Geert Mak © Yann Bertrand

« La manière dont est gérée la crise grecque a atteint un niveau de cynisme qui dépasse l’entendement »

Le Vif

« Le week-end dernier n’a été qu’une profonde trahison des idéaux européens » dit Geert Mak spécialiste de l’Europe. L’idée au coeur de l’Europe a toujours été de mettre de côté les intérêts nationaux pour tendre à considérer les problèmes communs comme européens. Et cela n’a pas été fait ces derniers jours.

« Les pays les plus riches ont atteint le fond du panier en se comportant comme des usuriers du 19e siècle. Le message de l’Europe est le suivant : soit vous payez, soit on vous étrangle à mort.  » Geert Mak (68) est hollandais et c’est l’un des plus passionnants spécialistes de l’Europe. En 2004, il avait publié In Europa, un livre magistral sur l’ancien continent qu’il avait parcouru un an durant à la recherche du 20e siècle. La crise que nous vivons aujourd’hui le rend sombre et furieux.

« La manière dont est gérée cette crise a atteint un niveau de cynisme qui dépasse l’entendement. C’est une honte que nos dirigeants ne montrent pas une once de compassion. Ni avec les réfugiés, ni avec les Grecs. Les dirigeants ne sont préoccupés que par une seule chose et c’est de défendre leur propre pays. Peu importe que la Grèce s’écroule, du moment que l’export n’en souffre pas.  » « Le niveau démocratique de l’Europe doit être renforcé » estime Mak. « Le parlement européen se trouve désormais au niveau des parlements de la fin du 19e siècle : il prend de l’ampleur, mais a dans un même temps besoin de plus de pouvoirs. Nous devrions pouvoir voter pour des politiques d’autres pays. Ce débat devrait être mis sur la table.

Comment faire ?

Mak: « J’aime encore assez bien l’idée de Guy Verhofstadt qui prône une distinction entre les membres de l’UE et les partenaires de l’UE. Certaines questions devraient être traitées de façon plus rapide et centrale. Cela signifie aussi que l’on doit donner davantage de compétences à la Commission européenne. Si l’on ne peut envisager cette option, nous ne serons plus que des partenaires ponctuels qui n’auront plus rien à dire. Ma proposition est que l’on organise dans tous les pays de l’Europe un référendum autour de cette question d’un pouvoir plus centralisé. Car le pouvoir doit être plus étroit tout en ayant plus de légitimité. »

Cela ne va pas détourner les gens de l’Europe ?

« C’est vrai que nos grognements nous endorment, mais nous nous sentons plus européens que jamais. C’est l’avantage de cette crise. Petit à petit, nous nous sentons tous sur le même bateau. Les journaux débordent d’informations sur l’Europe. Si je compare cela à la situation d’il y a dix ans, c’est une grande avancée. Il n’y avait alors que peu de débats, alors qu’aujourd’hui ils sont partout. »

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