Carte blanche

‘Wallonie – Bruxelles: Ne les laissons pas nous diviser encore plus !’

Trois mois après que le cdH ait débranché la prise, la Région bruxelloise et la Fédération Wallonie-Bruxelles sont toujours au même point. Les majorités précédentes sont obligées de travailler ensemble. Pendant que l’on se questionne sur l’identité wallonne et bruxelloise, certains en profitent pour essayer de nous diviser encore un peu plus. Alors que des politiques avant eux sont déjà parvenus à nous faire croire que Flamands et Francophones avaient intérêt à se séparer…

Personne ne songe à nier des différences de sensibilité entre Bruxellois et Wallons sur certains sujets. Comme il y en a entre un Tournaisien et un Liégeois ou un Gaumais et un Carolo.

Durant la période de prospérité industrielle, Bruxelles, capitale de la Belgique a attiré vers elle les industriels, artisans, banquiers, universitaires… de tout le pays. S’y est développé un esprit plus bourgeois. Tandis que la Wallonie plus industrielle a surtout vu se développer la classe ouvrière. Cela a donné lieu à beaucoup de stéréotypes, du Bruxellois dikkenek au Wallon gréviste, etc. Si chacun regardait dans son assiette plutôt que de chercher des poux chez son voisin, et si en plus, chacun réfléchissait simplement aux meilleurs moyens d’améliorer son propre bien-être, les Wallons et les Bruxellois trouveraient d’excellentes raisons d’être solidaires et coopérants entre eux.

On veut nous conduire vers l’absurde

Sous prétexte que chaque Région aurait des besoins spécifiques, les régionalistes préconisent de multiplier les structures décisionnelles et veulent le morcellement des moyens. Parce que chaque membre d’une famille a des préférences ou des besoins culinaires différents, imagineriez-vous que chacun dispose de sa propre cuisine, de son propre budget nourriture, fasse lui-même ses achats, dispose de ses propres casseroles, se cuisine ses propres repas ? Vous avez compris l’absurdité. Déjà aujourd’hui, c’est ce qui se passe : aides à l’emploi différentes, services d’aide à l’exportation distincts, allocations familiales en discussion… Pourquoi pas un code de la route différent, tant qu’on y est… C’est ce que beaucoup de politiciens nous préparent. Arrêtons-les !

Ni la Wallonie seule, ni Bruxelles seule n’ont les moyens financiers, sociaux, économiques pour s’en sortir. La part des revenus primaires (1) de la population wallonne seule, c’est à dire les revenus tirés des salaires et des placements mais hors prestations sociales et hors impôts est de 28,2 % du royaume pour 32 % de la population. L’autonomie financière de la Wallonie signifierait au moins 25 % de sécurité sociale en moins !

Quant à Bruxelles, sa population est largement la plus pauvre du pays. Si son PIB est supérieur à celui de la Région wallonne, ceux qui y produisent la richesse habitent en grande partie dans les Brabants wallon et flamand. Bruxelles suffoque par un handicap de mobilité effrayant, souffre d’une situation financière désastreuse (le feuilleton des tunnels ou des chaussées qui s’effondrent n’est que la face visible de l’iceberg), fait les frais d’une gestion publique imprévoyante, court-termiste, sans vision et partisane. Tout cela fait le bonheur des Flamands qui n’attendent qu’une chose : prouver que Bruxelles est incapable de se gérer seule, pour mettre la main sur la capitale.

Désunis, Wallonie et Bruxelles n’ont aucune chance de pouvoir maintenir le niveau de vie actuel de leur population. La régionalisation entre Wallonie et Bruxelles est une aberration économique et la meilleure manière pour permettre à la Flandre d’avaler sans combat notre capitale. Le travail d’absorption du potentiel bruxellois par la Flandre a déjà bien commencé.

Bruxelles et la Wallonie sont incroyablement complémentaires. Une réelle synergie entre Wallonie et Bruxelles conduirait à des économies d’échelle dont les deux parties ont besoin. Bruxelles a des atouts incontestables, dont celui d’accueillir le plus grand nombre d’institutions internationales après New York ce qui lui confère une visibilité internationale dont la Wallonie aurait bien besoin. Elle, qui peine à se défaire de son image de région industrielle sinistrée, pauvre, peu attirante, pas très dynamique. La Wallonie amènerait à Bruxelles un marché, de l’espace, une capacité de production industrielle, deux aéroports performants. Les Bruxellois autant que les Wallons doivent s’unir pour mettre leurs moyens en commun pour espérer échapper au marasme.

Diviser pour mieux régner et tant pis pour les gens

La tentation du repli sur soi est forte surtout pour ceux qui n’ont rien à perdre d’une dégradation de la situation économique. Tous ces politiciens qui se disent régionalistes, ne préfèrent-ils pas régner sur un désert économique plutôt que d’être de simples spectateurs dans une Région Wallonie-Bruxelles plus prospère ? Ceux qui s’opposent à un rapprochement fort entre Wallonie et Bruxelles ne se préoccupent pas du sort futur de la population. Ils se préoccupent de leur carrière.

La Wallonie-Bruxelles sous quelle forme institutionnelle ?

Une fédération ou une seule entité Wallonie-Bruxelles ou autre chose encore, la forme institutionnelle est à construire, pour autant que le choix de la structure administrative et politique vise la performance économique et sociale, sans arrière-pensées partisanes ou de domination de l’une ou l’autre partie. Que le fonctionnement de la nouvelle structure soit évalué périodiquement et les conclusions rendues publiques de telle sorte à être ajusté si nécessaire.

Propositions

Dans ce domaine, comme dans quasi tous, tout a déjà été étudié et souvent de façon pertinente par des personnalités souvent au-dessus du lot. Mais les décideurs politiques n’en font rien. C’est aussi le cas sur la question de la synergie entre Bruxelles et Wallonie. Par exemple, le Forum pour la Recherche de l’Encouragement de l’Esprit d’Entreprendre, FREE (2) en abrégé, organisation apolitique et indépendante a fait 10 propositions pour lever les freins au développement des synergies entre les deux Régions. Il ne manque que la volonté politique pour les mettre en oeuvre.

Barbara Dufour et Walter Feltrin, cofondateurs d’Oxygène

(1) BNB compte régionaux 2003-2011.

(2) http://uwe.uwe.be/free/publications/wallonie-bruxelles-loccasion-a-ne-pas-manquer

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