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Les chiffres du vote ethnique

A Bruxelles, Liège, Charleroi, Anvers et Verviers, notamment, les élus d’origine étrangère ont fait un nouveau bond en avant lors des communales du 14 octobre dernier. Faut-il s’en inquiéter, parce que nos valeurs seraient menacées? Faut-il s’en réjouir, parce que notre société s’ouvre et se transforme davantage? Les vrais chiffres du vote ethnique et l’enquête, dans Le Vif/L’Express de cette semaine.

Les deux élus de la liste Islam, à Anderlecht et Molenbeek, et leur intention proclamée d’instaurer la charia en Belgique ont occupé toute la place médiatique. Mais le 14 octobre, ils sont des centaines de candidats d’origine étrangère (maghrébine, turque et d’Afrique subsaharienne) à avoir été élus, sur des listes PS et CDH essentiellement. Ce vote « communautaire », ou « ethnique », alimente une crainte diffuse dans la population belge de souche: « nos valeurs, nos traditions, notre culture sont menacées, à terme. »

Et l’affaire du sapin de la Grand-Place de Bruxelles n’a pas calmé les inquiétudes et les accusations, plutôt infondées. Oui, les chiffres que révèle cette semaine Le Vif/L’Express démontrent une augmentation d’élus d’origine étrangère. Mais l’augmentation est logique, puisque la population d’origine étrangère augmente, elle aussi (25% des Belges ont au moins un grand-parent né à l’étranger). Le professeur Paul Wynants (Université de Namur) a calculé la participation et le profil des élus locaux d’origine extra-européenne en Région bruxelloise: « On est passé de 14 conseillers communaux sur 651 en 1994 (2,6% du total) à 90 sur 652 en 2000 (13,8%), 138 sur 663 en 2006 (20%) et 161 sur 685 en 2012 (23,5%).

En cumulant les résultats de 2006 et 2012, il apparaît que près de 60% des élus de l’immigration extra-européenne dans les 19 communes sont d’origine marocaine, environ 16% d’origine turque et près de 9% d’origine congolaise. » Les élus d’origine marocaine se trouvent d’abord au PS (51,2%) puis au CDH (20,3%) et chez Ecolo (10,6%). Les élus d’origine turque principalement au PS (54,8%) loin devant le CDH (16,1%) et le MR (12,9%). Le CDH reprend la tête avec ses élus d’origine congolaise (44,4%), devant le PS (38,9%) et le FDF (16,7%). Les élus d’origine étrangère se concentrent à Saint-Josse, Schaerbeek, Molenbeek, Saint-Gilles et Bruxelles-Ville.

Les chiffres et la méthodologie

Première étape, identifier les candidats et élus manifestement issus de l’immigration. L’unique solution trouvée jusqu’ici par tous les chercheurs consiste à examiner les noms de famille, une analyse dite « patronymique » qui présente bien des risques d’erreurs. Afin de ne pas trop mélanger pommes et poires, nous n’avons retenu que les noms issus des trois communautés les plus souvent soupçonnées de « vote ethnique ». En gros, ceux originaires du monde arabe, de Turquie et d’Afrique subsaharienne. A défaut d’un terme plus adéquat, nous les appellerons ici « allochtones » (en abrégé : « a »).

A partir de là, il devient possible de classer les listes de chaque commune en fonction de nos quatre critères :

1. L’écart entre candidats « a » et élus « a ». Ou plutôt l’écart entre leurs pourcentages respectifs. Si une liste électorale compte dix candidats, dont cinq d’origine étrangère (50 %), mais que seuls ces cinq-là sont élus (100 %), le différentiel est de + 50 %. Nous avons accordé une étoile par tranche de 30 % de différentiel (60 % = deux étoiles).

2. L’écart entre élus « a » et « non a ». Il s’agit de la différence entre le pourcentage de candidats « allochtones » élus et le pourcentage de « non-allochtones » également élus. Tout comme dans le premier cas, chaque écart de 30 % vaut une étoile.

3. La moyenne des voix de préférence. Nous avons calculé celle de l’ensemble des candidats « a », puis celle des autres. Les premier et dernier de la liste, dont le résultat fait exploser souvent la moyenne, n’ont pas été pris en compte. Les listes où les « a » ont obtenu au moins une fois et demie plus de voix que les seconds obtiennent une étoile.

4. Le « bond » dans la liste. Il s’agit du rapport entre le nombre d’élus « a » et « non a » élus malgré une position peu visible sur la liste (une place supérieure au nombre de sièges obtenus). Un écart entre les deux dépassant deux unités vaut une étoile.

Les résultats ci-dessous n’ont aucune prétention scientifique. Ils permettent cependant de cerner d’un coup d’oeil les listes où s’accumulent les indices de vote ethnique.

1. Les listes bruxelloises qui obtiennent au moins une étoile.

2. Les listes qui obtiennent une étoile à Charleroi, Liège, Anvers, Gand et Verviers.


3. Les résultats complets à Bruxelles-Capitale (listes comptant au moins un élu et un candidat d’origine étrangère).

E.R.

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