Migrants belges dans une boucherie à Elisabethville, ville aceuillant des belges pendant la Première Guerre Mondiale © Imperial War Museums/Lewis G P

Ces 250.000 Belges oubliés par l’histoire

Stagiaire Le Vif

Durant la Première Guerre mondiale, la Grande-Bretagne a accueilli 250.000 Belges sur son territoire. Il s’agit du plus grand afflux migratoire de l’histoire britannique, révèle la BBC. Un événement pourtant méconnu.

Durant la Première Guerre mondiale, la Grande-Bretagne a accueilli 250.000 Belges sur son territoire. Il s’agit du plus grand afflux migratoire de l’histoire britannique, révèle la BBC. Un événement pourtant méconnu.

Le 14 octobre 1914, la petite ville portuaire de Folkestone est en émois. Ce jour-là, 16.000 Belges débarquent pour fuir leur pays occupé par l’armée allemande. Pendant les mois qui suivent, des milliers migrants belges continuent à affluer sur les côtes britanniques.

Des villes ont même été créées pour les accueillir. Les Belges avaient leurs propres écoles, journaux, hôpitaux, églises et même leurs forces de l’ordre. C’était par exemple le cas d’Elisabethville, une enclave souveraine habitée par 6.000 Belges et située au nord de l’Angleterre, proche de la frontière avec l’Écosse.

Selon les statistiques, on dénombre jusqu’à 250.000 migrants belges sur le territoire. Il s’agit donc du plus grand flux migratoire de l’histoire britannique, révèlent des historiens à la BBC. Il n’existe néanmoins qu’un seul monument dédié à ce pan de l’histoire en Grande-Bretagne.

Des migrants accueillis à bras ouverts

L’accueil des migrants fut plus que chaleureux, au point qu’il en devient parfois gênant. Un Belge déclare avoir même eu peur lorsque les Britanniques se bagarraient pour pouvoir l’aider à porter ses valises. La presse britannique les représentait alors comme les « braves » Belges, se remémore la petite-fille d’un migrant qui dirige un centre de recherche en ligne sur les réfugiés belges. À l’époque, le gouvernement britannique utilise leur arrivée pour galvaniser l’esprit antigermanique et le soutien à la guerre.

Durant cette période et lors de son séjour à Torquay, la romancière Agatha Christie avait elle-même fait la connaissance d’un gendarme belge qui va l’inspirer pour son célèbre personnage Hercules Poirot et dont les premières aventures se déroulent en 1920.

Mais les Britanniques qui accueillent ces migrants ne pensaient pas que la guerre durerait si longtemps. Au fil du temps, la pénurie gronde et l’hospitalité laisse la place à l’impatience, parfois même à la rancoeur. Dans les villes souveraines, les Belges avaient toujours accès à l’eau et l’électricité, alors que les villes voisines peinaient à en obtenir.

Un pan méconnu de l’histoire

À la fin des combats, le discours du gouvernement britannique change radicalement. Il offre des billets aux Belges pour qu’ils rentrent chez eux. Douze mois plus tard, 90 % étaient de retour chez eux. Les dix pour cent restants se sont intégrés à la population. « Ils étaient catholiques, blancs et ils ne sortaient donc pas du lot. Ils sont devenus invisibles », explique Gary Sheffield, professeur d’études de guerre à l’Université de Wolverhampton, à la BBC.

À leur retour du front, les soldats britanniques n’ont pas eu envie de raconter leur quotidien. De leur côté, leurs familles n’ont pas non plus voulu parler de ce qui s’était passé pendant leur absence. Selon Tony Kushner, professeur d’histoire à l’Université de Southampton, le nombre énorme de pertes humaines engendrées par la Grande Guerre, s’est révélé être un évènement plus « complexe et problématique » dans la construction de la mémoire collective britannique, que le souvenir de ces migrants belges qui ont débarqué un jour sur les côtes de Grande-Bretagne. Ce qui a pour conséquence que ces migrants ont été oubliés par l’histoire.

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