Tueurs du Brabant : qui et pourquoi ? Le mystère n'est toujours pas élucidé. © BELGAIMAGE

11 février 1983, le début de la folie meurtrière des « Tueurs du Brabant »

Ils portent des masques. Comme au carnaval. Et tirent des balles. En l’air. Mais ils ne font rire personne. Ce vendredi 11 février, en fin de journée, des hommes armés sèment la terreur dans le Delhaize de Genval. Ils empochent près de 700 000 francs. Avant de s’envoler dans leur Peugeot 504, une voiture volée quelques jours plus tôt à Watermael-Boitsfort. C’est le début d’une longue série.

Enfin, pas exactement le début : déjà en septembre 1982, un hold-up avait eu lieu chez un armurier wavrien. Et trois mois plus tard, un homme avait été assassiné à Beersel. Mais dorénavant, une trame se dessine ; des liens se tissent. Et une chape de terreur tombe sur la périphérie bruxelloise. Le 25 février, c’est à Uccle que les terroristes opèrent. La cible n’a pas changé : un Delhaize. Mais le bilan est plus lourd : un homme, qui a tenté de donner l’alerte, est abattu. Quelques jours plus tard, le patron du Colruyt de Hal est contraint d’ouvrir les caisses de son magasin. Dans la foulée, il est tué. De plus en plus, la violence s’invite dans les opérations. Lorsqu’il fait ses courses ou son plein d’essence, le citoyen brabançon se transforme en véritable cible. Et quand les forces de l’ordre débarquent, les bandits ne fuient pas. Au contraire, préférant l’affrontement, ils ouvrent le feu. Et parviennent toujours à s’en sortir.

L’affaire est devenue politique. Tout le monde s’en mêle et tout le monde s’emmêle. Invoquant des raisons budgétaires, le ministre de l’Intérieur Charles-Ferdinand Nothomb annonce ne pas pouvoir recruter de nouveaux effectifs dans la gendarmerie. A l’automne 1983, des bandits borains sont arrêtés. Mais alors qu’ils se trouvent en prison, la série continue : un bijoutier et son épouse sont assassinés à Anderlues. Tandis que la police a toujours un coup de retard, la justice tergiverse et le politique peine à rassurer.

Fin 1985, après un ultime festival de balles à Alost, la furie semble s’estomper. Une quinzaine d’opérations menées, vingt-huit morts et quelques millions empochés : tel est le bilan des malfrats. Mais les questions demeurent : qui sont-ils ? des membres de l’extrême droite ? d’anciens gendarmes ? des tueurs à gages ? Et pourquoi ont-ils agi ? pour se débarrasser de certaines cibles ? pour renforcer l’appareil répressif de l’Etat ? pour prendre le pouvoir ? Deux commissions d’enquête et de nombreux magistrats plancheront sur la problématique. En 2015, le délai de prescription pour les crimes graves passe même de trente à quarante ans afin de sauver l’enquête. Aujourd’hui pourtant, un profond mystère demeure.

En toile de fond, une certitude se dégage aussi : à bien des égards, les tueurs du Brabant ont mis en lumière les dysfonctionnements des services de l’Etat. En témoignent ces gendarmes qui arrivent tardivement sur les lieux du crime, ces magistrats qui, sans raison apparente, écartent certaines pistes, ou encore ces services qui refusent de collaborer.  » J’ai été profondément ébranlé par le fait que de telles dérives aient pu se produire alors que j’étais Premier ministre « , écrira Wilfried Martens dans ses mémoires.

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