Cas Mudde © University of Georgia

« Les néo-conservateurs, le Tea party ou Trump : personne ne les a vus venir »

Auréolé d’une réputation internationale, l’expert en populisme de droite Cas Mudde (Université de Géorgie aux États-Unis) lance une collecte de fonds pour un centre de recherche sur l’extrémisme. « Pendant 25 ans, j’ai dit que les gens s’inquiétaient trop. Mais aujourd’hui, la démocratie libérale est opprimée. »

Un peu à sa propre surprise, le Néerlandais réalise que le monde a besoin d’un centre qui étudie la démocratie et l’extrémisme. « Il y a vingt-cinq ans que j’étudie la droite radicale et les menaces qui planent sur la démocratie libérale. Tout ce temps j’ai dit que les gens s’inquiétaient trop. Mais ces dernières années, la démocratie libérale est opprimée. Directement par la montée de la droite radicale et du terrorisme djihadiste. Et indirectement, par le contre-terrorisme. Regardez la France : ce pays vit depuis plus d’un an dans l’état d’urgence. »

Malgré l’importance croissante du phénomène – avec comme point d’orgue l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis – Mudde constate qu’il est peu étudié et qu’on le connaît peu. « Il y a énormément de livres sur la droite radicale et le djihadisme, mais pas sur la menace pour la démocratie libérale et la réaction qui s’impose. » Mudde pense surtout aux États-Unis. « Je dis parfois que les sciences politiques sont aveugles de l’oeil droit. Les néo-conservateurs, le Tea Party ou Donald Trump : les études n’ont vu venir aucun de ces phénomènes. Ou prenez les ‘sovereign citizens’, un groupe de milliers d’Américains qui n’acceptent pas d’autorité politique au-dessus du niveau local. Ils sont responsables de la majorité des violences politiques aux États-Unis, la police les considère comme la menace la plus importante et il n’y a presque pas de recherches sur eux. »

Pourquoi? « Les sciences politiques sont assez repliées sur elles-mêmes », estime Mudde. « Cela découle de la professionnalisation de leur travail : l’accent est mis sur les études quantitatives et les statistiques. Il est très difficile de communiquer à ce sujet avec les journalistes, politiques ou ONG. » Mudde souhaite combler cet écart de communication en fondant son Center for Analysis of Democracy and Extremism. « Nous devons enseigner aux académiciens à traduire le travail pour les politiques, les journalistes et les personnes du terrain. C’est le but du centre, en plus de stimuler de nouvelles recherches académiques et faire office d’interlocuteur sur ce thème. »

Cette entreprise va coûter de l’argent. Beaucoup d’argent. Pour « bien faire tourner » le centre pendant dix ans, il a besoin de 6,5 millions de dollars. « Les frais de lancement sont à ce point élevés, qu’il faut penser à un terme d’au moins dix ans. Cet argent doit notamment nous permettre d’accorder des bourses de recherche pour des (post-)doctorats et des congrès. » Le centre prospérera probablement dans le giron de l’Université de Géorgie et cherchera à collaborer avec d’autres instituts.

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Cas Mudde a choisi la journée Martin Luther King et la semaine de l’investiture de Donald Trump pour lancer une levée de fonds pour financer le centre. Il espère que son appel, qu’il diffuse via les réseaux sociaux, atteindra les mécènes et philanthropes qui financent traditionnellement les think tanks aux États-Unis. « On ne peut pas simplement leur envoyer un e-mail en demandant gentiment : ‘Vous n’aurez pas 6,5 millions d’euros de trop, par hasard ?’ Peut-être que par le biais de mes followers je ne suis qu’à une connexion d’une telle personne. »

Si le projet vous intéresse, n’hésitez pas contacter Cas Mudde

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