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Ces gestes qui nous trahissent

Le Vif

Sébastien Bohler, Docteur en neurobiologie et journaliste à la revue Cerveau et Psycho, décortique les gestes, mimiques et autres caractéristiques physiques susceptibles de dévoiler une partie de notre personnalité. Surprenant.

L’analyse de la personnalité repose, selon les standards, sur l’évaluation de 5 grands traits de caractère : l’extraversion, l’agréabilité, le caractère consciencieux, la stabilité émotionnelle et l’ouverture aux expériences. A priori, il est donc possible en croisant ces 5 dimensions de connaître les principaux traits de caractère d’une personne, et d’en déduire d’autres. En mettant en évidence ces 5 grandes tendances à travers tous nos comportements (hocher la tête, remuer la jambe, se tenir droit…), nos pratiques (comment on se présente sur son profil d’un réseau social…), nos caractéristiques physiques (grandeur des doigts, forme du visage…), ou nos mimiques (cligner des yeux, sourire…).

Le cas des gauchers

Les gauchers sont-ils plus performants au travail ? Plus intelligents ? Plus créatifs ? Pour la première, une étude menée sur 33.000 adultes montre que les gauchers étaient surreprésentés parmi les personnes gagnant le mieux leur vie et sous-représentés chez ceux qui gagnent très peu. L’explication serait à trouver dans le fait que les individus au statut socio-économique élevé proviennent de milieux favorisés, là où les gauchers n’étaient pas brimés (et par ailleurs encouragés à l’autonomie). Il est donc logique d’y retrouver un plus grand nombre de gauchers ! Mais Sébastien Bohler précise que ceux-ci, statistiquement, vivent moins longtemps, comme quoi, on ne peut pas tout avoir !

Cette réussite professionnelle est-elle à lier à une intelligence supérieure ? Pour le savoir, l’auteur a repris une étude menée sur des enfants de 9 ans, où l’on découvre que si les garçons gauchers sont surreprésentés parmi les enfants obtenant les meilleures cotes, l’effet est tout simplement inverse chez les filles… Une différence expliquée par l’éducation, qui encourage, encore aujourd’hui, l’autonomie chez les garçons et la conformité chez les filles…

La dernière question posée est enfin celle de leur créativité. Cela semble être le cas chez les musiciens : une étude a examiné le nombre de gauchers chez des instrumentistes, des compositeurs et des choristes britanniques. Résultat : alors que dans la population générale, le nombre de gauchers tourne autour de 8,5 % d’hommes et 7,3 % de femmes, chez les musiciens, la proportion est respectivement de 12,2 % et 11,8 %… Est-ce parce que le côté gauche du corps est orchestré par le cerveau droit, traditionnellement considéré comme dédié à la créativité ? Est-ce parce que la pratique d’un instrument est généralement adaptée à des droitiers, et que les gauchers doivent de ce fait développer leur adresse des deux côtés ?

Morphopsychologie…

L’un des aspects les plus troublants mis en évidence par Sébastien Bohler est le lien établi entre des caractéristiques physiques et des traits de caractère ou de personnalité… Ce qui confère, il faut bien l’avouer, un côté déterministe gênant… L’un des exemples est l’orientation sexuelle en fonction du visage. Pour attribuer une orientation homosexuelle au visage d’un inconnu, nous nous basons sur l’inversion de son visage : un visage d’homme avec des traits féminins, et un visage de femme aux traits masculins. Mais ce n’est pas tout : il semble aussi que la texture de la peau nous influence. Ainsi, une femme avec des traits assez féminins, mais avec une peau rugueuse sera plus vite cataloguée comme homosexuelle. Idem pour l’homme à la peau lisse et douce… Et dans la réalité ? Eh bien effectivement, les femmes homosexuelles auraient plus souvent des traits masculins et les hommes homosexuels des traits fins. On ne se tromperait pas dans 60 à 70 % des cas. Mais vous remarquerez que la marge d’erreur est grande !

Sébastien Bohler se demande aussi si les porteurs de lunettes sont plus intelligents. Bonne question, car le cliché est tenace ! Une étude menée au Danemark montrerait qu’effectivement, les myopes obtiennent de meilleurs résultats d’intelligence et auraient des diplômes supérieurs. Serait-ce parce qu’ayant dû lire ou étudier beaucoup, ils se sont abîmé les yeux ? Pas sûr… Car d’après des recherches, la myopie est liée à l’intelligence en tant que telle, pas nécessairement au niveau d’étude : l’intelligence serait donc en fin de compte un facteur de risque de la myopie. « Les causes possibles de ce mécanisme ne sont pas identifiées, mais pourraient être d’ordre génétique. La myopie étant très fortement héréditaire, et l’intelligence ayant aussi une importante composante génétique, il se pourrait que certains gènes exercent une influence à la fois sur la croissance du cerveau et celle de l’oeil. Certains auteurs soulignent en outre que, d’un point de vue embryologique, l’£il est un prolongement des tissus neuronaux du cerveau », explique Sébastien Bohler.

Langage des mains

Plus fondamental et aussi très répandu : nos mains nous dévoileraient. Et pas uniquement si elles trahissent nos activités, comme les mains calleuses des travailleurs manuels ! Elles trahiraient aussi certains traits de caractère… « La science livre en ce domaine des résultats inattendus : par exemple, le rapport de la longueur de certains doigts, notamment l’index et l’annulaire, serait déterminé par la concentration de certaines hormones guidant le développement des membres au cours de la croissance, ces mêmes hormones pouvant agir sur le cerveau et sur certaines caractéristiques du comportement, notamment l’agressivité. » Ainsi, il montre qu’un index plus court que l’annulaire chez le garçon est signe d’agressivité, mais pas chez la fille, du fait du rôle non négligeable de la testostérone sur la croissance des doigts… Idem pour les comportements de domination, d’agressivité ou encore de recherche de sensations ! Heureusement, l’auteur précise : « Évidemment la personne en question (celle qui a l’index nettement plus court que l’annulaire, ndlr) peut être très policée car le comportement et le caractère ne sont pas seulement déterminés par les hormones – cet effet est tempéré par l’environnement et l’éducation. » Une précision qui vaut pour bon nombre des constats faits lors des différents tests et études !

Quant à l’auriculaire court (plus bas que la dernière phalange de l’annulaire), il révèlerait chez les femmes un tempérament instable sur le plan émotionnel et chez les hommes… un bon footballeur ! Un annulaire plus long que l’index signerait la jalousie (pour 32 % seulement, les 68 % restants étant déterminés par la confiance en soi, les expériences malheureuses, le rapport aux autres…) mais aussi… un pénis d’une longueur « honorable » au repos (ce qui ne dit rien sur la taille en érection, ni sur les aptitudes de l’homme à être un bon amant !). Libre à nous d’y croire ou non !

Par Carine Maillard

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