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Des moustiques génétiquement modifiés pour lutter contre la dengue

Stagiaire

Le Brésil doit faire face à de nombreuses épidémies de dengue. Elles ont fait 545 morts rien que l’année dernière. La solution pourrait bien venir d’une entreprise anglaise qui a génétiquement modifié un moustique pour rendre sa progéniture stérile. Une usine pourrait en produire 2 millions par semaine.

Afin d’enrayer les nombreuses épidémies de dengue qui frappent le Brésil (plus de 1,4 million de cas confirmés et 545 morts l’an dernier, contre 120.000 cas en 2008, selon les chiffres de l’Organisation panaméricaine de la santé, le bureau régional américain de l’OMS, NDLR), le pays a produit, grâce à l’entreprise britannique Oxitec, un nouveau spécimen de moustique mâle d’Aedes aegypti qui ne peut avoir une descendance viable suite à des modifications génétiques. L’objectif ? Contrôler cette population d’insectes et réduire les risques de contamination infectieuse, mais aussi lutter contre le virus du chikungunya. D’après BFM-TV, l’élevage d’animaux génétiquement modifiés élevés à grande échelle constitue une première mondiale. Il convient de préciser que l »usine pourrait produire jusqu’à 2 millions de moustiques modifiés par semaine.

Moustique porteur d’un cheval de Troie

La méthode d’Oxitec est simple : introduire un nouveau gène dans l’ADN des Aedes aegypti afin de les rendre dépendants à un antibiotique, la tétracycline. Sans ce médicament, les moustiques génétiquement modifiés ne peuvent pas survivre. Le laboratoire où sont élevées les souches de moustiques ne garde ensuite que les mâles, incapables de piquer et donc non-porteur de la dengue. Ces moustiques mâles transgéniques sont ensuite relâchés dans la nature, en quantité deux fois supérieure à celle des moustiques non-transgéniques, précise Le Monde, afin de se reproduire avec des femelles sauvages. Comme leur progéniture, porteuse du transgène, est privée de l’antibiotique, elle n’a que très peu de chance de survie (15%). Résultat : « cette technologie nous permet de tuer la descendance de moustiques », explique une vidéo publiée sur le site d’Oxitec. « C’est une sorte de contrôle des naissances pour les insectes ». Lors de tests à petite échelle dans la ville de Jacobina notamment, « la population d’Aedes aegypti a ainsi été réduite de 92% dans un quartier », d’après l’entreprise.

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Si cette solution semble être de salut sanitaire, le site IFLScience se veut mesuré, avançant des craintes quant à l’organisme qui remplacera le moustique au sein de l’écosystème. Autre risque, pointé par l’agence de surveillance sanitaire brésilienne : l’extinction de l’espèce d’Aedes aegypti pourrait favoriser un moustique concurrent, le moustique-tigre (Aedes Albopictus), lui aussi vecteur des virus de la dengue et du chikungunya.

Des incertitudes pour les ONG anti-OGM

En parallèle, de nombreuses ONG s’inquiètent de l’impact de ces moustiques sur l’environnement, d’autant qu’aucune étude extérieure n’a été menée. Problématique abordée par le blog du journal Le Monde. Mais ces moustiques OGM étant stériles à la base, « il est peu probable que ce transgène diffuse largement dans la population sauvage de moustiques », rassurait Yvon Perrin, entomologiste et spécialiste de l’espèce au Centre national d’expertise sur les vecteurs, interrogé par le journal. Selon Oxitec, seuls 3 % de moustiques transgéniques pourraient survivre. « De plus, contrairement aux insecticides jusqu’alors utilisés, cette méthode est sélective puisqu’elle ne concerne qu’une seule espèce de moustiques, et que l’hybridation avec d’autres espèces de moustiques n’est pas observée dans la nature », poursuit-il.

Aucun traitement spécifique et vaccin n’existe pour le moment pour lutter contre la dengue. Le seul moyen de s’en protéger est la prévention environnementale (élimination des eaux stagnantes) et la pulvérisation de pesticides. Pionnier dans la culture OGM, via des partenariats avec le géant Monsanto par exemple, la Commission technique nationale de biosécurité (CTNBio) – l’équivalent du Haut conseil sur les biotechnologies – a autorisé la dissémination dans l’environnement de ces moustiques en avril dernier, rappelle Le Monde. Par ailleurs, l’usine Moscamed, co-gérée par le ministère de l’agriculure brésilien produit déjà des milliers de moustiques transgéniques. Toutefois, pour que les moustiques d’Oxitec soient en vente, la décision du CTNBio doit maintenant être validée par l’Agence nationale de surveillance sanitaire (Anvisa).

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