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La Croatie dans l’Union européenne: un mariage de raison

Le Vif

La Croatie est, après la Slovénie, la deuxième république issue de l’ex-Yougoslavie à adhérer à l’Europe de Bruxelles. Les Croates approuvent… sans illusions.

La Croatie devient, ce lundi 1er juillet, le 28e membre de l’Union européenne. Si les Croates approuvent très largement cette adhésion elle ne suscite cependant guère d’enthousiasme.  » C’est une adhésion de raison plus que d’émotion  » estime le politologue Drazen Lalic. « Croates se considèrent depuis toujours comme un pays appartenant à l’Occident chrétien, souligne pour sa part l’historien Tvrtko Jacovina. Il ont le sentiment que leur place est dans l’Union européenne, que c’est une évolution normale. »

Nombre d’entre eux sont d’ailleurs convaincus qu’ils auraient dû être admis bien plus tôt, avant la Slovénie, la première des républiques issues de l’Ex-Yougoslavie à avoir adhérer au club bruxellois! Selon le tout dernier sondage réalisé par l’institut Ipsos pour la Commission européenne au mois de mai, 61% des Croates se disaient favorables à l’entrée de leur pays dans l’Union. Mais 77% estimaient que l’économie de leur pays n’était pas prête. Et moins de la moitié – 46%- disaient avoir une opinion positive de l’Union européenne.

Eloigner le spectre de la guerre

Les négociations, particulièrement longues, ont lassé de l’opinion. D’autant plus que la société civile a été laissée largement à l’écart du processus. « Les négociations ont été gérées exclusivement par la classe politique, elle n’ont pas été utilisées pour établir un dialogue avec la société », constate l’analyste Davor Gjenero. Résultat: la méfiance des Croates à l’égard des politiciens et des institutions politiques englobe tout naturellement l’Union européenne. C’est encore plus vrai chez les jeunes dont le scepticisme est général, sur fonds de crise de l’emploi.

Lorsqu’on leur demande quels sont les domaines dans lesquelles l’adhésion de leur pays à l’Union européenne devrait améliorer les choses, les Croates mettent en tête les perspectives d’emplois… dans les autres pays européens. Ils citent ensuite l’Etat de droit, la capacités à financer des projets, les investissements. Mais ils ne sont que très peu à attendre une amélioration du niveau de vie en Croatie.

Dans la réalité, la Croatie pourra recevoir au titre des fonds structurels environ un milliards d’euros par an entre 2014 et 2020, ce qui n’est pas négligeable pour un pays de 4 millions d’habitants. Mais à la condition de pouvoir présenter des projets qui tiennent la route et présentent toutes les garanties de transparence… Or c’est là que le bât blesse. Malgré la mise en eovure de contrôles beaucoup plus rigoureux, tout au loin des négociations, que cela n’avait été le cas avec la Bulgarie et la Roumanie, un familier du dossier reconnaît qu’il reste « du chemin à parcourir », que la réforme de l’administration publique et « loin d’être achevée » et que la Croatie peine toujours à attirer les investisseurs étrangers notamment du fait de son système judiciaire.

Si beaucoup de Croates s’interrogent souvent avec une certaine inquiétude sur la façon dont leur économie pourra s’adapter au marché unique européen, en revanche ils sont nombreux, à l’exception de l’ultra droite souverainiste, à espérer que leur entrée dans l’Union européenne éloignera définitivement le spectre de la guerre. Et à souhaiter que la Serbie rejoigne à son tour cette Europe qui a su, jusqu’ici, mettre ses peuples à l’abri des guerres.

Dominique Lagarde

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