Le dispositif n’en est encore qu’au stade expérimental mais semble prometteur. »

Par An Swerts

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