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Brice De Ruyver : « Nous devons développer une culture de la sécurité »

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Criminologue à l’université de Gand, Brice De Ruyver fut le conseiller en sécurité du libéral Guy Verhofstadt quand il était Premier ministre. Son analyse.

Que faut-il entreprendre après les attentats de Bruxelles ?

La priorité, c’est de continuer étendre les moyens de nos services en termes humains. Nous avons encore d’énormes progrès à faire au parquet fédéral, à la police fédérale, dans les services de renseignements ou dans les polices locales. Tous croulent sous la charge de travail en raison du développement des activités terroristes. Mais cela ne s’améliorera pas du jour au lendemain : on sait que cela prend du temps en terme de formation, notamment. Au niveau technologique aussi, nos services doivent également évoluer, d’urgence.

Faut-il que nous changions nos vies ?

Nous devons développer une culture de la sécurité dans ce pays. Parce que nous avons beaucoup de retard en la matière, même s’il ne s’agit pas de mettre en péril notre qualité de vie. Pour prendre un exemple, au début des années 2000, nous avions eu des discussions avec les diamantaires anversois qui refusaient de déménager à Tel-Aviv parce que la qualité de vie était supérieur chez nous. Cela étant, nous devons accepter des mesures restrictives à l’entrée des lieux publics, par exemple. Personne ne proteste contre le fait d’être fouillé à l’entrée d’une manifestation sportive.

On a beaucoup pointé du doigt certains quartiers bruxellois. Faut-il y entreprendre des actions spécifiques ?

Ce n’est pas normal que dans un Etat de droit, des fugitifs disparaissent aussi longtemps dans un quartier alors que des gens étaient au courant. Cela montre que dans certains quartiers bruxellois, il y a des gens qui se distancient de la société légitime. On le savait déjà pour l’économie illégale et on se rend compte aussi que cela finance de sombres activités De telles zones de non-droit sont inacceptables dans une démocratie et il faut mettre une fin à cela. Si certains ne l’ont pas encore compris cela avec ce qui s’est passé… On ne peut pas laisser passer le fait que des jeunes commencent à jeter des pierres lors d’une opération légale de police !

Cela dit, je ne tiens pas uniquement un discours « law and order ». La lutte contre le terrorisme, c’est 90% de prévention et 10% de répression. Une politique inclusive est nécessaire pour maintenir ces gens dans la société. On doit continuer à se battre pour assurer la scolarité et faire en sorte que cela ouvre sur un emploi.

La complexité institutionnelle de la Belgique est-elle un problème ?

Il faut à tout prix éviter les chevauchements de compétences et la sixième réforme de l’Etat n’a pas tout résolu. On doit savoir clairement qui est responsable pour quoi parce que nous devons veiller à avoir la capacité de mobiliser au mieux les compétences de chacun. Voilà pourquoi je plaide notamment pour une zone de police unique à Bruxelles afin que les 5000 fonctionnaires de police soient affectés au mieux dans les quartiers qui en ont le plus besoin. Cela ne résoudrait pas tout, mais cela permettrait d’être plus efficace.

Dans Le Vif/L’Express de cette semaine, le dossier « Comment vivre avec ça » :

  • les mesures politiques qui vont changer le quotidien
  • la peur
  • l’accommodement aux forces de l’ordre
  • le rapport à l’actualité
  • la suspicion
  • la planification et la gestion du temps
  • le rapport aux technologies
  • le fait d’être musulman
  • vers une société plus mûre, plus dure ou plus bête ?

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