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Lénine toujours très présent en Russie, 25 ans après la chute du communisme.

Le Vif

Comment aller du parc « 50e anniversaire de la Révolution d’Octobre » à la Place d’Octobre à Moscou, où trône une immense statue de Lénine? Prenez la rue Kroupskaïa (femme de Lénine) ou la rue Maria Oulianova (mère de Lénine), puis l’avenue Lénine, qui coupe la rue Dmitri Oulianov (frère de Lénine).

Quelque 25 ans après la chute de l’URSS et du régime communiste, Lénine, mort le 21 janvier 1924, reste très présent en Russie où des milliers de rues et de monuments célèbrent toujours la mémoire de celui qui a été le chef de la révolution d’Octobre 1917 et le fondateur de l’Etat soviétique.

« Dans ce bâtiment, Vladimir Ilitch Lénine a participé le 19 juillet 1918 à une réunion des cellules du parti des usines du quartier Zamoskvoretchie », indique une plaque dans le centre de la capitale. Un peu plus loin, une autre rappelle que « Vladimir Ilitch Lénine s’est adressé de ce balcon à des détachements de travailleurs-communistes des régions de Yaroslavl et de Vladimir partant au front ».

Sur l’entrée de chaque station de métro est écrit « Métro Lénine ». Le nom officiel du réseau est resté comme à l’époque soviétique « Métro Lénine de Moscou, décoré de l’ordre de Lénine et du Drapeau rouge du travail ».

Influence dans l’inconscient collectif

Après la chute de l’URSS et du communisme, le premier président de Russie Boris Eltsine n’a pas touché à Lénine, pourtant largement dénoncé alors comme le créateur du système répressif et totalitaire soviétique. Son successeur au Kremlin Vladimir Poutine, sous le règne duquel on observe une réhabilitation du passé soviétique, a suivi son exemple.

« Les gens s’y sont habitués et l’aspect idéologique lié au nom de Lénine a disparu. Mais cette présence a une influence sur la population et s’inscrit dans l’inconscient collectif. Lénine est ainsi perçu comme un personnage historique, une personnalité positive de notre passé », estime le directeur du centre moscovite d’études sociologiques Levada, Lev Goudkov, interrogé par l’AFP.

Selon un sondage effectué en 2014 par le centre officiel de recherches VTSIOM, quelque 63% de la population se déclaraient favorables au maintien des monuments à la gloire de Lénine contre 19% qui souhaitaient les voir disparaitre.

Ceux qui ont vécu la période soviétique voient avec plaisir, ou avec amertume selon les cas, ces persistances du passé soviétique et de l’idéologie communiste.

« Ces monuments me dérangent. Il faudrait envoyer tout ça dans un musée », estime Viktor Dziadko, un Moscovite de 60 ans, qui ne cache pas son hostilité envers le révolutionnaire bolchévik.

Les plus jeunes semblent eux bien loin de ce passé. « On observe une indifférence croissante. Lénine ne représente rien pour les jeunes générations qui ont juste une vague idée de lui comme fondateur de l’Etat soviétique », poursuit Lev Goudkov.

Interrogée dans la station de métro Bibliothèque Lénine, où un Lénine en mosaïques observe les passagers, Irina, 22 ans, étudiante en géologie, confirme: « Je ne fais pas très attention à ces représentations de Lénine. Cela ne fait pas partie de mes préoccupations ».

Sania Poliakovski, 20 ans, étudiant lui aussi, voit ça avec le même détachement : « A l’époque soviétique, tous ces monuments avaient une fonction idéologique, mais aujourd’hui c’est juste un témoignage de notre histoire ».

Une toponymie un peu schizophrène

« La toponymie d’aujourd’hui en Russie a quelque chose d’un peu schizophrène », relève de son côté le journaliste et ancien dissident soviétique Alexandre Podrabinek en observant que la route qui mène de Moscou à Saint-Pétersbourg s’appelle « route de Léningrad » et que Saint-Pétersbourg, qui a retrouvé son nom d’avant la Révolution, reste curieusement le centre d’une région qui porte toujours le nom de « région de Léningrad ».

Le corps embaumé de Lénine repose dans son mausolée sur la place Rouge, devant les murailles du Kremlin, le lieu le plus symbolique du pays, à quelques mètres de la tombe de Staline.

Faut-il retirer le corps de Lénine du mausolée et l’enterrer ? La question revient régulièrement mais les autorités russes se sont bien gardées de prendre une décision jusqu’à présent. Interrogé à ce sujet en 2010, Vladimir Poutine avait prudemment déclaré: « Il y a un temps pour tout. Quand viendra le moment, le peuple russe décidera de ce qu’il faut faire ».

Un sujet d’autant plus d’actualité que la Russie commémorera l’année prochaine le centième anniversaire de la révolution d’Octobre.

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