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L’ACTA de guerre contre l’Internet : décryptage

L’Accord Commercial Anti-Contrefaçon (ACTA) est un traité fourre-tout visant à la fois les marchandises contrefaites, les faux médicaments et les atteintes à la propriété intellectuelle. 22 pays ont franchi la première étape de la signature, mais 5 pays ont déjà suspendu leur ratification, dont l’Allemagne encore indécise.

Le traité ACTA a été signé par 22 pays de l’UE, le 26 janvier. C’est un accord commercial international destiné à accentuer la lutte contre les violations de la propriété intellectuelle et les échanges illicites sur Internet. L’ACTA aurait une gouvernance propre en dehors des institutions gouvernementales existantes comme l’Organisation Mondiale du Commerce ou l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle. Le site de la Commission Européenne annonce qu’il n’y aura pas de changement du droit européen. L’adoption du traité sera assorti de mesures civiles et pénales pour agir contre ces violations à l’échelle mondiale. Selon la C.E, l’ACTA contribuerait à l’innovation et la compétitivité dans un monde globalisé. Il doit être signé et ratifié par l’UE et les 27 États membres, puis accepté par le Parlement Européen pour entrer en vigueur. Les États-Unis, le Canada, le Japon, la Corée du Sud, l’Australie, le Mexique, le Maroc et la Nouvelle-Zélande ont aussi participé à l’élaboration de l’ACTA.

Aucun document officiel n’a été publié jusque-ici, mais il y a eu des fuites. Des zones opaques du traité ont été révélées par des participants de l’ACTA, inquiets des conséquences futures.

Le 26 janvier, jour de la signature de l’UE, le rapporteur principal de l’ACTA au Parlement Européen Kader Arif démissionnait en dénonçant une mascarade. Pour ce dernier, « chacun le sait, l’accord ACTA pose problème, qu’il s’agisse de son impact sur les libertés civiles, des responsabilités qu’il fait peser sur les fournisseurs d’accès à internet, des conséquences sur la fabrication de médicaments génériques ou du peu de protection qu’il offre à nos indications géographiques ».

Le flou du traité sème la confusion

De nombreux eurodéputés ayant contribué aux bases de l’ACTA se sont insurgés ensuite, en noyant les sites d’information d’alertes. La députée européenne Françoise Castex écrit sur son site : « Je voudrais faire remarquer que plus cet accord est connu, plus il y a d’opposants. Ça a commencé par quelques internautes, maintenant ce sont des Etats membres qui retirent leur signature ! ».
Le site Numerama affirme que : « l’ACTA vise à instituer une nouvelle organisation internationale, en marge à la fois de l’OMPI (Organisation Mondiale de la Propriété intellectuelle) et de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce), pour faire barrage aux états du Sud qui n’ont pas été invités à la négociation ». En effet, L’accord concerne surtout les pays les plus développés à l’exception du Mexique, de la Jordanie, du Maroc et des Émirats arabes unis.

Les risques potentiels

Le site readwriteweb révèle les moyens d’assurer cette protection : contraindre les fournisseurs d’accès internet à contrôler le copyright, limiter la possibilité d’hébergement par des utilisateurs à cause de coûts importants.
Des sanctions seront prévues pour le non-respect du copyright, comme une interdiction d’accéder à Internet après trois avertissements, l’inspection des supports informatiques aux frontières (MP3, disques durs…). Les fichiers avec un copyright téléchargés illégalement seraient détruits et les propriétaires seraient sanctionnés financièrement.

ACTA vise à rendre les fournisseurs d’accès et les hébergeurs de fichiers responsables des activités de leurs utilisateurs. Les fournisseurs et hébergeurs seraient responsables de la diffusion d’oeuvres protégées via leurs outils et infrastructures. Ce qui peut les amener à filtrer les contenus et à surveiller la sphère privée (boîtes mails…).

Vague de manifestations

Des soulèvements ont éclaté dans toute l’Europe pour s’attaquer à l’ACTA. L’Europe de l’Est s’est même très largement mobilisée. Les gouvernement de la Pologne, la République Tchèque, la Slovaquie et la Lettonie ont tous suspendu la ratification du traité. L’Allemagne met en suspens sa décision en désirant attendre celle des eurodéputés au Parlement européen qui s’exprimeront en avril prochain. A Paris et à Bruxelles, des manifestations ont eu lieu samedi.

OWNI, site d’investigation français, indique que « le vote du Parlement européen sur ACTA interviendra entre juin et septembre. D’ici là, un processus complexe est enclenché, fait de multiples rapports, échanges de vues, débats, amendements et votes. Dans lequel des commissions parlementaires sont impliquées. OWNI a réalisé une infographie pour comprendre le processus.

Astrid Thins (stg)

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