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Deux ans après le soulèvement, Bahreïn toujours englué dans une crise meurtrière

Le Vif

Depuis février 2011, les opposants au pouvoir sunnite réclament des réformes sociales et politiques dans ce pays du Golfe à majorité chiite. Malgré quelques avancées, le régime continue de violer la liberté d’expression, dénonce Amnesty International.

Les journées de protestation se suivent et se ressemblent à Bahreïn: ce jeudi, le deuxième anniversaire du soulèvement chiite dans ce petit pays du Golfe gouverné par des sunnites, a déjà été endeuillé par la mort d’un manifestant de 16 ans. Le jeune homme a péri dans des affrontements avec les forces anti-émeutes, à la suite de blessures infligées par des tirs de chevrotine.

A bas Hamad, le peuple veut la chute du régime « Le peuple veut la chute du régime », « A bas Hamad » -le roi de Bahreïn- scandaient des protestataires dans plusieurs villages chiites dont ils ont bloqué les accès. Autour de Sanabes, en proche banlieue de Manama, la capitale, les forces de sécurité sont intervenues pour empêcher des dizaines de manifestants de marcher sur la « Place de la Perle », symbole du soulèvement du 14 février 2011.

La révolte à Bahreïn a éclaté il y a deux ans, en pleine vague des printemps arabes, à la suite d’un appel sur Facebook: des internautes réclamaient un « jour de colère » pour exiger des réformes politiques et sociales, dans la foulée des soulèvements en Tunisie et en Egypte. Des milliers de manifestants s’étaient alors rassemblés dans le centre de Manama, la capitale, après la mort de deux jeunes manifestants, pour une révolte qui devait durer un mois, avant d’être violemment matée.

Des réformes inabouties

Bahreïn est le seul pays du Golfe composé d’une majorité de chiites -70% de la population- toutefois marginalisée par le pouvoir sunnite: les chiites sont notamment exclus des postes administratifs et de sécurité. Depuis son indépendance en 1971, Bahreïn est d’ailleurs dirigée par une dynastie, les Al-Khalifa, les chefs d’Etat et vice-premiers ministres en étant invariablement issus.

Les réformes politiques engagées au début des années 2000 sont restées incomplètes. L’opposition continue de réclamer notamment une monarchie constitutionnelle, un gouvernement issu d’élections et la fin de la discrimination confessionnelle.

Dans un rapport publié ce jeudi pour les deux ans du soulèvement, Amnesty International accuse aussi le pouvoir de violer la liberté d’expression, et réclame la libération des opposants détenus depuis février 2011. « Non seulement les prisonniers d’opinion n’ont pas été libérés ces derniers mois, mais de nouvelles personnes ont été emprisonnés pour le simple fait d’avoir osé exprimer leurs opinions, que ce soit via Twitter ou lors de marches pacifiques », écrivent ses auteurs.

Quatre-vingt victimes de la contestation

Depuis la mise en place d’une commission d’enquête et la publication par les autorités d’un rapport sur les violences commises lors de la répression du soulèvement, « le gouvernement a introduit quelques réformes », reconnaît l’ONG. Parmi elle, la nomination de deux médiateurs chargés de lever le voile sur les abus perpétrés par le ministère de l’Intérieur, l’installation de caméras dans les commissariats ou la réouverture de négociations avec l’opposition. Mais la liberté d’expression est toujours piétinée, tout comme celle « d’association et de rassemblement », accuse Amnesty International.

Une deuxième séance du dialogue national entre l’opposition et le gouvernement s’est tenue mercredi. Ces échanges, entamés il y a quelques jours dans le but de sortir le pays de l’impasse politique, doivent se poursuivre dimanche. En tout, la Fédération internationale des droits de l’homme estime à 80 le bilan des victimes de la contestation.

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