L’½uvre de la semaine: »Et tourne manège « 

Dans un tableau de Magritte, divers objets (pipe, bilboquet, rideau, miroir mais aussi personnage ou encore l’un ou l’autre mot) cohabitent en résistant à toute forme d’analyse. Ils gardent le mystère du monde comme le demandait le peintre surréaliste. Ici aussi, on retrouve divers figures mais chaque fois, ces apparitions sont incluses dans un tableautin simplement associé à un autre et ainsi de suite.

En file indienne pourrait-on dire. Sauf qu’à y regarder de plus près, l’artiste choisit de brouiller les pistes. Par exemple, en choisissant de configurer un carré selon une logique en pétard puisque si il y a bien quatre toiles dans la largeur, on en compte cinq dans le sens de la hauteur. Du coup, le centre échappe à la symétrie et l’équilibre visuel vacille. La perception ne peut que jouer à saute-mouton d’une image à l’autre. Alors, laquelle choisir comme point de départ ? Sera-ton attiré par une couleur de fond plus vive ? un rouge, un vert néon ? Ou alors un visage de profil ? Celui du haut est entouré de pastilles aux allures de dragées médicamenteuses ? L’autre, la cigarette aux lèvres, a la gorge en feu. Chacun choisit donc son errance comme dans « Le Jardin des délices » de Jérôme Bosch. Chacun se construit donc un récit qui lui convient, fait de petits rires gourmands ou d’angoisses. Car il y a bien des menaces ici : une tour s’effondre, un engin planétaire menace la terre…µ

L’auteur de ces mondes travaille à Turin dans un studio aux allures de laboratoire-foutoir où sont entassés figurines miniatures, cuillers, crochets, globes de verres, ampoules led, écrans plats et fragments d’anatomie. Il en fait des sculptures lumineuses alors que dans un autre coin, de ses yeux rieurs, il peint de petits ensembles comme celui-ci, présenté aux côtés d’autres oeuvres en polyptyques signées par d’autres artistes de la galerie.

Guy Gilsoul