© iStock

La Finlande va mettre fin à l’expérience du revenu universel de base

Muriel Lefevre

En 2018, l’expérience autour d’un revenu universel de base pour les Finlandais sans emploi aurait dû être élargie. Au lieu de cela, le gouvernement a annoncé sa fin pour 2019.

À la fin de 2016, deux mille chômeurs finlandais ont reçu dans leur boîte aux lettres une surprise du gouvernement: à partir de 2017, ils allaient recevoir 560 euros par mois pendant deux ans. Le tout sans obligations. Ils venaient en effet d’être sélectionnés pour une expérience sur le revenu universel. Le Premier ministre centriste de l’époque Juha Sipilä, fervent défenseur du projet, « cherche à promouvoir l’emploi et à motiver les chômeurs à être plus entreprenants tout en simplifiant les règles bureaucratiques du chômage et éviter les effets pervers du système de protection sociale qui encouragent la passivité ». Ces personnes âgées entre 25 et 58 ans ont été tirées au sort pour recevoir, durant la durée de l’expérience, un revenu correspondant aux minima sociaux du pays, soit environ 560 euros.

L’idée d’une allocation universelle pour tous n’est pas neuve puisqu’elle est née de l’imagination de l’écrivain anglais Thomas More. Dans son livre « Utopie » paru en 1516 il parle d’une île où les habitants seraient assurés de leur survie sans dépendre de leur travail. Cette même idée sera reprise en 1797 par Thomas Paine, intellectuel anglais particulièrement actif dans les révolutions américaine et française. En Belgique aussi, Joseph Charlier, juriste de formation et premier défenseur d’un revenu universel, expose une version particulièrement élaborée dans son livre « Solution au problème social » paru en 1848. Cette idée de revenu de base non conditionnel refera ici et là son apparition et sera même testée dans de petites localités, mais c’est la Finlande qui, en premier, va l’expérimenter à un niveau national en le proposant à 2.000 de ses compatriotes pour une première phase test de deux ans.

L’expérience était prévue pour durer deux ans avec un budget de 20 millions d’euros. Le gouvernement n’aurait pas attendu ce délai pour décider dès à présent de ne pas étendre le projet aux non-chômeurs en 2018 et même d’arrêter l’expérience à la fin de 2019, puisqu’aucun budget ne semble avoir été prévu dans ce sens. L’étendre à toute la population aurait coûté 15 milliards d’euros à ce pays qui compte 5.5 millions d’habitants. De quoi probablement refroidir les ardeurs.

Le gouvernement annonce qu’il va chercher un autre moyen d’encourager la prospérité. Non content de mettre fin au projet, le gouvernement semble même effectuer une volte-face. En décembre, le parlement a donné son feu vert sur une loi qui irait plutôt dans le sens opposé en resserrant le contrôle autour des chômeurs qui devront au minimum avoir travaillé 18 heures ou suivi une formation de cinq jours au cours des trois derniers mois s’ils ne veulent pas voir leur indemnité diminuer de 4,65 % par mois. Cette loi signifiant de facto une réduction des allocations de chômage et des contrôles plus stricts, et qui, selon le journal Aamulehti devrait permettre des économies de l’ordre de 53 millions d’euros par an, a suscité de vives critiques provoquant grèves et manifestations.

« Nous nous éloignons effectivement du système du revenu de base », regrette Miska Simanainen, chercheuse pour la sécurité sociale finlandaise au journal Svenska Dagbladet. Elle trouve particulièrement regrettable que l’expérience n’ait pas été étendue à d’autres tranches de la population. Mais aussi qu’on ait tiré des conclusions définitives avant la fin de la période d’essai de deux ans qui était déjà fort courte. L’architecte de ce projet de revenu universel, le professeur Olli Kangas, est du même avis. « Deux ans, c’est trop court pour pouvoir tirer des conclusions détaillées d’une si grande expérience. Nous aurions dû avoir plus de temps et plus d’argent pour obtenir des résultats fiables. » dit-il encore dans The Guardian. « Nous ne pourrons publier les premiers réels enseignements de l’expérience qu’au printemps 2019. » est-il encore précisé dans La Libre.

Le ministre finlandais des Finances, Petteri Orpo, aurait déjà planifié un projet de remplacement, inspiré du système britannique de crédit universel.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire