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Etats-Unis : Obama et Romney veulent séduire les femmes

A six mois de la présidentielle, les candidats démocrate et républicain se disputent l’électorat féminin. Car le vote des Américaines pourrait faire pencher la balance.

Hilary Rosen n’est ni une élue ni une tête pensante du Parti démocrate. Juste une pro des relations publiques et une habituée de Washington, parfois invitée comme « experte » dans les émissions politiques de CNN. En déclarant à l’antenne, le 11 avril, qu’Ann Romney, l’épouse du candidat républicain à la présidentielle, mère de cinq enfants, « n’avait jamais travaillé un jour dans sa vie », cette admiratrice d’Obama n’engageait qu’elle-même. Mais ses propos ont déclenché un gigantesque tollé, qui rappelle l’un des enjeux de la campagne : l’électorat féminin pourrait décider, en novembre prochain, de l’issue des élections.

L’honneur de la femme au foyer américaine

Très vite, l’état-major électoral démocrate a tenté de limiter les dégâts : le porte-parole de la Maison-Blanche et les deux directeurs de campagne d’Obama ont prié Rosen de présenter ses excuses et loué le travail harassant des mères de famille. Le président lui-même, invité d’un talk-show le 24 avril, a décrit l’épouse de son rival comme « une personne charmante ». Mais le mal est fait : Ann Romney, plus éloquente, naturelle et chaleureuse que son mari, incarne dorénavant l’honneur de la femme au foyer américaine. Sa nouvelle page sur Facebook, Moms for Mitt (« les mamans pour Mitt »), illustre par son succès le nouvel espoir des républicains : combler un fossé des sexes qui avantage pour l’instant Obama. Celui-ci devance Romney de 4 points dans l’ensemble de l’électorat, un chiffre trois fois plus petit que dans les sondages du mois de mars, mais il dispose d’un avantage de 13 points parmi les électrices. Les hommes, eux, accordent une marge de 6 points à Romney.

« Le vote féminin est moins idéologique »

Cette différence constitue l’une des constantes des élections américaines : depuis 1988, aucun candidat républicain n’a pu obtenir la majorité du vote féminin (seul George W. Bush, en 2004, a pu réduire ce fossé en présentant son offensive antiterroriste comme destinée à protéger la famille américaine). « Le vote des femmes est moins idéologique que pragmatique, analyse Victoria Budson, professeur à la Kennedy School de Harvard. De l’assurance-santé à l’enseignement, elles attendent des mesures qui améliorent leur vie et celle de leurs proches. » Pour autant, Obama ne peut se permettre le moindre glissement du vote féminin vers la droite car les jeunes et les électeurs issus des minorités risquent de voter en moins grand nombre qu’il y a cinq ans. D’où l’offensive de séduction.

L’équipe de campagne du démocrate a publié ce mois-ci un document de 65 pages, qui revisite toute sa présidence par le prisme des nouveaux avantages accordés aux femmes, du droit d’allaiter au bureau à celui de piloter un sous-marin, en passant par des aides spécifiques à la création d’entreprise et de nouvelles mesures contre les violences conjugales.

De leur côté, Ann et Mitt Romney innovent. Plutôt que de féminiser les thèmes de campagne et d’ouvrir le débat sur d’éventuelles réformes sociales, ils s’adressent aux Américaines, salariées ou au foyer, comme à des témoins primordiaux du bilan économique d’Obama, décrit comme celui du chômage des jeunes, des hausses de l’essence et de l’endettement national. « Les mamans font tourner l’économie », assurent les nouveaux autocollants républicains. Elles décident aussi de la présidentielle.

De notre correspondant Philippe Coste, L’Express.fr

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