Olivier Mouton

Enfin, un candidat anti-système positif: Macron…

Olivier Mouton Journaliste

Le discours de candidature du fondateur du mouvement En Marche est la réponse que l’on attendait à l’ère de Trump et des replis sur soi. Il fait songer à un Obama français…

Enfin ! Dans le contexte politique délétère de l’heure, après l’élection de Trump aux Etats-Unis et alors que l’Europe se détricote à coups de replis sur soi, tandis que la classe politique tétanisée assiste à la colère des peuples, un homme se lève pour proposer un autre discours, optimiste et volontaire. En présentant sa candidature à la présidentielle française depuis un atelier de voitures à Bobigny, Emmanuel Macron prend le risque de brouiller les cartes, d’avancer une autre logique anti-système. Le fondateur du mouvement « En Marche » est le candidat anti-Marine Le Pen par excellence. Nul ne sait si son coup de poker réussira en mai prochain. Mais avec des accents gaulliens, l’ancien ministre de l’Economie a au moins le mérite d’essayer.

« J’ai vu de l’intérieur la vacuité de notre système politique qui empêche les majorités d’idées parce qu’elles fragilisent les partis et les appareils. » Elle qui « transforme la vie des Français en décor de son théâtre d’ombres ». C’est avec un lyrisme puissant que l’ex-membre du gouvernement Hollande a pris congé de la classe politique dont il faisait partie. Bien sûr, on ne cessera sans doute de renvoyer le candidat Macron à son impuissance de ministre, mais il coupe d’emblée l’herbe sous le pied de ces critiques. « Ce système, je le refuse », clame-t-il. C’est dans l’air du temps. Mais en disant cela, il ouvre de nouvelles portes et fait rêver à nouveau. Enfin…

Il y a des accents de Barack Obama dans cette candidature qui refuse le déclin de la France pour la projeter vers l’avenir. « En Marche » fait appel à la confiance, dénonce un France bloquée par le conservatisme et propose de libérer l’énergie du pays. Cet « optimisme de la volonté » rappelle le « Yes we can » d’il y a huit ans. Soudain, la candidature du favori de la droite, Alain Juppé, semble ployer sous le poids des ans. Soudain, le repli sur soi frileux sur lequel mise Marine Le Pen est renvoyé à son cynisme. Soudain, les mesquineries de la gauche s’effacent et le bilan présidentiel désastreux de François Hollande au moins masqué – Macron se présente directement au suffrage des Français, sans passer par la case « primaires ». « L’enjeu n’est pas de rassembler la gauche, ni la droite, mais les Français », ose Macron. Qui veut « réconcilier la liberté et le progrès ». Alors que les partis traditionnels sont carbonisés dans la tête des citoyens, l’homme ose avec l’audace de son jeune âge un coup de poker qui sort des clous. Une rupture.

Bien sûr, il y a une forme de naïveté dans sa démarche. Des accents très « énarquiens », aussi, avec un vocabulaire qui s’élève au-dessus des masses qu’il devra convaincre. Le Macron un peu tétanisé par le trac et un zeste arrogant de ce matin fait aussi, par moments, songer à un populiste de centre-gauche dont les recettes doivent encore être élaborées. Le pari audacieux auquel il se livre risque fort, il le reconnaît lui-même, de se fracasser contre les habitudes et les résistances de l’époque. Certains de ses choix, notamment un pro-européanisme à contre-courant, risque de désarçonner. Il sera intéressant de voir où le candidat se situe dans les prochains sondages – même si l’on sait le crédit qu’on doit leur donner. En sortant de la sorte du moule, Emmanuel Macron pourrait autant créer la surprise que faire un score honorable, mais l’écartant du second tour de la présidentielle. Or, ses proches le disent, il est là pour gagner, pas pour jouer la figuration ni, le cas échéant, devenir le Premier ministre d’un autre candidat. La barre est placée haut, peut-être trop haut.

Prenant tout le monde de vitesse, Emmanuel Macron vient pourtant de donner un coup de pied dans la fourmilière, de rebattre les cartes et c’est sans aucun dont ce dont le débat politique, plein d’amertume tant en Europe qu’aux Etats-Unis, avait besoin. Cela n’amenuisera pas dans l’heure les souffrances, les colères ou les rancunes. Mais cela donnera peut-être de nouvelles raisons d’espérer.

Enfin.

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