Gérald Papy

Hollande, est-ce « du sérieux » ?

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Cela ne s’invente pas. L’appartement parisien proche de l’Elysée où François Hollande a été « surpris » à passer des nuits aux côtés de l’actrice Julie Gayet est sis… rue du Cirque. C’est effectivement à un grand cirque politico-médiatique passablement hypocrite auquel on a assisté, en France, depuis la révélation de l’idylle non officielle du chef de l’Etat.

Personnalités politiques de droite promptes à fustiger la légèreté d’Hollande alors que c’est leur mentor Nicolas Sarkozy qui instaura la première présidence bling-bling. Médias traditionnels embarrassés par une information émanant d’un magazine people mais la sur-développant par la suite. Responsables socialistes faisant l’autruche au nom du sacro-saint respect de la vie privée mais ne pouvant ignorer les conséquences politiques, y compris personnelles, à quelques mois d’échéances électorales… Inutile de lui donner un statut hors-norme, inutile de la minimiser, l’information sur les virées nocturnes de François Hollande pose des questions.

Un chef d’Etat a-t-il droit à une vie privée ? Oui. « Comme tout citoyen », selon les termes de la première réaction de Hollande ? Non. Même « normal », le président n’est pas un administré comme les autres. La fonction impose son lot de contraintes, en connaissance de cause. Déplorer la peopolisation de la vie politique sous l’effet des magazines et des réseaux sociaux et la combattre en paroles n’exonèrent pas de s’en prémunir dans les faits.

Hollande a-t-il été imprudent ? Son impudence et son imprudence ne font aucun doute en regard de son exposition potentielle lors de ses rendez-vous « secrets » hors de son palais. Question de sécurité personnelle mais aussi de sûreté d’Etat. Imagine-t-on de quel chantage aurait pu être victime le président de la 5e puissance mondiale si un service de renseignements étranger ou la mafia corse avait installé des caméras rue du Cirque ?

L’imprudence peut aussi être interrogée chez François Hollande à l’aune de l’utilisation que lui-même, pourtant réputé personnalité discrète, a fait de sa vie privée (mise en scène de la naissance d’un de ses enfants avec Ségolène Royal, révélation de la relation avec la « femme de sa vie » Valérie Trierweiler…). Peu d’hommes politiques résistent à cette tentation. En l’occurrence, seule vaut une résistance de tous les instants.

Hollande est-il un gaffeur ? Certains expliqueront que celui qui promettait une présidence exemplaire n’a pas été servi par les circonstances lorsqu’il a dû affronter l’incroyable « affaire Cahuzac ». Mais l’indélicatesse du tweet anti-Ségolène Royal de Valérie Trierweiler, le dossier Leonarda voire la froide fin de non-recevoir opposée à toute question sur la première dame de France lors de la conférence de presse du 14 janvier interrogent la capacité de discernement du président français et l’efficacité de son équipe de communication.

En regard de l’Histoire, les Français retiendront-ils de ce début 2014 le pacte de responsabilité détaillé mardi par leur président (30 milliards d’euros d’allègement de charges pour les entreprises moyennant une rationalisation des dépenses de l’Etat) ou la fuite des responsabilités à laquelle il semble trop souvent céder ? «  »Performe ou meurs ! », voilà l’injonction de nos démocraties médiatiques », note le chercheur Christian Salmon dans l’entretien qu’il accorde cette semaine au Vif/L’Express, évoquant « une guerre pour le contrôle des audiences » qui « détruit l’attention, la délibération, la crédibilité de la parole publique, qui sont le sel de la démocratie ». La question reste posée de savoir si François Hollande est vraiment taillé pour relever ce défi.

de Gérald Papy

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