Emmanuel Macron © Reuters

« L’hyperprésident » Macron devant le Congrès pour un discours controversé

Le Vif

Le président français Emmanuel Macron s’adressera lundi au Parlement réuni en congrès, au château de Versailles, pour exposer les grandes orientations de son quinquennat, une initiative controversée révélatrice pour ses détracteurs de la pratique « monarchique » du pouvoir du nouveau chef de l’Etat.

A 15H00 (13H00 GMT), sous les ors de Versailles, le président élu le 7 mai dernier s’exprimera solennellement devant les députés et sénateurs français et, à travers eux, devant les Français.

Une sorte de « discours sur l’état de l’Union » similaire à celui prononcé chaque année par le président américain, explique le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner.

De ce format solennel et exceptionnel — les présidents Nicolas Sarkozy (2007-2012) et François Hollande (2012-2017) n’y ont eu recours qu’une fois chacun –, Emmanuel Macron a décidé de faire un rituel annuel, abandonnant la traditionnelle interview télévisée du 14 Juillet, jour de la fête nationale française.

Signe d’une prééminence assumée, M. Macron a choisi de prendre la parole la veille de la déclaration de politique générale de son Premier ministre Edouard Philippe, lui grillant ainsi la politesse.

Cette décision du chef de l’Etat, qui n’a jamais caché son souhait de rétablir la majesté de la fonction présidentielle, n’est pas du goût de tous parmi les parlementaires.

Le président des députés du parti de droite Les Républicains (LR), Christian Jacob, a mis en garde dimanche Emmanuel Macron contre un « pouvoir sans partage », soulignant que son intervention lundi allait « forcément écraser l’intervention du Premier ministre », issu des rangs LR.

Les 17 députés de la gauche radicale boycotteront, eux, le Congrès, a annoncé leur leader Jean-Luc Mélenchon, pour qui Emmanuel Macron « franchit un seuil dans la dimension pharaonique de la monarchie présidentielle ».

« Le président discourt mais personne n’a le droit de l’interroger ou de débattre avec lui. Les députés sont transformés en spectateurs », déplore quant à lui le chef de file des députés socialistes Olivier Faure.

‘Cap à atteindre’

Tenue à distance par le nouveau pouvoir, la presse française est également critique. « L’hyper-président. Il décide de tout, monopolise la parole, contrôle la communication », faisait valoir dimanche Le Parisien. « Macron, un roi sans partage », titrait trois jours plus tôt le quotidien de gauche Libération.

Le discours de lundi intervient peu après des élections législatives qui ont sanctionné les partis traditionnels français et accordé une franche majorité au jeune mouvement présidentiel La République en Marche (LREM), sur laquelle Emmanuel Macron compte pour mettre en oeuvre son programme libéral-social.

Sur le fond, le président centriste et pro-européen devrait longuement évoquer lundi la réforme du marché du travail, qu’il souhaite assouplir par voie d’ordonnances, c’est à dire sans débat parlementaire.

Cette réforme, qui vise à accorder plus de flexibilité à l’entreprise dans l’espoir d’encourager l’emploi, va plus loin que la très décriée « loi travail » promulguée l’an dernier sous la présidence du socialiste François Hollande et à l’origine d’une grave crise sociale, avec plusieurs mois de manifestations.

Son discours pourrait ainsi faire écho à celui, restée célèbre, de Gerhard Schröder, le 14 mars 2003. Annonçant l' »Agenda 2010″, le chancelier allemand de l’époque avait promis du sang et des larmes à ses compatriotes mais pavé le chemin du retour au plein emploi outre-Rhin.

Il pourrait également rappeler le « Jobs Act » de l’Italien Matteo Renzi ou les réformes libérales engagées par David Cameron en Grande-Bretagne.

Mardi, c’est au Premier ministre que reviendra la tâche de détailler devant l’Assemblée la feuille de route gouvernementale. « Le président de la République, lundi devant le Congrès, va fixer le cap. Ce cap, il nous appartient à nous, membres du gouvernement, de l’atteindre », a résumé samedi Edouard Philippe.

Une mission sous haute pression budgétaire. En l’absence d’économies « sans précédent », le déficit français devrait déraper à 3,2% du PIB en 2017, a prévenu jeudi la Cour des comptes.

Or, pendant sa campagne, le candidat Macron a répété qu’il comptait restaurer la « crédibilité » de la France en Europe, en particulier auprès de son partenaire allemand, en faisant preuve de sérieux dans ses finances publiques.

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