La Chute, le film qui divise

Peut-on montrer un Hitler à visage humain ? Et ne raconter que ses douze derniers jours dans son bunker berlinois ? C’est ce que fait La Chute (Der Untergang), film controversé actuellement sur nos écrans

L a Chute (Der Untergang), le film d’Olivier Hirschbiegel qui relate les douze derniers jours de Hitler (joué par Bruno Ganz) dans son bunker, est désormais à l’affiche en Belgique ( lire Le Vif/L’Express du 14 janvier). Sorti à la mi-septembre en Allemagne, il a rempli les salles (près de 5 millions de spectateurs à ce jour) et fait couler beaucoup d’encre, suscitant débats passionnés, sinon controverses et polémiques, en Allemagne bien sûr, mais aussi en France, en Pologne, en Suisse, aux Pays-Bas…

Film à gros budget (14 millions d’euros), La Chute est basé sur le travail de l’historien Joachim Fest ( Les Derniers Jours de Hitler, Perrin, 2002), et sur les Mémoires de Traudl Junge, la secrétaire de Hitler qui a vécu les derniers jours du Führer et de ses acolytes dans le bunker à Berlin. Les historiens, dont le Britannique Ian Kershaw, s’accordent en général à trouver ce film exact du point de vue historique. Mais la question n’est pas là. La Chute montre un Hitler  » à visage humain « , gentil avec sa secrétaire, affectueux avec son chien, parlant normalement, etc. Choquant, pour certains.  » Avons-nous le droit de faire le portrait d’un homme responsable de la mort de 40 millions de personnes ? » demandait le quotidien berlinois Tagesspiel. Le cinéaste allemand Wim Wenders a conspué le film, tout comme Claude Lanzmann, le réalisateur de Shoah, qui qualifie le film de  » pervers et dangereux  » et pour qui  » il ne faut pas s’amuser à comprendre ces gens-là « .

Pour d’autres, en revanche, La Chute est un film d’utilité publique, montrant le totalitarisme dans toute son horreur.  » L’Allemagne peut et doit voir ce film « , titrait le quotidien populaire Bild. Un avis partagé par l’ancien chancelier Helmut Kohl, qui espère que  » ce film sera vu par le plus grand nombre possible de gens « . Quant à Serge Klarsfeld, président de l’Association des fils et filles de déportés de France, il n’y a pour lui aucun motif de polémique.  » C’est un lieu commun de dire que l’homme privé ne ressemble pas à l’homme public. Tel grand démocrate peut avoir été grossier avec sa secrétaire et tel dictateur, courtois avec la sienne. C’est du bla-bla. Si on avait fait un film sur Hitler et son chien, il est évident que les amis des chiens l’auraient trouvé sympathique. Cela dépend de l’endroit où on place la lorgnette « , a-t-il déclaré à l’AFP.

Elisabeth Mertens

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