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Reynders frappe sous la Petite ceinture

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Didier Reynders veut recouvrir la Petite ceinture entre les portes de Namur et Louise. Trop compliqué ? Trop cher ? Pascal Smet propose un réaménagement de ce quartier saturé de voitures.

Après le centre-ville de Bruxelles piétonnisé, le haut de la ville va-t-il connaître, à son tour, une révolution urbaine ? Didier Reynders (MR), ministre de tutelle du fonds Beliris, une tirelire fédérale de quelque 125 millions d’euros annuels, a, dans ses objectifs, le projet d’enterrer la Petite ceinture entre la porte de Namur et le rond-point Louise. A ce stade, il lance une pré-étude de faisabilité sur le recouvrement du tronçon. « C’est sur la base de cette étude que nous prendrons attitude, en fonction du coût et des gains en matière de mobilité », assure le ministre.

L’ambitieux projet n’est pas neuf. En 2003, Willem Draps (MR), secrétaire d’Etat à l’Urbanisme de la Région bruxelloise, avait commandé une étude en vue de « dynamiser l’attractivité commerciale du haut de la ville ». Deux pistes étaient envisagées : enterrer la Petite ceinture, avec pour conséquence un déplacement du parking des 2 portes, obstacle souterrain qui interrompt le tunnel routier ; ou réaménager la surface, avec la création d’une zone arborée et de deux nouvelles places (« Egmont » et « Toison d’or ») reliant haut et bas de la ville.

Appel à idées pour le haut de la ville

Relancé en 2008, puis en 2012, le projet de couverture de la trémie a reçu le soutien du gouvernement Picqué. En revanche, l’actuelle majorité à Bruxelles a d’autres priorités, vu l’état des finances de la Région. L’équipe de Rudi Vervoort prône, sous cette législature, des projets de moindre ampleur : aménagements urbains, création d’espaces verts… Pour l’Atelier de recherche et d’action urbaines (Arau), l’option Reynders est « anachronique, dépassée et contre-productive pour la qualité de vie. » Explication : les tunnels coûtent cher à construire, mais aussi à entretenir, et l’enterrement de la Petite ceinture ne va pas dans le sens d’une réduction de la pression automobile, objectif du plan Iris 2 destiné à éviter la congestion de la capitale.

Toutefois, des associations de riverains ont déploré que la Région bruxelloise ait renoncé au recouvrement. Le projet aurait pu, estiment-elles, redynamiser un quartier de plus en plus peuplé et peu pourvu en espaces verts et de détente. Le mois dernier, Pascal Smet, ministre régional SP.A de la Mobilité, a organisé une concertation avec les habitants et les commerçants pour discuter de l’avenir du haut de la ville. Il promet un « plan B » : le lancement d’un appel à idées en vue d’un réaménagement du tronçon par un architecte-urbaniste. « Face à la concurrence de nouveaux centres commerciaux, on ne peut attendre le résultat de l’étude commandée par Reynders, lance-t-il. Il faut sans tarder rehausser l’image du haut de la ville, espace public voué au shopping de luxe, mais envahi à 80 % de voitures : huit bandes de circulation, des centaines de véhicules garés en surface, des trottoirs rikiki boulevard de Waterloo… »

Des immeubles sur la Petite ceinture ?

Pascal Smet n’est pas opposé par principe au recouvrement du tunnel, assure-t-il, mais il juge le projet techniquement compliqué et trop onéreux : il est évalué à quelque 100 millions d’euros dans une étude de faisabilité commandée par le ministre. « Un chantier de cette ampleur passerait par un partenariat public-privé et nécessiterait la construction de nouveaux immeubles commerciaux sur la trémie, au milieu de la Petite ceinture, afin de financer les travaux, estime-t-il. Un défi hasardeux : le quartier Toison d’or-boulevard de Waterloo, à l’instar de la chaussée d’Ixelles et de la rue Neuve, va être confronté à une rude concurrence : celle du futur centre commercial et de loisirs Docks Bruxsel, au canal, et, plus tard, celle du complexe Neo, au Heysel. »

Nul doute qu’un grand débat urbanistique ne manquerait pas d’émerger dès que serait envisagée l’édification de bâtiments commerciaux et de logement sur la trémie du tunnel. Car ces immeubles masqueraient la perspective sur la Petite ceinture. L’avenue de la Toison d’or et le boulevard de Waterloo deviendraient deux rues séparées. « Cela ne plaira pas à tous, pronostique le ministre. Connaissant Bruxelles, cette question alimentera des controverses pendant dix ans ! »

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