Le F-16 a besoin d'être remplacé. Mais quand ? © BAS BOGAERTS/ID PHOTO AGENCY

Remplacement des F-16: « Est-ce que les jeux sont faits ? »

Le PDG du groupe français Dassault Aviation, Eric Trappier, a dénoncé samedi le penchant d’une majorité de pays européens à acheter du matériel militaire américain alors que l’Europe « commence à parler de sécurité et à se prendre en charge ». Il a également plaidé pour que la Belgique se dote plutôt de l’avion de combat français Rafale.

« Je redoute d’une façon générale une volonté d’acheter américain. Nous avons subi le contrat du siècle en 1979 (l’achat de quelque 350 F-16 par la Belgique, le Danemark, les Pays-Bas et la Norvège, qui arrivent en fin de vie, ndlr). Pour les avions de combat, les pays européens, dans leur grande majorité, achètent exclusivement américains. C’est sûrement lié à la relation à l’Otan. Mais il n’est pas incompatible d’être dans l’Otan et d’utiliser des avions non américains, comme le prouve le Rafale », a-t-il affirmé dans une interview publiée par le journal L’Echo à deux jours de l’ouverture du 52ème Salon international de l’Aéronautique et de l’Espace (SIAE) du Bourget.

Le gouvernement a lancé en mars l’appel d’offres pour l’achat de 34 nouveaux avions de combat destinés à remplacer les 54 chasseurs-bombardiers F-16 vieillissants, pour un montant de 3,5 milliards d’euros. Quatre candidats restent en lice: le F-35 Lightning II du groupe américain Lockheed Martin, le Rafale de Dassault, le Saab JAS-39 E Gripen suédois et à l’Eurofighter Typhoon d’un consortium européen, après le retrait-surprise du géant américain Boeing, qui proposait son F/A-18 E/F Super Hornet.

« Nous proposons strictement la même version que pour les Rafale français. Ceux-ci seront dans les années à venir avec un standard dit F3R. Quand une quatrième version (F4) sera commandée par la France, on proposera automatiquement cette nouvelle version aux pays à qui on aura vendu le Rafale », a expliqué M. Trappier.

Il assure n’avoir aucun problème particulier avec l’appel d’offres (en jargon « Request for Government Proposal », RfGP) « à part un aspect particulier ».

« Si Boeing s’est retiré, c’est qu’il pense qu’il a peu de chances de gagner. Pourquoi? Il faut leur demander. Mais c’est quand même assez étonnant. La question que l’on se pose tous c’est: est-ce que les jeux sont faits? Est-ce que Boeing s’est retiré avec son F/A-18 E/F parce qu’il y a eu un choix entre la Belgique et les Etats-Unis pour acheter du F-35 et qu’ils l’ont l’appris? Ce qui serait bizarre alors que l’appel d’offres est en cours », souligne le PDG de Dassault.

Interrogé sur la « capacité nucléaire » – qui ne figure pas explicitement dans le RfGP alors que la Belgique participe avec ses F-16 à la dissuasion nucléaire de l’Otan – M. Trappier note qu’en Belgique « il y a des demandes très particulières pour des avions ‘Otan’, que seuls les Américains peuvent faire ».

« Est-ce que c’est éliminatoire? Rédhibitoire? Nous avons posé la question depuis longtemps aux autorités belges. Nous n’avons pas eu de réponse », ajoute-t-il, soulignant que « seuls les évaluateurs de l’appel d’offres le savent ».

Selon M. Trappier, les Européens devraient davantage acheter européen dans le domaine militaire.

« Notre continent commence à parler de sécurité et à se prendre en charge. On ne parle pas encore de préférence européenne en Europe, mais il y a un désir d’autonomie stratégique. Or, l’industrie contribue à l’autonomie stratégique. Donc on devrait aller vers un peu plus de matériel européen dans le domaine de la défense », fait-il valoir.

En réponse à une question sur le prix respectif du F-35 et du Rafale, M. Trappier met en avant les « performances » de l’appareil français.

« Ce fantasme du F-35 pas cher, je n’y crois pas. Et je ne crois surtout pas au fait qu’il sera moins cher en entretien que d’autres avions comme le Rafale ».

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