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Stanislav Petrov, l’homme qui sauva le monde en ne faisant rien

Muriel Lefevre

Stanislav Petrov est mort en mai à l’âge de 77 ans, vient-on d’apprendre. Cet inconnu de l’histoire a pourtant sauvé le monde grâce à une décision aussi héroïque que simple: il n’a rien fait. Retour sur cet épisode hallucinant de la guerre froide.

Le lieutenant-colonel des forces aériennes soviétiques, Stanislav Petrov est cantonné dans un bunker secret situé non loin de Moscou. Il a pour mission de tenir à l’oeil Oko, le système d’alerte mis au point un an auparavant et qui doit prévenir les attaques nucléaires. Au moindre signal, il doit impérativement prévenir sa hiérarchie militaire. Lui et ses collègues sont drillés pour transmettre l’information coûte que coûte.

Sang-froid et contexte tendu

Le monde l’ignore, mais le 26 septembre 1983, peu après minuit, son sang-froid va éviter au monde une Armageddon nucléaire, une troisième guerre mondiale.

Au coeur de la nuit, les sirènes se mettent à hurler et les lumières rouges clignotent. L’un des satellites aurait détecté pas moins de 5 missiles américains qui auraient été tirés depuis le Montana et qui se dirigent vers la Russie.

En ce début des années 80, la menace nucléaire n’a rien d’un hypothétique épouvantail. D’autant plus que la tension entre les deux puissances a refait ouvertement surface quelques semaines auparavant lorsque la Russie abat un avion sud-coréen qui s’était perdu dans son espace aérien. Un acte qui avait provoqué en retour une démonstration de force militaire de la part de l’OTAN. Malgré ce contexte tendu, l’instinct de Petrov va pourtant lui souffler qu’il ne s’agit là que d’une fausse alerte.

La pression est énorme. Il est seul et a moins de cinq minutes pour trancher. Il n’y a que cinq missiles. Si les Américains étaient vraiment en train de lancer une attaque nucléaire, elle devrait être nettement plus massive se dit-il. En plus, l’information n’est pas confirmée par le radar au sol. Autant d’indices qui le poussent à ne pas respecter le protocole en ne prévenant pas l’état-major. Il signalera simplement à sa hiérarchie par téléphone qu’il s’agit d’une fausse alerte. Bien lui en prit puisqu’un quart d’heure plus tard, l’erreur technique se confirme.

« Après l’incident il est resté dans son unité pendant trois jours. Il est rentré à la maison complètement épuisé, mais ne nous a rien raconté », se souvient son fils, 44 ans.

Par la suite, les spécialistes soviétiques ont établi que la fausse alerte était due à une interprétation erronée de la réflexion des rayons du Soleil sur les nuages, confondue avec le dégagement d’énergie de missiles au décollage.

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Cette décision de ne pas transmettre l’alerte a probablement évité de nombreux morts puisqu’il est à peu près certain que la Russie aurait lancé une riposte nucléaire vers les États-Unis et ses alliés. Le premier échelon d’un embrayage sanglant. Petrov dira simplement : « c’était mon travail, mais ils ont eu de la chance que je sois aux manettes ce soir-là. »

Son acte héroïque ne va pourtant lui apporter ni la reconnaissance ni la gloire. Quelques mois après l’incident, Stanislav a reçu une décoration « Pour mérites rendus à la Patrie au sein des forces armées », sans aucune explication, selon son fils Dmitri.

L’incident fut directement classé « top secret » et ce n’est qu’en 1998 que l’histoire est rendue publique par un des supérieurs de Petrov. En 2013, il va recevoir le prix de Dresden pour sa contribution à la paix mondiale et en 2014, il sera au coeur d’un documentaire réalisé par Peter Anthony intitulé « l’Homme qui a sauvé le monde ». Ce héros très discret est mort le 19 mai 2017 dans un village près de Moscou, où il vivait de sa petite pension militaire.

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