Francois Molins, procureur de la République (Paris), lors d'une conférence de presse, annonce que les premières investigations avaient permis d'établir que le "projet" d'Ayoub El Khazzani apparaissait "ciblé et prémédité". © AFP

El Khazzani inculpé et écroué pour une attaque « ciblée et préméditée »

Ayoub El Khazzani, le jeune Marocain qui a ouvert le feu dans un train Thalys Amsterdam-Paris, a été inculpé et écroué dans la nuit de mardi à mercredi, pour une attaque « préméditée » qui aurait pu déboucher sur un carnage.

Il a été mis en examen (inculpé) pour tentatives d’assassinats, association de malfaiteurs et détention d’armes, le tout en relation avec une entreprise terroriste, a affirmé à l’AFP une source judiciaire. Conformément aux réquisitions du parquet, il a été placé en détention provisoire.

Le procureur de la République de Paris François Molins a estimé que les premières investigations avaient permis d’établir que le « projet » du jeune assaillant de 25 ans apparaissait « ciblé et prémédité ». Le procureur a balayé comme « fantaisistes » les dénégations du suspect, qui a affirmé avoir trouvé fortuitement les armes dans un parc de Bruxelles où il dormait avec d’autres SDF, et avoir voulu rançonner les voyageurs du Thalys Amsterdam-Paris.

El Khazzani, signalé pour islamisme radical par les services de renseignement d’Espagne, pays où il a vécu plusieurs années, avait été maîtrisé vendredi 21 août par des passagers alors qu’il sortait des toilettes du Thalys, armé d’une kalachnikov et de neuf chargeurs pleins -quelque 270 balles, de quoi commettre un carnage-, d’un pistolet Luger, d’un cutter et d’une bouteille de 50 cl d’essence. La suite de l’enquête, sous l’autorité de juges d’instruction, devra s’attacher à déterminer « la provenance des armes », le « parcours » de l’assaillant, ainsi que « les complicités dont il a bénéficié », a souligné M. Molins.

Le jeune homme, qui a réglé en liquide les 149 euros de son billet Bruxelles-Paris en 1ère classe, avait refusé de prendre un train précédent. Une fois à bord, il a consulté une vidéo de prêches jihadistes sur son téléphone portable, activé le matin même, technique connue pour éviter tout repérage.

La police belge a mené lundi soir deux perquisitions à Bruxelles, dans le quartier populaire de Molenbeek-Saint-Jean, pour tenter de déterminer les « lieux de séjour » d’Ayoub El Khazzani, selon le parquet fédéral.

Des perquisitions menées chez sa soeur à Bruxelles ont notamment permis d’établir qu’il y avait séjourné « très récemment », ce qu’il nie arguant vivre dans un jardin public, selon M. Molins.

Arrivé en Espagne en 2007, vers 18 ans, et installé à Algesiras (sud) où vit son père, le suspect avait été signalé pour ses discours radicaux dans des mosquées et avait également été condamné à deux reprises en 2010 pour trafic de drogue.

Début 2014, les services espagnols de renseignement signalent à leurs homologues français son intention de franchir la frontière. Un passage en France désormais attesté, puisque l’opérateur de téléphonie mobile Lycamobile a confirmé que le Marocain y a bien travaillé de février à avril 2014, avant une rupture, car ses papiers « ne lui permettaient pas de travailler en France ». Lui dit avoir alors séjourné sept mois en France, à Aubervilliers.

Un an plus tard, le 10 mai 2015, El Khazzani est repéré à Berlin d’où il s’envole pour la Turquie. Est-il ensuite allé en Syrie, où des zones sont contrôlées par l’organisation État islamique (EI) ? Il regagne en tout cas l’Europe le 4 juin, par un vol d’Antakya, proche de la frontière syrienne, vers l’Albanie. Il a raconté s’être déplacé au cours des six derniers mois en Belgique, Allemagne, Autriche, France et en Andorre.

Si le projet meurtrier d’El Khazzani a échoué, « nous devons nous préparer à d’autres assauts et donc nous protéger », a mis en garde mardi le président français François Hollande.

La veille, le chef de l’Etat avait remis la Légion d’honneur à plusieurs passagers qui avaient empêché Ayoub El Khazzani d’agir. Parmi eux, un Américain, militaire en vacances, a été blessé au cutter, tandis qu’un autre passager, blessé par balle, est toujours hospitalisé à Lille. Déjà décoré de la Légion d’honneur, l’un d’eux, le soldat Spencer Stone va recevoir la plus haute distinction accordée à un membre de l’armée de l’air américaine, « pour un acte de courage hors combat ».

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