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Belmokhtar, l’insaisissable chef jihadiste du Sahel

Le Vif

Le chef jihadiste algérien Mokhtar Belmokhtar, dont le groupe a revendiqué l’attentat contre l’hôtel Radisson de Bamako, donné pour mort à de multiples reprises, s’est rendu célèbre pour des attaques aussi sanglantes que spectaculaires dans le Sahel, notamment sur le complexe gazier d’In Amenas en 2013. Portrait.

En juin encore, il était la cible déclarée d’une frappe américaine en Libye, mais il court toujours, a déploré dimanche le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian. Washington a mis sa tête à prix pour cinq millions de dollars et, de tous les chefs jihadistes du Sahel, c’est une photo de Belmokhtar que le chef de la base française de Gao, dans le nord du Mali, a affiché au mur de son bureau. « Pour me rappeler qu’il existe et qu’il me veut du mal », expliquait alors à l’AFP le colonel Luc Lainé.

Au Mali, « tous les jihadistes ont pour colonne vertébrale Mokhtar Belmokhtar », a affirmé à l’AFP lundi une source au sein du renseignement malien. En mai, l’Algérien avait réaffirmé la loyauté de son groupe, Al-Mourabitoune, à Al-Qaïda et démenti l’allégeance à l’État islamique (EI) proclamée par un autre dirigeant. Né en juin 1972 à Ghardaïa, aux portes du Sahara, Mokhtar Belmokhtar a combattu très jeune en Afghanistan en 1991, où il a perdu un oeil, d’où son surnom, « le Borgne ». De retour en Algérie en 1993, au début de la guerre civile, il rejoint le Groupe islamique armé (GIA, démantelé en 2005), et crée une unité basée principalement dans le Sahara. En 1998, il rejoint le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), une dissidence du GIA soutenue par le chef d’Al-Qaïda, Oussama ben Laden, pour se démarquer des massacres de civils perpétrés par le GIA et concentrer ses attaques sur des cibles policières et militaires.

Alliances matrimoniales

Belmokhtar règne alors en maître sur les routes clandestines du grand Sud saharien, se livrant à des attentats financés par des activités de contrebande, notamment de cigarettes. Il établit des liens avec les tribus qui le préviennent des mouvements des forces de sécurité.

En 2001, il entre en concurrence avec Amari Saïfi, alias Abderrezak El-Para, alors numéro deux du GSPC, pour le contrôle du Sahara. Après l’arrestation de son rival, auteur de l’enlèvement de 32 touristes européens en 2003 et livré à Alger en 2004, « le Borgne » se replie dans le nord désertique du Mali, qu’il transforme en sanctuaire, liant de solides alliances en épousant des femmes de tribus touareg ou arabe. En 2007, à la suite de dissensions au sein du GSPC qui devient Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), il est remplacé à la tête de la zone par Abdelhamid Abou Zeïd. Au début de la rébellion touareg qui ouvrira la voie à la conquête jihadiste du nord du Mali, Belmokhtar achète des armes en Libye. Entre avril et juin 2012, il est vu à au moins deux reprises à Gao et Tombouctou, aux côtés d’Iyad Ag Ghaly, chef touareg des islamistes d’Ansar Dine.

Mais après sa destitution en octobre 2012 par le chef d’Aqmi pour insubordination, il crée sa propre unité combattante, les « Signataires par le sang ». En janvier 2013, quelques jours après le début de l’opération Serval, à l’initiative de la France, pour chasser les jihadistes du Nord malien, il lance l’attaque et la prise d’otages massive sur le complexe gazier d’In Amenas, dans le Sahara algérien (38 otages et 29 ravisseurs tués). En mai 2013, deux mois après avoir été annoncé mort par l’armée tchadienne au Mali, il revendique des attaques contre l’armée nigérienne à Agadez et le site français d’uranium d’Areva à Arlit, une vingtaine de morts au total. Condamné à mort à deux reprises par la justice algérienne, il aurait commandité l’assassinat de quatre Français en Mauritanie en décembre 2007, et les enlèvements de deux Canadiens en 2008, et de trois Espagnols et deux Italiens en 2009.

En août 2013, son groupe fusionne avec une partie du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) sous le nom d' »Al-Mourabitoune ». Al-Mourabitoune revendique son premier attentat meurtrier contre des Occidentaux à Bamako, le 7 mars 2015, pour venger un de ses dirigeants, tué par l’armée française en décembre 2014 dans le nord du Mali, et le prophète de l’islam « de l’Occident mécréant qui l’a insulté et moqué », en référence aux caricatures de l’hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo.

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