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Un clivage « nord-sud » aussi dans la presse

Alors que la note de clarification de Bart De Wever n’a pas convaincu les francophones, les partis flamands ne comprennent pas l’attitude des partis francophones. Dans la presse, les journaux francophones dressent un constat d’échec tandis que la presse flamande pourfend l’attitude des partis francophones.

Derrière son titre « L’impasse plus que jamais », Le Soir décrypte: « en rédigeant sa note, Bart De Wever est resté dans le cadre imparti et n’a pas démarré de zéro. Mais il n’a pas proposé un compromis possible », écrit Béatrice Delvaux, la rédactrice en chef. « Entre la révolution copernicienne que souhaite la Flandre et la construction d’une nouvelle Belgique qu’acceptent les francophones, il n’y a plus que deux choses: un gouffre et… le Roi. »

Francis Van de Woestyne dresse lui aussi un constat d’échec dans la Libre. « Sur la forme. Bart De Wever a trompé tout le monde. Il ne devait pas jouer au formateur et poser un nouvel ultimatum. Il devait clarifier les positions des sept partis et chercher à les rapprocher », souligne l’éditorialiste. « Sur le fond, contrairement à ce qu’il prétend, le document n’est pas équilibré. C’est un alignement des positions flamandes dans tous les dossiers chauds. »

L’éditorialiste s’inquiète de la suite des événements. « Y a-t-il quelqu’un, au nord du pays, qui osera dénoncer sa stratégie unilatérale et son incapacité à trouver un accord équilibré? Le pays est, bloc contre bloc, plus divisé que jamais. »

Même constat d’échec dans les colonnes des journaux du groupe Sud Presse, pour qui Bart De Wever a présenté « un projet de compromis mal fichu, trop déséquilibré, presque provocateur ». « En demandant tout ce qui est inacceptable pour les francophones, Bart le nationaliste a dit non au clarificateur De Wever », constate Demetrio Scagliola.

Pour Christian Carpentier, dans la Dernière Heure, « Bart De Wever n’a jamais cru que sa note envoyée aux partis dimanche midi recueillerait les faveurs des formations sudistes ». Les partis francophones, « englués dans ce nationalisme flamand qui n’a rien de conjoncturel, n’ont plus guère le choix. Ce sera la fin du pays. Ou les larmes d’une bataille perdue ».

« Le compromis n’en était pas un! « , s’exclame L’Avenir en une. Pour Philippe Martin, « c’est là que se révèle, une fois de plus, le vrai visage de Bart De Wever. Derrière les demi-vérités et les fausses vraisemblances il y a d’abord la détermination, toujours intacte, de celui qui veut en découdre. Côté francophone, il ne subsistait que de minces illusions: les dernières sont tombées hier soir (dimanche)!

La presse flamande pourfend l’attitude des partis francophones Les éditorialistes flamands ne semblent pas comprendre lundi l’attitude des partis francophones mêlés aux négociations institutionnelles qui ont rejeté la veille la note proposée par Bart De Wever.

Pour Liesbeth Van Impe, dans le Nieuwsblad, les francophones ont réagi précipitamment, de manière négative. « C’est particulièrement bête. De Wever lui-même avait fait des ouvertures. Le minimum eût été d’en tirer profit. On peut se demander si, bien plus qu’une analyse rationnelle, ce ne sont pas des ego blessés et des sentiments qui dictent les réactions francophones », écrit-elle.

Pour le Belang van Limburg, Bart De Wever aurait mieux fait de ne pas s’étendre; une page aurait largement suffi, les francophones auraient quand même dit « NON ». « Nous avons toujours écrit que les francophones le feraient échouer », rappelle Erik Donckier. « Ils disent qu’ils ont compris le signal de l’électorat flamand. Ils ne l’ont pas compris, ou ils ne veulent pas le comprendre. La seule chose qu’ils veulent est un gouvernement sans la N-VA ».

La Gazet van Antwerpen est d’avis que la note De Wever n’est certainement pas un pamphlet flamand ni une traduction du programme de la N-VA. Mais le chargé de clarification ne s’est pas distancié de sa piste visant à responsabiliser les entités fédérées, écrit Dirk Castrel. « La formule à sept partis est morte. Nous nous rapprochons des élections, avec une campagne et une opinion publique plus radicales encore ».

Le Standaard pense également que les élections sont devenues inéluctables. Et pourtant, Bart De Wever a su se mettre en danger, écrit Bart Sturtewagen, évoquant « la proposition sur BHV », qualifiée de « relativement légère » en ce qu’elle offre un « rôle à un conseiller d’Etat francophone pour le traitement des plaintes des bourgmestres non nommés des communes de la périphérie », ce qui n’est pas forcément facile à vivre pour le « Flamand moyen ». Maintenant que les francophones refusent une base de discussion, c’est le chaos, fait-il observer.

Di Rupo et compagnie ont démontré dimanche que les politiques de notre pays peuvent se comporter comme des enfants irresponsables, écrit Luc Van der Kelen dans le Laatste Nieuws. « Un travail sérieux, fourni par un Bart De Wever qui, pour la première fois, a réussi à s’exposer, avec tous les risques que cela comporte pour les siens, a fait sciemment l’objet d’une fuite vers la presse, ce qui a permis ensuite de l’enterrer sans retenue. Bart De Wever est petit à petit en train de subir ce qui est arrivé à Yves Leterme il y a trois ans. D’abord, faire en sorte que ses propositions fassent l’objet de fuites, ensuite, le décrédibiliser, l’isoler et l’abattre ».

Ceux qui ont balayé de manière arrogante les propositions de De Wever de la table des négociations, prennent une très lourde responsabilité, écrit encore Luc Van der Kelen. « La plupart des Flamands ne veulent pas que les choses débordent, mais pour conclure un accord, il faut trouver deux parties de bonne volonté », conclut-il.

Enfin, selon le Morgen, la note De Wever était un bon brouillon en vue de la réalisation d’une réforme de l’Etat de premier choix, même l’unitariste le plus enragé ne pouvait y voir un plan pour la scission du pays. « On ne peut pas non plus dire que De Wever y a traité avec ménagement tous les dadas du mouvement flamand ».

Indubitablement, il reste des remarques à formuler au vu du travail réalisé par le chargé de clarification et de longues négociations seront encore nécessaires pour régler les questions de timing et de modalités, écrit Yves Desmet. « Mais il est particulièrement malheureux de jeter le texte à la poubelle au motif que, déséquilibré, il serait l’oeuvre d’un incorrigible séparatiste. Ce texte n’est pas à prendre ou à laisser mais on ne peut nier qu’il peut servir de base au lancement des négociations », conclut-il.

Le Vif.be, avec Belga

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