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« Toutes les entraves à Schengen doivent être aussi minimales que possibles »

La viabilité de l’espace Schengen mobilise l’attention depuis la tentative d’attentat dans un train Thalys reliant Amsterdam à Paris et l’arrestation du suspect monté à la gare de Bruxelles-Midi.

Les Accords de Schengen, consacrant la liberté de circulation entre 26 pays, sont considérés comme un aboutissement de la construction européenne. Les entraves à ce droit fondamental doivent être aussi minimales que possibles, rappelle mardi Yves Pascouau directeur à l’European Policy Centre et chercheur associé à l’Institut Jacques Delors.

L’espace Schengen a été établi il y a trente ans avec la suppression des frontières entre la Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas, l’Allemagne et la France. Depuis lors, l’espace s’est élargi à une vingtaine d’autre Etats autorisant la libre circulation de pas moins de 400 millions de personnes en son sein.

Cet espace repose sur les Accords de Schengen, du nom de la ville luxembourgeoise où ils ont été signés en juin 1985, qui consacrent non seulement la libre circulation, mais aussi l’harmonisation des contrôles aux frontières extérieures et le renforcement de la coopération policière et judiciaire entre les Etats membres de cet espace.

Ceux-ci sont désormais au nombre de 26, parmi lesquels les Etats membres de l’Union européenne, à l’exception du Royaume-Uni, de l’Irlande, de la Roumaine, de la Bulgarie, de la Croatie et Chypre, et quatre Etats associés: l’Islande, la Norvège, la Suisse et le Liechtenstein.

En intégrant l’espace Schengen, ces pays ont donc supprimé les contrôles à leurs frontières nationales, toutefois ceux-ci peuvent être rétablis de manière temporaire en cas de menace prévisible ou immédiate pour l’ordre public ou de graves manquements dans les contrôles aux frontières extérieures. Des contrôles policiers non-systématiques dans les zones frontalières sont en outre admis tant qu’ils ne sont pas équivalents à des contrôles permanents des frontières.

« Le principe de Schengen est la liberté de circulation, donc toutes les entraves doivent être aussi minimales que possibles », souligne M. Pascouau.

Dans « l’émotion » que provoque une situation telle que celle éprouvée après l’attaque avortée dans le TGV international, « la protection de la frontière est le premier réflexe, or dans le monde globalisé dans lequel on vit aujourd’hui, ce n’est pas spécialement le plus efficace. Celui du renforcement de la frontière extérieure de l’UE l’est bien, tout comme de l’amélioration de la coopération qui permettront de mieux agir », préconise l’expert. « L’espace de liberté de circulation ne doit pas être voué aux gémonies parce que le suspect à fait un trajet Amsterdam-Paris », met encore en garde le directeur à l’EPC.

Dispositifs de sécurité

Se pose désormais la question, selon lui, de l’introduction de dispositifs de sécurité pour les trains internationaux, comme des portiques pour scanner les personnes qui embarquent des objets interdits. « Tout tourne autour du soi-disant contrôle d’identité. Quand on est sur un vol intra-européen, il n’y a pas de contrôle d’identité, mais de sécurité: on demande la carte d’embarquement, pas la carte d’identité ou le passeport, puis on passe par un portique de sécurité. Une telle salle d’embarquement existe à Bruxelles-Midi pour l’Eurostar, on pourrait à l’avenir dire à tous les gens qui prennent le Thalys de se munir de leur titre de transport et de passer sous un portique », avance l’expert, qui relève néanmoins le cout et la complexité pour les passagers de telles mesures.

S’il doit y avoir une adaptation des règles de Schengen, comme suggéré par le Premier ministre Charles Michel au lendemain de l’attaque déjouée, « cela passera très certainement par l’amélioration, le renforcement et le développement de la coopération des autorités nationales de justice et de police dans le but de lutter contre la criminalité », estime M. Pascouau.

Il confirme en outre que les règles de Schengen peuvent bien être modifiées, « à condition que cela s’avère nécessaire et que la Commission, qui a l’exclusivité de l’initiative législative, soit convaincue – par les Etats membres – et présente une modification en ce sens ».

Les ministres des Transports et de l’Intérieur des pays traversés par des lignes ferroviaires internationales, dont la Belgique, les Pays-Bas, l’Allemagne et la France, pourraient se réunir dès ce week-end pour discuter de cet aspect, à l’invitation de Paris.

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