Illustration. © Reuters

Les gardes des centres fermés bientôt autorisés à « battre les migrants à mort » en Australie ?

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

Un amendement de loi pourrait bientôt autoriser les gardiens des centres de détentions pour demandeurs d’asile à utiliser la force contre les migrants s’ils estiment que c’est nécessaire.

En Australie, où la politique d’immigration est déjà particulièrement dure, un projet d’amendement de la loi sur les centres de détention propose de renforcer le pouvoir des gardiens, rapporte le Guardian. Si la loi est votée, ils auront le droit d’utiliser la force en toute impunité s’ils estiment que c’est nécessaire « pour protéger la vie, la santé ou la sécurité des personnes en détention ou pour maintenir l’ordre et la paix au sein du centre de détention ».

Des intellectuels et défenseurs des droits de l’Homme s’insurgent contre cette proposition qui pourrait mener à de nombreuses dérives.

C’est ce que dénonce Stephen Charles, un ancien juge australien. Selon lui, cette nouvelle loi va « inévitablement encourager la violence des gardes à l’égard des demandeurs d’asile ». Cela les autoriserait même « à les battre à mort », affirme-t-il dans les colonnes du Guardian. Cela revient, selon le juge, à donner à des personnes qui ont un niveau de formation plus faible, un niveau de pouvoir plus élevé que celui des policiers australiens.

Il compare ainsi les nouveaux pouvoirs donnés aux gardiens, aux pouvoirs des policiers américains qui peuvent tuer un Noir en rue sans raison évidente et être ensuite acquittés. « Cet amendement à la loi sur l’immigration va en effet autoriser les gardes à battre à mort les migrants s’ils pensent que c’est nécessaire…de la faire », explique-t-il.

L’amendement prévoit donc de donner aux entreprises privées qui gèrent les centres et aux gardiens, une immunité de responsabilité civile et pénale à moins qu’il puisse être démontré que l’utilisation de la force a été faite de manière abusive.

Selon Guillian Triggs, la présidente de la Commission australienne des droits de l’Homme, il sera d’ailleurs « pratiquement impossible » de lancer une procédure judiciaire en raison des difficultés à démontrer la mauvaise foi dans ce cas.

Gabrielle Appleby, professeure à l’université de Nouvelle-Galle du Sud, a pour sa part dénoncé le fait que « les personnes visées par ce projet de loi ne sont pas des agents du ministère, mais des agents privés ». Elle a également souligné le fait que la formation des agents en question n’est pas évoquée dans le projet de loi et qu’elle sera laissée à l’appréciation du ministre en charge. Mais selon elle, l’autorité du ministre ne suffit pas sur cette question, car cela signifie qu’elle ne sera pas soumise au contrôle parlementaire.

Le gouvernement de Tony Abbot, à l’origine de cet amendement, n’en est pas à son coup d’essai en matière de politique répressive sur l’immigration. En 2014, une campagne anti-immigration avait été lancée à l’initiative du gouvernement. « Pas question. Vous ne ferez pas de l’Australie votre maison », disaient les affiches traduites dans 16 langues et diffusées en Irak, en Iran, en Afghanistan et au Sri Lanka, entre autres, d’où viennent la plupart des immigrés clandestins.

En octobre dernier, un député indépendant avait même demandé à la Cour pénale internationale (CPI) d’enquêter sur la politique d’immigration très restrictive du gouvernement australien qu’il accusait de « crime contre l’humanité ».

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