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L’itinéraire tortueux de Luka Rocco Magnotta, le « dépeceur canadien »

Accusé d’avoir tué un jeune homme à Montréal, Luka Rocco Magnotta est actuellement recherché par la police française. Mais sa vie est riche en zones d’ombres. Portrait.

Beau garçon bisexuel, ancien prostitué et acteur porno raté, ayant jadis pris « Ange » pour nom de scène, Luka Rocco Magnotta a fait connaître son visage au monde entier en devenant le suspect numéro un d’un meurtre sadique, mais sa vie est riche en zones d’ombre.

Un avis de recherche, lancé à Montréal après la découverte du corps d’un étudiant chinois, décrit un homme de 29 ans, élancé, puisque mesurant 1,78 mètre et pesant 61 kilos, aux cheveux noirs et aux yeux bleus. Mais la police précise qu’il change facilement d’apparence, teint parfois ses cheveux, porte des perruques et peut se déguiser en femme.

Les médias l’ont surnommé « Canadian Psycho », car une vidéo publiée sur Internet qui montre son crime, le meurtre à l’aide d’un pic à glace d’un homme ligoté puis le dépeçage de son corps, est accompagnée par une chanson du film « American Psycho ».
Selon l’avis de recherche, Magnotta est également connu sous les pseudonymes Eric Clinton Newman et Vladimir Romanov. En fait, il a porté le nom de Newman, avant de le changer officiellement pour Magnotta en 2006.

Magnotta a pris l’habitude de se mettre en scène sur le Web

La recherche de détails sur sa vie passée se heurte à la protection de la vie privée, très stricte au Canada. Des membres de sa famille, interrogés devant leur maison de Peterborough, dans la banlieue nord-est de Toronto, se sont bornés à dire avoir perdu tout contact avec lui depuis « un bon moment ». Et il est difficile de considérer comme une source fiable l’abondante mythologie personnelle qu’il avait créée pendant des années via de nombreux écrits et photos sur Internet. Il se présente parfois comme étant d’origine russe, mais serait en fait né à Toronto et aurait passé une partie de son enfance à Scarborough, un quartier périphérique de la plus grande ville canadienne.

Magnotta serait devenu « homme de compagnie », autrement dit prostitué, et strip-teaseur à l’âge de 18 ans, officiant sous le nom d' »Ange » dans un bar gay de Toronto, le Remington’s, selon la chroniqueuse et artiste transsexuelle canadienne Nina Arsenault, qui affirme avoir eu une liaison avec lui.

En 2005, il a été poursuivi pour fraude au détriment de magasins et condamné à neuf mois de prison avec sursis. Plus récemment, il a cherché à se faire de la publicité en publiant sur YouTube des vidéos où il asphyxiait des chatons. Il s’est aussi dit nécrophile ou encore proche des thèses des suprémacistes blancs américains.
Sur Internet, il a aussi affirmé se déplacer en limousine et voyager à travers le monde -y compris à Paris où il est actuellement recherché par la police- mais ces temps derniers il louait un petit appartement dans un quartier périphérique modeste à Montréal. Interviewée par la chaîne CBC, Nina Arsenault l’a décrit comme « manipulateur, menteur, irascible et souvent autodestructeur ».

Dans ses écrits, il laisse entendre avoir été battu et abusé sexuellement, avoir essayé l’alcool et la drogue et être devenu maniaco-dépressif. Il aurait aussi adhéré à l’église de scientologie. Selon le psychiatre Gilles Chamberland, interviewé par Radio-Canada, il aurait souffert de beaucoup de frustrations et « il s’en dégage des traits narcissiques, histrioniques (de type hystérique, ndlr) et antisociaux ». Magnotta affiche un narcissisme poussé à l’extrême, se disant « incroyablement beau ». « Je ne suis pas homosexuel, mais si je l’étais, je m’épouserais et serais obsédé par moi », a-t-il écrit.

Il aurait fini par « nier sa souffrance », avant de chercher un exutoire dans l’action, pense encore le Dr Chamberland. S’il est l’auteur du crime commis à Montréal, dont la victime a été dépecée et des morceaux de son corps envoyés par la poste à des partis politiques, Magnotta aurait pu ressentir un soulagement. Mais celui-ci pourrait n’être que passager et il risquerait de récidiver, a mis en garde le psychiatre.

LeVif.be avec L’Express

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