Seifeddine Rezgui. © Belga

Qui est Seifeddine Rezgui, l’auteur de l’attentat en Tunisie ?

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

Seifeddine Rezgui a tué 38 personnes avant d’être abattu par la police. Qui était ce jeune tunisien de 23 ans, en apparence comme les autres ? Quelles étaient ses motivations ?

« Il est entré habillé comme quelqu’un qui allait se baigner. Il avait un parasol pour cacher son arme. Arrivé à la plage, il a utilisé son arme », raconte le secrétaire d’État aux affaires sécuritaires, Rafik Chelly. Il a visé les clients sur la plage, puis pénétré dans l’enceinte de l’hôtel pour abattre des clients installés au bord des piscines, selon le pâtissier de l’hôtel.

« J’ai vu quelqu’un tirer sur des touristes âgés. Ils sont morts », a raconté Slim Brahim. « J’ai cherché à me cacher, car j’ai vu le terroriste entrer dans l’hôtel. Il a ensuite jeté une grenade près de la piscine ».

Selon un témoin tunisien, le tireur visait les touristes et épargnait les Tunisiens. « Le terroriste nous a dit : « Éloignez-vous, je ne suis pas venu pour vous ». Il ne nous a pas tiré dessus, il a commencé à tirer sur les touristes ».

Un fan de breakdance et de football

Seifeddine Rezgui avait 23 ans, il faisait un master en ingénierie à l’Institut supérieur des études technologiques (ISET) de Kairouan, selon le ministère de l’Intérieur. Originaire de la petite ville de Gaafour, il était également amateur de breakdance et passionné de football.

« Un élément inconnu de nos services. Son environnement familial », a déclaré le porte-parole du ministère, Mohamed Ali Aroui, à la télévision privée El-Hiwar Ettounsi. Il était inconnu des services de police, sauf pour avoir été arrêté une fois alors qu’il fumait du cannabis.Son passeport ne comportait pas de voyage à l’étranger, selon le premier ministre Habib Essid. Mais les autorités n’excluent pas qu’il ait pu se rendre en Libye de manière clandestine.

Son entourage sous le choc

« Au nom de Dieu, je ne sais pas pour quelle raison il a fait ça. Je ne sais pas où il a appris à se servir de ces armes. Qui l’a entrainé dans cette histoire ? Rien n’a changé de son comportement depuis qu’il étudie à Kairouan. Jeudi dernier encore, il était avec nous », a raconté son père à RFI.

« En vingt-trois ans, il n’a rien fait d’illégal. Il finissait les cours, il riait, il disait bonjour et il passait son chemin », a raconté Ali, l’oncle du jeune homme à l’AFP. « Comment s’est-il entraîné ? Où s’est-il entraîné ? Seul Dieu le sait. C’est ça qui nous tourmente maintenant. » « C’était un garçon doux quand il était plus jeune. Il faisait du breakdance et aimait le football. Il aurait dû avoir une vie longue et heureuse », témoigne encore son oncle.

Selon son cousin Nizar, Seifeddine se trouvait jeudi à Gaafour, sa ville natale, où il travaillait comme serveur pour financer ses études. « Il était normal. Il est venu ici, il a travaillé dans le café, il est rentré chez lui, il est allé prier et il s’est assis avec les gars dans le café. Tout Gaafour est surpris. »

Également interrogés par des médias, plusieurs de ses voisins à Kairouan disent n’avoir rien remarqué d' »anormal » chez lui.

Ces derniers temps cependant, le jeune homme s’isolait de plus en plus, selon le ministère de l’Intérieur. « Dernièrement, ses camarades ont remarqué une espèce de rigorisme, il penchait vers la solitude. Il était plongé dans Internet et même à ses amis, il ne voulait pas montrer sur quoi il surfait. Il s’isolait quand il allait sur Internet », a assuré le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Mohamed Ali Aroui.

Un autre homme sur Facebook

Sa page Facebook dépeint cependant un jeune homme très différent, selon The Telegraph. Entre ses postes sur la musique rap, le Real Madrid et la Coupe d’Afrique de football, apparaissent de nombreux messages en soutien à l’État islamique et même des vidéos de propagande. « Si le djihad est un crime, le monde doit savoir que je suis un criminel », a-t-il notamment écrit.

Son dernier message date du Nouvel An 2015. Il disait ceci : « Que Dieu me rappelle de ce monde injuste et fasse périr ses gens et les fasse souffrir. Ils ne se rappellent de vous que lorsqu’ils meurent. »

Aujourd’hui, les autorités se demandent pourquoi Seifeddine a arrêté d’alimenter sa page Facebook depuis lors. Elles soupçonnent qu’un éventuel commanditaire de l’attaque lui a conseillé d’arrêter toute activité sur le web. Ce commanditaire aurait pu lui recommander de rester discret après l’attentat du Bardo pour ne pas se faire arrêter dans la foulée, selon The Telegraph.

Kairouan, capitale religieuse

Kairouan, la ville où Seifeddine était parti étudier, est considérée la capitale religieuse de la Tunisie et comme un lieu saint de l’islam sunnite, selon le Figaro qui rappelle également qu’elle faisait la Une du magazine de l’État islamique juste après les attentats du musée Bardo.

Toujours selon le Figaro, le jeune homme aurait pris des cours dans une mosquée hors du contrôle de l’État et se serait mis à fréquenter des salafistes djihadistes. Jusqu’à la répression des djihadistes il y a deux ans, Kairouan était le pôle de recrutement d’Ansar al Charia, groupe islamiste tunisien remplacé aujourd’hui par Daech.

L’EI revendique l’attaque

Dans un communiqué, l’EI a affirmé qu’un « soldat du califat » avait visé « des antres de fornication, de vice et d’apostasie ». Il a « pu parvenir au but », en tuant « des sujets des États de l’alliance croisée qui combat l’État du califat », a ajouté le texte en référence à la coalition internationale bombardant les positions de l’EI en Irak et en Syrie.

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